La fois où Pierre Elliott Trudeau a frappé Raymond Beaudoin dans les parties


Stéphane Plante
Date: Le lundi 30 août 1993
Lieu : À Place des Arts au cours du Festival des films du monde de Montréal
Personnes connues impliquées: Le personnage de reporter mondain Raymond Beaudoin incarné par Pierre Brassard et l’ex-premier ministre Pierre Elliott Trudeau. Le futur pm Justin Trudeau (22 ans) était aussi assis juste à côté de son paternel lors de l'événement.
Échelle de malaise: 7/10
Le contexte
En 1993, l’ancien premier ministre du Canada Pierre Elliott Trudeau (PET), assistait à une projection en avant-première d’un épisode de la série documentaire consacrée à ses mémoires. Ne reculant devant aucune mondanité pour frayer avec le gratin, le reporter des Bleu poudre Raymond Beaudoin est allé accoster l’ex-politicien pour lui poser quelques questions assassines. Avant la projection, mais aussi après.
Les questions incisives de Beaudoin ont eu raison de la patience de Trudeau qui s’en est pris physiquement à quelques reprises au reporter à barbichette et lunettes. Cette altercation surréaliste a été présentée à l’émission Taquinons la planète et est devenue culte.
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Le déroulement des événements
Pierre Brassard a raconté en entrevue à l’émission La Soirée est (encore) jeune en 2017 que c’est lors d’une réunion le jour même du reportage que l’idée d’aller taquiner Trudeau a surgi. Ghislain Taschereau, autre Bleu poudre, apprend alors dans le journal que l’ex pm assistera à une projection d’un documentaire sur ses mémoires au Festival des films du monde. L’idée d’envoyer Raymond Beaudoin couvrir l’événement s’avérait toute naturelle.
Une fois sur les lieux, Beaudoin assiste à l’entrée de celui qui avait été premier ministre jusqu’en 1984, flanqué de son fils, le futur politicien Justin Trudeau (beaux cheveux).

Une fois que Pierre Elliott Trudeau est assis pour visionner le documentaire, le tonitruant personnage incarné par Pierre Brassard décide d’aller le taquiner. De son strident «HIIIIYYOOOOO ICI RAYMOND BEAUDOIN!», il aborde l’ex-homme d’État en lui demandant: «C’est quoi le titre de votre film?» Après que Trudeau lui eut répondu que le film en question n’avait pas de titre, Beaudoin lui rétorque «C’est pas “Chéri, j’ai craché sur les Québécois”?»
Ne sachant pas trop quoi répondre, M. Trudeau tente une blague : «J’ai craché sur vous...» Beaudoin demande alors si le documentaire se veut une sorte de Parc Jurassique (une question très datée, le film allait prendre l’affiche au Québec en juin de cette année-là) où «on déterre des vieux monstres pour faire peur au monde...»
Ayant maille à partir avec les questions incisives du reporter tout de bleu poudre vêtu, Trudeau lui envoya cette réplique débordante de subtilité: «t’es une merde... Qu’est-ce que tu veux qu’j’te dise?»

Mais Raymond Beaudoin n’avait pas dit son dernier mot et il comptait bien faire cracher le morceau à l’architecte de la nuit des longs couteaux.
Il le retrouve donc après la projection du film. L’ex-politicien, avant même de laisser Beaudoin l’interroger, arrache la barbichette fétiche du reporter.

Quelques secondes plus tard, c’est une authentique claque au visage que va administrer l’honorable PET au faux reporter.
Mais. Ce n’était pas fini.
Dans les instants qui suivirent, alors que Beaudoin se risque à formuler une blague sur les initiales de son nom (PET), Trudeau se dirige vers lui pour lui asséner l'assaut ultime: un coup de pied dans les parties intimes.
Malgré cette attaque du septuagénaire, le personnage de Pierre Brassard revient à la charge, mais les gardes du corps de PET ont vite fait de l’éloigner.
Raymond Beaudoin reparlera de cette expérience dans un autre épisode de Taquinons la planète. On le retrouve alors sur un divan dans le bureau d’un psychologue. Sur le ton de la confidence, il exprime son désarroi avec la phrase suivante: «J’ai toujours cru qu’un PET se prenait par-derrière...»
Ce qu’il en reste aujourd’hui
Au lendemain de l’incident diplomatique, Nathalie Petrowski, présente à la première du documentaire, raconte dans La Presse ce qu’elle a vu alors que les caméras du Télé-Journal avaient malheureusement déjà quitté les lieux.

«L'épisode apporta, sinon un peu d'action, du moins un heureux contraste au portrait un peu trop angélique qu'on venait de nous proposer...» Son billet peut toujours être consulté ici.
Les Bleu Poudre eux-mêmes ont souvent parlé de ce moment de télé devenu culte au Québec.
À la radio, Pierre Brassard a révélé en 2017 que la claque au visage donnée par Pierre Elliott Trudeau fut plus douloureuse, à la fois à l’égo et au visage, que le coup de pied dans les parties.
En entrevue avec le Journal en 2016, Jacques Chevalier nous apprenait que l’entourage du premier ministre avait tenté d’étouffer l’affaire à l’époque. «On avait peur de se faire censurer et pour être sûr que ça se sache, on avait fait couler l’histoire sur les fils de presse.»
En 2005, MusiMax classe l'événement en 93e position de son top des Scandales et Tragédies du Showbiz Québécois (2005).
Présent lors de l’incident, Justin Trudeau s’inspirera des prouesses pugilistiques de son paternel pour lui-même monter sur le ring des années plus tard, le 31 mars 2012, pour y affronter le sénateur conservateur Patrick Brazeau dans un combat de boxe.
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