12 gestes alimentaires très simples à poser pour manger dans « les limites d'une seule planète »
Nadine Descheneaux
Impossible de fermer les yeux et de prétendre que tout va pour le mieux. Notre consommation excède la capacité de la planète à fournir les ressources nécessaires pour la soutenir. Il est donc important – nécessaire ! – de faire des choix qui ont un réel impact sur notre empreinte écologique. Et côté alimentation, fait-on les bons ? Peut-être pas. Un dossier pour mieux comprendre et, surtout, mieux agir. Parce qu’une planète, on n’en a qu’une.
D’abord, il faut rappeler que la Terre a une quantité finie de forêts, de terres cultivables, de gisements, etc. « Le problème, c’est qu’on consomme plus vite que les ressources se renouvellent », indique Camille Dauphinais-Pelletier, coautrice du livre Vivre avec une seule planète. En effet, si tout le monde consommait comme un Canadien moyen, il serait nécessaire d’utiliser 3,7 planètes. Le chiffre étonne. Fait peur un peu. Puis, on oublie, on dirait. La même chose se produit quand les médias annoncent le jour du dépassement de la Terre qui correspond à la date annuelle où on commence à vivre à crédit avec notre planète. À cette date, l’humanité aurait consommé la totalité des ressources que la Terre est capable de renouveler annuellement. En 2023, c’était le 2 août (et le 28 juillet en 2022).
Des impacts qui nous touchent de plus en plus
On prévoit que ce sera encore au début août que l’humanité atteindra ce triste record cette année. Mais cette pénurie de ressources, on ne la remarque pas vraiment au quotidien, ce qui contribue à préserver l’impression que ça n’existe pas vraiment. Il y a comme un détachement jusqu’à ce que les impacts nous touchent directement. C’est ce qui est arrivé l’an dernier avec la fumée des feux de forêt qui a envahi plusieurs régions. Auparavant, il y en avait des feux, mais tant que c’est loin, c’est moins frappant, malgré les images et la réelle importance. « Même chose avec les inondations à Baie-Saint-Paul. On a senti que la population était plus sensibilisée tout à coup ! », note l’autrice.
Du côté de l’alimentation, c’est souvent par l’augmentation des prix que la population réalise les impacts des changements climatiques – tant les sécheresses que les inondations – qui influencent les récoltes. « La cause à effet est plus claire, donc on comprend plus l’impact ! » précise Camille Dauphinais-Pelletier. Donc, quand ça nous touche directement, que ça met notre santé ou notre sécurité en jeu ou si notre portefeuille en ressent les contrecoups, alors là, notre réveil écologique est plus brutal. Tant mieux si c’est le premier moteur, mais il y a plusieurs gestes que l’on peut facilement poser pour donner du répit à notre planète.

Qu’est-ce que notre empreinte écologique ?
Contrairement à notre empreinte carbone qui calcule les émissions de gaz carbonique générées par notre mode de consommation, l’empreinte écologique est une mesure plus vaste qui additionne les différents impacts écologiques de notre mode de vie. « On calcule toutes les ressources naturelles dont on a besoin pour soutenir notre consommation, autant la forêt pour le bois de notre maison, les terres pour les cultures, les océans pour les poissons, les mines, etc. », explique l’autrice. On obtient ensuite une « empreinte », en hectares globaux, c’est-à-dire qui rassemble toutes les ressources naturelles, donc une « superficie » écologique. L’empreinte écologique du Canada est de 296 millions d’hectares globaux. Devant d’autres pays, on semble faire bonne figure. Toutefois, quand on calcule à l’échelle individuelle, le classement se modifie.
On réalise bien vite que notre consommation est insoutenable pour la planète. Mais nos petits gestes ont-ils vraiment une importance ? Pour Camille Dauphinais-Pelletier, c’est une interrogation valide. « Tous les niveaux d’actions sont importants tant individuels que gouvernementaux et chez les entreprises », dit-elle. L’explication tient à une chaîne d’actions, finalement. Si on ne change rien dans nos habitudes, on n’encourage pas le gouvernement, par exemple, à adopter des politiques qui soutiennent nos actions. Et on ne demande pas aux entreprises de nous offrir des produits plus adaptés à nos valeurs. « Évidemment, il faut que tout le monde agisse et que tous les paliers se mettent en marche », souligne-t-elle. Elle croit que nos gestes individuels qui se reflètent dans le choix de certains produits à l’épicerie ou au restaurant vont encourager les entreprises à modifier leurs offres. Ce n’est pas étranger au fait qu’il y a désormais de plus en plus d’offres de produits végés, même dans les grandes chaînes de restauration rapide. Quand ces dirigeants entendent la masse critique exiger des changements, ils se mettent à développer de nouveaux produits et à modifier eux aussi leurs actions.
12 gestes pour mangez « avec une seule planète »
Si on vivait avec une seule planète, du côté alimentation, il faudrait que nos calories proviennent à 93 % de sources végétales et 7 % d’origine animale (œuf, viande, poisson, produits laitiers)... ce qui équivaut à 33 lb de viande par année, donc une réduction de 50 % à l’échelle mondiale de ce qu’on consomme présentement. On devrait aussi consommer moitié moins d’aliments transformés.
Comme environ 25 % de notre empreinte tient à notre alimentation, on sait que modifier nos habitudes est important. Pour une alimentation plus écolo, quatre principes sont applicables. Mais attention : certains gestes ont plus d’impact que d’autres. Cela nous aide à faire de meilleurs choix quand vient le temps de choisir entre deux produits. Un avocat du Mexique a un moindre impact environnemental qu’un steak du Québec. Un concombre emballé du Québec est préférable au même légume provenant du Mexique, sans emballage.
Réduire le gaspillage alimentaire
« C’est le choix où tout le monde est gagnant ! Gros impact et grosses économies pour nous », lance Camille Dauphinais-Pelletier en précisant qu’un ménage canadien jette l’équivalent de 1300 $ de nourriture chaque année. « Souvent, on dit : ah, je le mets dans le compost, ce n’est pas grave ! Mais on oublie que des ressources ont été utilisées tout au long du cycle de vie du produit. Pour faire du fromage, on a déboisé une terre, fait l’élevage de vaches, fabriqué le lait, fait le fromage, etc. Le problème, c’est qu’on ne voit que la finale. Mais il ne faut pas oublier qu’il y a un impact à chaque niveau de production », précise-t-elle.
1. Planifier ses repas.
On évalue ce qu’on a et on achète que ce dont on a besoin. C’est la base ! Et on se rappelle qu’on jette de l’argent à la poubelle : cela aide à freiner les envies de faire des provisions déraisonnables.
2. Remettre en question notre gaspillage.
En trouvant ce qu’on gaspille le plus souvent, on peut trouver des solutions. Le sac de patates est trop gros ? On en achète moins ou on partage un sac avec une autre famille.
3. Congeler !
Les petits restants (le lait de coco, la pâte de tomates, le fond de pesto, etc.) et aussi les plats cuisinés pour en faire des lunchs.
Manger plus de produits d’origine végétale (et moins d’origine animale)
L’élevage « mange » beaucoup de ressources et quelques données peuvent nous aider à faire des choix plus éclairés.
4. Enlever les produits d’origine animale pour le déjeuner et les lunchs.
C’est plus facile à réaliser.
5. Faire des compromis pour s’adapter.
On commence par une sauce à spaghetti moitié tofu, moitié bœuf.
6. S’abonner à des réseaux sociaux qui donnent des recettes végés faciles.
On pourra se créer un livre de recettes avec nos préférées !
Sélectionner des produits locaux
« Manger près » est important, mais pas toujours. Quand ils sont produits en serre, beaucoup de ressources sont nécessaires, mais on contribue à maintenir l’économie d’ici. Le scénario idéal reste de consommer les produits locaux de saison. Comme ils ont poussé de façon naturelle et ont voyagé moins longtemps entre le champ et notre assiette, leur impact est moins grand et ils sont plus savoureux et débordants de nutriments.
7. S’abonner à un panier fermier.
8. Acheter directement aux producteurs ou dans les marchés publics.
9. Faire des provisions... mais juste si on sait qu’on ne les gaspillera pas !
Réduire les emballages
L’emballage représente environ 5,5 % de l’impact environnemental lié à l’alimentation. On a pourtant l’impression que c’est un enjeu majeur encore une fois parce qu’on voit le produit à la fin de son cycle ! Ça ne veut pas dire que ce n’est pas grave, mais ce n’est pas le premier critère à mettre de l’avant. Devenir « zéro déchet » est somme toute une aventure complexe pour une faible répercussion environnementale. Reste que des gestes peuvent être faits quand même.