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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

«Ta promesse»: le 13e roman de Camille Laurens explore l’emprise et la manipulation en amour

Photo fournie par Gallimard, Francesca Mantovani
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Photo portrait de Karine Vilder

Karine Vilder

2025-02-09T12:00:00Z
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Ta promesse, le 13e roman de l’écrivaine française Camille Laurens, se lit comme un thriller psychologique. Et on a littéralement adoré.

Entre les cinquantenaires Claire Lancel et Gilles Fabian, le coup de foudre a tout de suite été au rendez-vous. Sans doute parce qu’ils avaient plusieurs points en commun, dont un métier aussi prenant qu’exigeant – elle est une écrivaine de renom, il est metteur en scène spécialiste des marionnettes –, des amours passées difficiles, une certaine joie de vivre et surtout, l’envie d’être bien à deux. Quand elle a débuté – dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier 2014 –, leur histoire d’amour aurait donc presque pu inspirer un nouveau conte de fées.

Seulement voilà. Dès les premiers chapitres de Ta promesse, on sait que Claire se trouve présentement entre les mains de la justice. Il s’est produit quelque chose de moche entre Gilles et elle. De très moche. Quoi? On ne le dira pas. Mais comme Claire doit se justifier et tout expliquer à l’avocat qui la représente, on sera assez vite aux premières loges pour comprendre peu à peu à quel genre d’homme elle a eu la malchance de se frotter...

«Je voulais montrer qu’il n’y a pas que la violence physique qui peut détruire quelqu’un, précise Camille Laurens depuis son appartement parisien du 20e arrondissement. Humilier par petites touches, dire ça et son contraire finit par miner. C’est insidieux et très violent. J’ai pu observer ce phénomène d’emprise à la fois dans ma vie et dans celle des autres, et j’ai l’impression que c’est très contemporain, cette diminution de l’empathie, de manque de respect des valeurs et des différences d’autrui. J’ai eu envie de questionner cette illusion amoureuse, de me pencher sur la façon dont on peut être séduite par une image qui est fausse.»

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Pernicieux desseins

Au début de leur relation, Gilles était carrément le compagnon dont rêvent toutes les femmes: intelligent, séduisant, tendre, prévenant, drôle et merveilleux sous la couette. Pour faire court, Claire en était folle. Et lorsqu’il lui demandera de ne jamais écrire sur lui, elle le lui promettra sans trop se poser de questions. Après tout, on n’écrit pas sur le bonheur.

Sauf qu’avec le temps, Gilles commencera à se montrer sous un autre jour. Lui, jusqu’alors si doux, se mettra à avoir de soudains excès de colère. Il y aura aussi les remarques blessantes de plus en plus fréquentes et les critiques mesquines. Sans oublier les accusations infondées et les mensonges en tous genres. De prince charmant, Gilles deviendra crapaud.

«Quand la relation commence à se déliter, on se dit que ce n’est qu’un petit passage à vide, que la situation va bientôt revenir comme avant, souligne Camille Laurens. C’est une forme de consommation de dire “je m’en vais!” dès que quelque chose ne nous plaît pas chez l’autre. Mais justement parce qu’on ne cherche pas l’homme parfait, on accepte que notre partenaire ne soit pas parfait. Après la séduction et les belles promesses, il est dur d’admettre qu’on s’est trompée sur toute la ligne. De plus, on ne peut pas imaginer que c’est possible que les gens soient aussi malfaisants. On ne s’attend pas à ce qu’on nous fasse du mal. Et lorsque ça arrive, on est sidérée, on ne réagit pas. On continue à croire que ça va passer. Mais ça ne passe pas.»

Captifs

Malgré tous les signaux, Claire choisira ainsi de rester. Pour le pire seulement, car il est rare – voire inimaginable – qu’un pervers narcissique finisse par faire amende honorable.

Cela dit, toute cette histoire est fictive. Une précision qui s’impose lorsqu’on sait que Camille Laurens a souvent eu recours à l’autofiction par le passé. «Là, je voulais que ce soit construit comme un thriller et que les révélations se fassent petit à petit, explique Camille Laurens. Je voulais distiller les infos et cheminer vers la vérité de cette histoire progressivement pour donner aux gens l’envie de tourner les pages. J’ai beaucoup douté et quand j’ai fini le livre, je ne savais pas si ça fonctionnait. Mais les premiers lecteurs m’ont dit que oui, qu’ils n’ont pas pu lâcher le roman.»

Pareil pour nous.

Photo fournie par les Éditions Gallimard
Photo fournie par les Éditions Gallimard

Ta promesse
Camille Laurens, Éditions Gallimard, 368 pages
En librairie dès le 12 février

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