Halloween 2025: Le triomphe des films d’horreur au box-office

Isabelle Hontebeyrie
Depuis le début de l’année, les grands gagnants du box-office ne sont ni Pedro Pascal, ni même Florence Pugh. La première moitié de 2025 a été dominée par les Ryan Coogler, Danny Boyle et Alex Garland, dont les films d’horreur ont séduit les amateurs. Explications.
L'année 2025 a été marquée par une série de succès horrifiques aux recettes exceptionnelles. Ainsi Pêcheurs, version française de Sinners, réalisé par Ryan Coogler (révélé par ses Black Panther et Creed), le 18 avril, a généré 364,5M$ de recettes mondiales avec un budget de production estimé à seulement 25M$, soit un retour sur l’investissement de plus de... 1400%! Porté par le talent de Michael B. Jordan, l’acteur a retrouvé son réalisateur de prédilection pour cet ambitieux projet, plébiscité par les cinéphiles.

Du côté de l’excellent 28 ans plus tard (28 Years Later en V.O.), le film a marqué les retrouvailles du réalisateur Danny Boyle et du scénariste Alex Garland, le duo derrière le film original 28 jours plus tard, arrivé dans les salles en 2002 et devenu le phénomène culturel qu’on connaît. Sorti le 20 juin et produit pour 50M$, il a engrangé 151,2M$ au box-office mondial, en partie grâce à son casting impressionnant, notamment Jodie Comer (Le dernier duel) et Aaron Taylor-Johnson (aussi à l’affiche cette année du flop Kraven le chasseur).
Le succès de Destination ultime: liens de sang (Final Destination: Bloodlines en V.O.) a prouvé l'attrait intact de la franchise, en devenant l'épisode le plus lucratif – et de loin – de la série de long métrage. Sorti le 16 mai, avec un budget d'environ 40M$ et 283,2M$ de recettes mondiales, il a pulvérisé les scores des films précédents, les cinq premiers opus ayant rapporté respectivement 112,9M$, 90,9M$, 187,3M$, 157,8M$ et 313,03M$. Cette nouvelle version, une relance (reboot) avec de nouveaux visages comme Brec Bassinger et Teo Briones, a permis à l'ensemble de la franchise de flirter avec le cap impressionnant du milliard de dollars de recettes cumulées au box-office mondial (la franchise a récolté 981,01M$ jusqu’à présent). Et Final Destination est ainsi devenue la troisième franchise d’horreur la plus lucrative, derrière It et La conjuration!

La rentrée n'a pas ralenti le genre. Sorti le 5 septembre, La conjuration: derniers rites (The Conjuring: Last Rites en V.O.) est venu clôturer l'une des sagas les plus populaires de l'horreur. Avec le retour de l'équipe principale, incluant le réalisateur Michael Chaves et les acteurs Vera Farmiga et Patrick Wilson, le film a su attirer les fans de longue date. Produit pour un budget de 40M$ et des frais de promotion de 60M$, ce neuvième opus a déjà cumulé 400M$ au box-office mondial, confirmant le statut de cet univers en tant que franchise horrifique au succès intarissable.

Les ratés...
Toutefois, cette vague de succès a connu quelques bémols. Alors que les films d’horreur bénéficient d’une rentabilité exceptionnelle, certaines suites ont obtenu des scores plus modestes, voire décevants. C'est le cas de M3GAN 2.0, sorti le 27 juin, mettant en vedette Allison Williams. Réalisé par Gerard Johnstone, le film a confirmé l'implication de l'actrice dans des projets d'horreur ambitieux après sa participation à Get out de Jordan Peel en 2017. Mais malgré une campagne marketing estimée à 30M$, M3GAN 2.0 n’a engrangé que 39,1M$ au box-office mondial, des recettes décevantes pour les studios qui misaient sur le ton décalé de cette suite, ainsi que du spectacle au détriment du suspense. Cette performance en demi-teinte a trouvé écho dans le reboot de la franchise culte des années 1990, Le pacte du silence (I Know What You Did Last Summer en V.O.) Sorti le 18 juillet, le film de slasher a généré un fort modeste 64,7M$ au box-office mondial. Avec son budget de 20M$ et son budget promotionnel de 25M$, cette suite a certes été rentable, mais illustre les limites de la nostalgie. Car, contrairement à Final Destination, Le pacte du silence n'a pas réussi à séduire une nouvelle génération, soulignant ainsi la difficulté qu’il y a à relancer des franchises considérées comme des classiques du genre.

Le succès de l'horreur ne se limite pas à sa rentabilité. Le genre répond à une envie profonde des cinéphiles, celle de vivre une expérience collective et viscérale. L’horreur «reste le genre qui a le meilleur rapport coût-efficacité à Hollywood», selon Scott Mendelson, l'analyste de la publication financière Forbes, qui ajoute qu'«on ne paie pas seulement pour le film, on paie pour crier avec un public». Loin de l'uniformité des franchises de superhéros, l'horreur offre une bouffée d'air frais, misant sur l'originalité et la surprise narrative. Comme l'a expliqué le réalisateur Jordan Peele dans les pages du Hollywood Reporter, «le cinéma d'horreur est le meilleur genre pour parler de la vérité. Vous pouvez glisser n'importe quelle idée dans un film d'horreur et les gens seront prêts à l'accepter s'ils sont terrifiés». De surcroît, les films d'horreur contemporains dépassent le simple effet de choc pour aborder des thèmes sociaux et psychologiques profonds. Danny Boyle détaille ainsi dans les pages de Total Film que «l'horreur fonctionne quand elle est basée sur une peur tangible (et nous permet) d'explorer des peurs que nous n'arrivons pas à nommer dans la vie réelle.»
Les super héros fatigués... et fatigants
Ce succès contraste fortement avec les recettes décevantes de certains blockbusters de superhéros, qui coûtent bien plus cher à produire que des films d’horreur en raison des effets spéciaux. Ainsi, le Thunderbolts* des studios Marvel, avec son budget estimé à plus de 180M$ et une campagne promotionnelle du même prix, a peiné à atteindre les 380M$ de recettes mondiales malgré la présence d'acteurs comme Florence Pugh (Black Widow) et Sebastian Stan (Capitaine America). De même, Kraven le chasseur, produit pour environ 110M$ et porté par Aaron Taylor-Johnson, n'a généré que 62M$, un échec plus que retentissant.

Cette tendance s'est poursuivie avec le pourtant très attendu Les Quatre fantastiques: premiers pas (The Fantastic Four: First Steps en V.O.), sorti le 25 juillet. Avec un budget de production colossal de 250M$ et un budget de promotion de 180M$, le film de Marvel, réalisé par Matt Shakman (connu pour la série WandaVision), n'a généré qu'un décevant 535M$ au box-office mondial. L'échec est d'autant plus marqué (et marquant) que le film est porté par une distribution au poids considérable et qui aurait dû assurer le succès du long métrage, notamment avec Pedro Pascal (The Last of Us), Vanessa Kirby (Mission: Impossible) et Julia Garner (révélée par la série Ozark). Malgré un accueil critique relativement positif, le film n'a pas réussi à dépasser les attentes des studios et a confirmé la «fatigue» des cinéphiles face aux superhéros.

Les amateurs de films de peur continueront-ils à plébisciter ce genre, autrefois considéré comme mineur? Nous aurons la réponse dans les prochaines semaines avec la sortie, le 17 octobre, de Black Phone 2 (de Scott Derrickson avec Ethan Hawke, habitué du genre horrifique depuis l’excellent premier La purge).