Visite du maire Marchand à Lyon: sans tramway ou transport structurant, «c’est la fin»
Pour demeurer attractive, une ville doit offrir des options de mobilité, a dit le président de la métropole de Lyon au maire de Québec

Stéphanie Martin
LYON | Le président de la métropole de Lyon estime que pour une ville, choisir de ne pas bâtir de réseau structurant de transport collectif, «c’est la fin. [...] C’est le modèle du siècle dernier» et Bruno Marchand est d’accord avec lui.
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Bruno Bernard a ainsi répondu au maire de Québec, qui lui demandait quelle serait la conséquence pour une ville qui renoncerait à implanter un réseau de transport collectif structurant, comme un tramway.

«Si la ville continue à grossir, c’est la fin», a répliqué l’élu lyonnais.
«Parce que toutes les voitures seront embouteillées. C’est le modèle du siècle dernier où on ne fait qu’augmenter les voiries automobiles pour arriver toujours à plus de bouchons, plus de pollution et un impact carbone mauvais. C’est ce qu’on a fait pendant 50 ans.»
«En Europe, dit-il, tout le monde fait la même chose: enlever la voiture et redonner l’espace public au transport en commun, au tramway, aux vélos et aux piétons.»
Sinon, une ville «perd en attractivité et en qualité de vie. Et les entreprises ont de la difficulté à recruter».

«Québec est en retard»
«Je le pense aussi», renchérit Bruno Marchand, qui, en entrevue au Journal, dit craindre que Québec décroisse et «s’embourbe».
«Québec est en retard» sur les transports collectifs, affirme-t-il, et le premier ministre François Legault devrait s’en remettre aux maires et aux volontés des villes qui savent mieux ce qui est bon pour leur développement.
À Lyon, la pertinence du tramway n’est plus à prouver.
Après des débuts «difficiles» durant les deux premières phases, au tournant des années 2000, les Lyonnais se sont approprié ce mode de transport, témoignent les responsables de la métropole et de Sytral Mobilités, la société de transport qui est chargée du prolongement de 5,4 km de la ligne T6.
Ce prolongement vient boucler le «périphérique» de tramway autour de la ville, qui permet de rabattre les usagers sur le mode plus lourd du métro.
C’est justement ce chantier que le maire de Québec a visité lundi matin.
Avec 1,4 million d’habitants dans sa région, Lyon a des lignes de métro, de bus rapides et de tramway. Elle aura en 2026, sur son territoire, 100 km de tramway.

Un tramway pour apaiser
M. Bernard vante les mérites de ce mode de transport.
«On a besoin de transport en commun partout dans nos villes pour donner des alternatives à la voiture, pour l’impact carbone, pour le pouvoir d’achat des habitants – le transport en commun coûte moins cher que les véhicules. Ça améliore aussi la qualité urbaine de nos villes. Aménager un tram, c’est aussi apaiser, végétaliser.»
Même constat du côté d’Arnaud Riou, ingénieur responsable du projet.
Il souligne qu’une nouvelle ligne de tramway est «très utilisée, très vite. On arrive aux chiffres qu’on avait anticipés à peine 10 ans après la mise en service».
Ce qui aide, selon lui, à l’acceptabilité sociale, c’est le fait que l’avènement du tramway implique des réfections de façade à façade.
«On rénove leur quartier. Ça fait grimper la valeur de l’immobilier facilement de 20 à 30%. Ça attire du monde en ville.»
Les craintes des citoyens
Le prolongement du tramway de Lyon a suscité des inquiétudes chez des citoyens qui craignaient qu’il nuise à leur milieu.
Dans une rue de Villeurbanne, on voit encore plusieurs affiches anti-tramway posées sur les clôtures.

Mais la métropole a travaillé en consultation et a modifié le projet pour rendre la plateforme plus étroite sur les 300 mètres problématiques, explique la responsable de l’urbanisme, Béatrice Véssiller.
«C’est le fruit d’une consultation citoyenne.»
Arnaud Riou souligne que chaque projet de tramway doit obligatoirement faire de la place aux piétons et aux vélos, ce qui représente «un enjeu» en milieu urbain dense.
C’est pourquoi une nouvelle ligne reçoit souvent un accueil «mitigé».
Mais, selon Bruno Bernard, «aujourd’hui, c’est assez simple. La population comprend l’intérêt du tramway».
Un financement important des entreprises
Les entreprises de la métropole participent fortement au financement du tramway de Lyon.
Toutes les firmes de plus de 11 employés contribuent pour l’équivalent de 2% du salaire de leurs employés.
Cela représente 450 millions d’euros par an pour la société qui opère le tramway, Sytral Mobilités.

De plus, tous les employeurs paient 50% de l’abonnement au transport en commun de leurs employés.
Pour le maire Marchand, ces solutions mériteraient d’être explorées au Québec, où il y a un manque criant de financement du transport collectif.
La mobilité pour attirer des entreprises lyonnaises à Québec
En marge de sa visite du chantier du tramway, le maire a participé à la signature d’une entente entre Québec International et Auvergne-Rhône-Alpes, la plus importante région industrielle de France.
Elle vise à faciliter les percées des entreprises de Québec dans cette région, et vice versa.
Dans ses arguments, Bruno Marchand a martelé l’importance de développer la mobilité à Québec.

«Ça nous prend des options de mobilité durable. Si vous êtes venus à Québec, vous savez qu’on est loin de Lyon en matière de mobilité durable. On doit offrir des façons de se déplacer pour que les entreprises aient des bilans environnementaux positifs.»
En après-midi, il a d’ailleurs rencontré des entreprises lyonnaises qui souhaiteraient faire des affaires à Québec.
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