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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

«Je voudrais tant croire que tout finira bien»: un recueil de Jean-Paul Baumier où la douce cruauté du quotidien fascine

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Josée Boileau

2025-02-09T14:00:00Z
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La vie est cruelle, mais ç’a quelque chose d’ensorcelant quand on sait le raconter, et Jean-Paul Baumier le fait avec virtuosité.

Le titre l’énonce: Je voudrais tant croire que tout finira bien; il ne reste plus qu’à ajouter un «mais» pour confirmer que ça ira mal! À croire que c’est un recueil de nouvelles très sombres qu’offre Jean-Paul Beaumier.

Parlons plutôt de douce cruauté. La vie ne fait pas toujours de cadeaux, ce que Beaumier expose dans toutes sortes de situations. Mais il le fait de façon telle qu’on glisse avec plaisir d’un récit à l’autre – 18 au total.

C’est que la cruauté du quotidien a bien des registres. Elle peut même être moqueuse comme dans la nouvelle Des bulles!.

La pandémie

La scène se passe en plein confinement dû à la pandémie de COVID-19. Amélie, jeune professionnelle, participe à la rencontre virtuelle hebdomadaire fixée par son patron, qui tient «à garder le moral des troupes au beau fixe». Elle révèle plutôt une harmonie factice, bien épinglée par une Amélie elle-même pas trop à son affaire.

La pandémie sert d’ailleurs de cadre à d’autres nouvelles. On la retrouve notamment sous le titre Enfin, un vaccin où un couple de 70 ans tout juste se retrouve au centre de vaccination. Le narrateur est allumé, alors ses observations sur le «profilage» des personnes âgées font mouche. Mais la séance de vaccination ne tourne pas comme prévu... La cruauté qui fait peur est à l’œuvre ici!

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Elle se fait toutefois amère dans la nouvelle Un mot à l’endos, où un homme espère un rapprochement avec son frère aîné, maintenant que leur mère est décédée. Justement, son frère lui a écrit: les souvenirs reviennent alors qu’il s’apprête à décacheter l’enveloppe...

Ailleurs, la cruauté fait rire quand un homme décrit la manière dont il s’est retrouvé dans un étroit cul-de-sac d’une ville sicilienne. À l’inverse, celle de la mort bouleverse quand la maladie l’emporte sur l’espoir.

L’amour, bien sûr, offre aussi son lot d’épreuves, comme le montrent plusieurs textes. Ainsi, dans Boules chinoises, c’est le processus même de séparation qui est décrit, recelant une subtile cruauté qui se dévoile en finale.

Elle est par contre bêtement manifeste dans la nouvelle L’occasion rêvée où, pour cause de pandémie, des itinérants sont logés au chic Château Frontenac!

Et l’on constate au final que le touchant premier texte du recueil annonçait bellement la suite. Il a pour titre 1754, rue Notre-Dame et raconte la visite d’une dame âgée dans la maison où elle a autrefois élevé sa famille. Ce sera cruellement décevant. Son fils, qui l’accompagne, conclut simplement: «J’ai glissé mon bras sous le sien et nous nous sommes éloignés.»

Pas de larmes, pas d’esclandre, juste un petit quelque chose de changé qui accroche le cœur. C’est bien pourquoi on embarque autant.

Jean-Paul Baumier
Jean-Paul Baumier Photo fournie par Leméac, Daniel Tremblay

Je voudrais tant croire que tout finira bienà
Jean-Paul Beaumier
Leméac
136 pages
2025

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