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L'article provient de Le Journal de Montréal
Santé

Retards chroniques : pourquoi certains ne sont jamais à l’heure?

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Photo portrait de Dre Christine Grou, psychologue

Dre Christine Grou, psychologue

2025-03-02T17:00:00Z
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À l’adolescence, j’avais une camarade de classe avec qui j’aimais bien aller au cinéma... mais qui était systématiquement en retard. Malgré plusieurs discussions où je lui faisais part de mon malaise, rien ne changeait. Au lieu de subir cette frustration ou de mettre notre amitié en péril, j’ai plutôt choisi l’option suivante: choisir un compagnon de cinéma ponctuel! 

Un retard occasionnel s’explique et se comprend aisément, surtout lorsqu’on prend la peine de prévenir l’autre et de lui exprimer nos excuses. Mais quand les retards deviennent une habitude, voire une constante, ceux-ci peuvent se transformer en une source de frustration, et parfois même en conflits dans nos relations, y compris les plus précieuses. Pourquoi certaines personnes sont-elles toujours en retard? Et comment y faire face?

Avant de répondre à ces questions, il convient de rappeler que dans de nombreuses sociétés industrialisées, la ponctualité est souvent perçue comme une vertu essentielle associée au respect de l’autre. Or, cette perception varie selon les contextes culturels: dans certains milieux, une arrivée trop ponctuelle peut être interprétée comme une marque d’empressement malvenu, voire d’impolitesse. Quand j’étais très jeune, ma famille et moi avions fait un séjour dans un pays d’Amérique du Sud, et nous avions été surpris de constater que dans certaines situations sociales, il fallait arriver au moins une heure après l’heure indiquée.

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Cet exemple illustre à quel point le rapport avec le temps peut être façonné par des normes spécifiques, et qui sont bien loin d’un modèle unique et absolu.

La psychologie des retards

Cela dit, diverses raisons peuvent expliquer des retards. Certaines personnes ont plus de mal à structurer leur quotidien faute de planification et de priorisation, et ce désordre peut contribuer aux retards plus fréquents, voire constants. La procrastination ou une anxiété liée à un événement donné peut aussi expliquer les arrivées tardives chez certaines personnes.

Chez d’autres, c’est plutôt en raison d’un surbooking chronique. Vous les connaissez sûrement: ces éternels débordés qui se plaignent que les journées sont trop courtes, que leur agenda déborde, mais qui refusent pourtant de ralentir. Ils veulent tout voir, tout vivre, pensant avoir le temps de tout faire... et finissent par faire attendre tout le monde. Si vous en avez un dans votre entourage, vous avez sans doute une ou deux anecdotes de retard à raconter – et pas toujours avec le sourire!

D’autres facteurs de nature psychologique peuvent parfois aussi expliquer les retards répétés. En outre, un faible niveau d’empathie ou certains traits narcissiques peuvent conduire certaines personnes à accorder moins d’importance aux attentes des autres, ou encore à minimiser l’impact de leur retard.

Attendre... ou prendre les devants?

Si les retards répétés sont une source de frustration, doivent-ils annoncer la fin d’une relation? Ou faut-il les tolérer indéfiniment sans mot dire, et ce, au nom d’un lien privilégié? Dans un monde idéal, le retardataire réaliserait soudainement l’impact de son comportement et mettrait fin à cette habitude. Or, ce genre de prise de conscience n’arrive pas par magie. C’est pourquoi il est souhaitable de discuter de façon posée et franche avec la personne cumulant les retards.

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Une telle discussion permet de définir les besoins, les perceptions et les attentes de chacun. Cela doit se faire dans un climat de respect, sans être teinté de reproches. Il faut aussi traiter de la question avec décence et éviter les mots durs sous le coup de la colère. Durant cet échange, il peut être utile d'exprimer à l’autre que nous avons l’impression que ce comportement se produit souvent, et demander si cela se produit dans d’autres contextes. Il est aussi important de parler au «je»: d’exprimer que cela me chagrine ou que cela me blesse, par exemple.

Cet échange peut aussi permettre d’explorer ensemble des solutions concrètes pour améliorer la situation. Enfin, cette conversation peut aussi vous permettre de fixer certaines limites plus spécifiques: tolérer un retard dans le cadre d’une soirée entre amis, d’accord, mais pas lors d’un événement important.

Il est aussi important de demeurer à l’écoute de notre petite voix intérieure. Si la perspective de partir en voyage avec un retardataire notoire vous épuise avant même l’heure du départ, pourquoi prendre ce risque? Si cette relation est suffisamment riche, mieux vaut privilégier des contextes où la ponctualité n’est pas un enjeu.

Toutefois, si au-delà des retards la personne vous accorde peu d’importance ou ne vous considère pas, cela pourrait être l’occasion d’évaluer si vous souhaitez ou non poursuivre cette relation.

Le pouvoir de choisir

En somme, être toujours en retard ou toujours à l’heure peut refléter, consciemment ou non, notre rapport au temps... et aux autres. Plutôt que de subir les retards avec frustration, nous pouvons saisir l’opportunité d’ajuster nos attentes, de poser nos limites et de nourrir un dialogue sincère avec notre entourage. Après tout, le temps est l’une de nos ressources les plus précieuses. Nous avons le pouvoir de choisir comment nous souhaitons le partager.

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