Quoi faire quand nos aînés sont perturbés


Dr François Richer
L’Alzheimer et les autres maladies cérébrales peuvent causer des changements de sensibilité émotionnelle, de comportement ou de personnalité qui s’avèrent perturbants. Mais les proches peuvent faire une grande différence en adaptant leurs interventions et en prenant soin d’eux-mêmes.
Un conjoint agité et confus. Un parent irritable qui refuse toute aide. Une grand-mère qui se déshabille en public ou qui croit que ses voisins lui veulent du mal.
Les maladies cérébrales comme l’Alzheimer ou les troubles apparentés sont surtout connues pour les difficultés cognitives qu’elles causent. Leurs profils sont variables, mais plusieurs commencent soit par des troubles d’attention et de mémoire à court terme (on parlait de quoi déjà?) ou par des oublis rapides des événements récents (on s’est parlé hier?). Ces difficultés affec-tent notre capacité de fonctionner au quotidien (notre autonomie), mais pas nécessairement qui nous sommes.
Or, en plus des difficultés cognitives, les troubles neurocognitifs causent souvent des perturbations importantes des émotions et des comportements sociaux, ce qui cause un stress élevé pour la personne touchée et pour ses proches.
Les troubles neurocognitifs réduisent souvent notre résistance au stress, notre contrôle émotionnel et nos filtres sociaux.
Certaines personnes montrent des réactions inattendues comme refuser de collaborer, devenir anxieux ou agité, montrer des changements d’humeur soudains ou des colères.
D’autres montrent des changements d’intérêts ou de personnalité, comme une personne discrète qui devient effrontée ou une personne active qui devient apathique.
Parfois même, les personnes développent des croyances bizarres (elles deviennent méfiantes) ou des comportements inappropriés (insultes, manque de respect, transgression de normes).
Des interactions délicates
Les perturbations psychologiques des personnes atteintes de troubles neurocognitifs ont souvent des impacts majeurs sur leur vie et sur celle de leur entourage. En plus d’affecter leur bien-être et leur vie sociale, ces perturbations peuvent entraîner une détérioration des soins qu’elles reçoivent et de leur santé générale.
Les perturbations psychologiques rendent souvent les communications et les interactions plus difficiles avec l’entourage. Les mots et les gestes de la personne peuvent être raides ou provocants.
Les proches sont souvent surpris ou même bouleversés par les réactions inattendues de la personne atteinte: ils doivent adapter leurs attentes, leurs habitudes et leur relation avec la personne touchée.
Parfois, les proches ne savent pas trop comment aborder la personne, quelle attitude et quels mots employer pour réussir leurs interactions.
Les personnes troublées ont besoin d’une approche calme, attentionnée et respectueuse. Elles réagissent souvent positivement à ceux qui montrent un intérêt authentique et marqué pour elles et à ceux qui réagissent avec patience, doigté et légèreté à leurs écarts de conduite (c’est pas grave, ça nous arrive à tous).
Chercher les sources
Les perturbations psychologiques peuvent apparaître pour une foule de raisons et être influencées par plusieurs facteurs à la fois.
Elles peuvent bien sûr être affectées par l’évolution de la maladie quand elle perturbe les circuits cérébraux de l’humeur ou du contrôle émotionnel. Elles peuvent aussi émaner de besoins non comblés (avoir faim ou froid, manquer de sommeil ou d’attention) ou encore d’une souffrance peu visible (douleurs, digestion, deuil).
Les problèmes de santé physique (infections, diabète, etc.) et la médication peuvent aussi les faire apparaître ou les amplifier. L’environnement (bruit, stress, ambiance) et les changements d’habitudes peuvent faire basculer des personnes fragiles.
Les facteurs qui déclenchent ou favorisent les perturbations psychologiques sont souvent difficiles à identifier, surtout quand les difficultés cognitives et de communication nous empêchent de capter des indices importants.
Mais, l’entourage de la personne peut souvent faire une différence.
Notre empathie, notre bienveillance et notre volonté d’aider nous permettent de développer nos habiletés pour mieux comprendre ce qui se passe, améliorer les facteurs sur lesquels nous pouvons intervenir et servir d’intermédiaires entre la personne et les autres sources d’aide.
Le rôle de proche aidant peut être une source d’accomplissement et d’enrichissement, mais c’est souvent aussi une source de stress élevé. Il faut donc prendre soin de soi, surveiller nos signes d’épuisement et trouver du soutien.