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L'article provient de Le Journal de Montréal
Santé

La culpabilité du proche aidant

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Photo portrait de Dre Christine Grou

Dre Christine Grou

2024-11-16T16:00:00Z
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Être proche aidant, c’est s’engager pleinement, avec dévouement et sans compter pour assurer le bien-être d’une personne qui nous est chère. Or, malgré tous les efforts qu’ils déploient, les proches aidants sont nombreux à ressentir un sentiment envahissant de culpabilité. Comment peut-on se sentir aussi coupable en aidant autant, et comment parvenir à mieux apprivoiser ce sentiment ?

Si vous êtes l’aidant d’un proche, vous pouvez avoir l’impression que chaque moment que vous vous accordez empiète sur le temps que vous pourriez lui consacrer, créant en vous un sentiment de déchirement perpétuel.

À titre d’exemple, vous vous sentez coupable de quitter la maison, même pour quelques heures. Vous vous en voulez de ne pas passer assez de temps en compagnie de votre proche. Et pour en rajouter, vous avez l’impression de négliger vos amis, les autres membres de votre famille ou vos collègues en raison de ce rôle si exigeant.

Cette culpabilité découle souvent de la perception que l’on ne fait pas « assez », que l’on ne répond pas complètement aux attentes de la personne dans le besoin et que l’on pourrait toujours en faire plus pour l’aider.

Il arrive aussi que cette personne refuse l’aide extérieure et qu’elle ne veuille que vous.

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Devant de telles exigences, cette impression de négliger ou « d’abandonner » ce proche peut être particulièrement accablante.

Ne pas s’oublier

Toutefois, il est irréaliste de penser que vous devez être disponible à tout moment, ou encore que vous pouvez toujours en faire plus. Vous croyez peut-être qu’aucune autre personne ne pourrait lui apporter les mêmes soins que vous, mais personne n’est irremplaçable.

Il est également essentiel de considérer deux facteurs.

D’abord, il faut prendre soin de soi pour être en mesure de prendre soin des autres.

Ensuite, les demandes d’une personne en perte d’autonomie peuvent devenir irréalistes quand la cognition est altérée. Dans un tel cas, la personne aidée peut ne plus être en mesure de réaliser l’ampleur des attentes qu’elle a envers vous.

Au fil du temps, en plus de vivre de la culpabilité, on peut aussi se sentir impuissant, voire épuisé lorsque l’on est proche aidant.

Certains signes peuvent indiquer que vos limites sont atteintes, voire dépassées : tristesse, fatigue intense, troubles du sommeil, irritabilité, impatience, perte de motivation ou tendance à l’isolement.

Cet état, souvent appelé « fatigue de compassion », nécessite d’agir rapidement pour éviter qu’il ne s’aggrave.

Mettre ses limites

Il est essentiel d’établir certaines limites, mais cette démarche n’est pas aisée, car elle s’accompagne — elle aussi — d’un sentiment de culpabilité.

Or, il faut garder à l’esprit que prendre du temps pour soi n’est pas égoïste, mais plutôt un moyen de pouvoir continuer à être là non seulement pour la personne que vous aidez, pour toutes les autres, ainsi que pour vous-même.

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Il est également important de prendre un moment pour réfléchir à vos propres besoins.

Quelles actions pouvez-vous entreprendre pour alléger votre quotidien et vous permettre de reprendre votre souffle ? Cela peut inclure des gestes simples, comme organiser votre emploi du temps de manière plus équilibrée, ou encore déléguer certaines tâches à des services externes, par exemple.

Faire appel à des ressources telles que les groupes de soutien ou les services de répit peut aussi être salutaire. Ces petits gestes sont cruciaux pour vous aider à maintenir un meilleur équilibre entre l’aide que vous offrez à ce proche, votre bien-être... et votre santé psychologique.

Accepter d’être humain

En somme, être un proche aidant, c’est s’engager dans un parcours semé d’embûches, de défis et d’inquiétudes, et celui-ci s’apparente davantage à un long marathon qu’à un sprint.

Ce rôle est exigeant, et il est normal de ressentir une multitude d’émotions : la colère, l’exaspération, l’ambivalence ressenties et aussi la culpabilité ne font pas de vous un mauvais aidant, mais un être humain.

Il est primordial de pouvoir ressentir ces sentiments en sachant qu’ils sont tout à fait normaux, en faisant preuve de compassion envers vous et en prenant soin de vous. Ce faisant, vous pourrez continuer à offrir le meilleur de vous-même à votre proche.

La proche aidance est un statut reconnu par le ministère de la Santé et des Services sociaux, un statut suffisamment important pour qu’un plan d’action visant à soutenir les proches aidants ait été mis en place. Il s’agit là d’une reconnaissance tellement méritée et enfin accordée aux aidants.

Alors, chaque fois que vous vous sentirez au bout du rouleau, en ayant tellement fait, mais en ayant le sentiment de ne pas en avoir assez fait, essayez de prendre un pas de recul pour prendre une pause et chasser la culpabilité.

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