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Culture

Mario Saint-Amand en deuil de son père

Il a perdu son père avant la cérémonie des Gémeaux

Eric Myre / TVA Publications
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Daniel Daignault

2025-09-26T10:00:00Z
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Une entrevue avec Mario Saint-Amand, c’est toujours un déluge d’émotions, de rires aussi, de confidences inédites et de moments désarmants. Comme lorsqu’il nous a raconté qu’il a perdu son père, décédé quelques heures avant le gala des Gémeaux, auquel l’acteur assistait puisqu’il était en nomination pour son interprétation de Jean-Claude Marquis dans Indéfendable.

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Alors qu’il s’est réjoui en juin dernier d’être en nomination pour un prix Gémeaux pour son rôle dans Indéfendable, Mario Saint-Amand vivait des moments difficiles en raison de la santé déclinante de son père. Il était d’ailleurs à son chevet le 11 septembre, peu avant le gala. Il a accepté de partager ses états d’âme.

«Je savais que papa était sur ses derniers milles, parce que je l’ai vu avant de m’en venir à Montréal. Il commençait à faire de la démence depuis quelques années, et il avait un cancer des intestins. À l’hôpital, il ne parlait plus, et je lui ai rappelé ce qu’il m’avait dit une semaine avant: "Là, j’suis tanné..." Quand je l’ai vu les yeux fermés, amaigri de façon incroyable, je lui ai dit: "Papa, tu m’as dit la semaine dernière que tu étais tanné... ben là, laisse-toi aller. T’as le droit d’être libéré, t’as le droit d’être bien, de lâcher prise sur tout ce que tu voudrais encore faire, mais la vie t’invite à mettre fin à tout ça et de passer à autre chose.” Sa femme, Gisèle, m’a regardé et m’a dit qu’il ne m’entendait pas, qu’il n’était plus là, mais moi, je savais qu’il m’entendait», raconte Mario, la voix étranglée par l’émotion. «Je sentais qu’il était là et qu’il avait juste besoin d’une dose de confiance», ajoute-t-il. Le père de Mario est décédé à l’âge de 90 ans.

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Un décès émouvant et difficile à vivre

Mario a ensuite pris la route pour Montréal. «Je quittais en sachant qu’il allait partir seul, et ça me blessait. J’ai eu de la peine, évidemment. Quand sa femme m’a appelé le dimanche pour me dire qu’il était parti, alors que j’étais tout habillé en tenue de gala pour aller à la cérémonie, j’avais de la peine et, en même temps, j’étais content parce qu’il était libéré. J’avais des sentiments partagés lors du gala des Gémeaux. C’est sûr que je me disais que si je gagnais le trophée, c’est à lui que j’allais dédier ce prix-là. Même si papa ne m’a jamais dit ce que j’ai toujours attendu – parce que je suis parti de la maison à l’âge de 16 ans, parce qu’il ne voulait pas que je sois acteur, mais plutôt avocat –, c’est-à-dire qu’il éprouvait de la fierté envers moi.»

«J’ai rencontré Jean-Marie Lapointe au gala et on a parlé durant une heure et demie. Malgré le fait qu’il ne m’a jamais dit qu’il était fier de moi, en discutant avec Jean-Marie, j’ai repensé au fait que papa avait posé des gestes concrets pour faire entendre aux autres qu’il l'était. Dont une fois, lors d’une rencontre familiale à laquelle ne n’assistais pas, où l’un de mes frères ne croyait pas que je pouvais faire l’université, et papa m’avait défendu bec et ongles. Il avait dit qu’il était fier que je sois à l’université pour suivre un cours pour venir en aide aux personnes qui avaient des problématiques de consommation.»

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De plus, depuis le décès de son père, Mario a appris qu’il avait demandé un jour à Benoit Mailloux, qui faisait partie de l’administration du théâtre de Quat’Sous et qu’il connaissait parce qu’ils avaient travaillé ensemble en construction, s’il était possible que son fils puisse rencontrer quelqu’un du théâtre. «J’ai pu avoir accès à Paul Buissonneau (le fondateur de ce théâtre), mais je ne savais pas que c’était grâce à l’intervention de papa que j’avais pu avoir cette opportunité. On était alors en 1989, je venais d’être mis à la porte de l’école de théâtre parce qu’on m’avait dit que je ne serais jamais acteur à cause de ma voix... Danielle Fichaud m’avait pris sous son aile, elle m’a redonné confiance. Et puis, Paul Buissonneau m’appelle un jour pour que je le rencontre durant une heure! Imagine... je n’avais pas su ça de son vivant. J’ai découvert que l’élément déclencheur a été mon père! Et c’est comme ça que Janette Bertrand m’a découvert et qu’elle m’a choisi pour jouer mon premier grand rôle à la télé.»

Une histoire assez incroyable que Mario chérit maintenant que son père, Guy, est décédé. «Il ne m’a jamais dit ça. Il faisait partie de cette génération d’hommes qui ne parlaient pas, qui ne disaient pas les choses. Mais au cours de la dernière année, il m’a confié qu’il avait déjà fait du théâtre et qu’il avait fait partie d’une fanfare. J’ai compris à quel point il y avait un lien encore plus fort que je ne le croyais avec mon père.»

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Eric Myre / TVA Publications
Eric Myre / TVA Publications

Changement de cap

Mario a fait un choix de vie important il y a plus de cinq ans, quand il a décidé de quitter Montréal pour aller étudier à Québec. «Je voulais finir un bac et ne pas avoir de contrat qui aurait compromis mes études. Si j’étais resté à Montréal, c’est ça qui serait arrivé. Ç'a été cinq années intensives pour moi, d’autant plus que je suis tombé à fond dans la pandémie. J’habitais dans un demi-sous-sol, chez des amis, je ne faisais qu’étudier, et j’étais en train de devenir fou!», dit-il en riant. Ses études sont maintenant complétées et il en est bien fier. «J’ai un bac multi, comme on l’appelle. J’ai fait un certificat en études autochtones, un autre en criminologie, et un certificat en dépendance-toxicomanie.»

Ces derniers mois, Mario a tourné dans une série appelée Les Saturnides, et il travaille en ce moment, ou le fera prochainement, sur une série télé dont il ne peut parler. «C’est un personnage différent de ce que j’ai fait auparavant, et tranquillement, mon casting change, dit-il. En ayant été parti durant six ans, je n’étais plus dans le collimateur des auteurs, réalisateurs et producteurs.»

Mario a maintenant déménagé à Montréal, il œuvre toujours à titre d’intervenant, à distance, à travers le Québec, parce qu’il peut faire son travail par téléphone ou visioconférence. «J’ai appris, dans mon travail, à faire la différence entre empathie et sympathie, alors je ne vais jamais dans les souliers de l’autre. Je l’écoute, je suis là pour amener des outils, apporter des solutions, mais je ne suis jamais là pour faire le travail à sa place. Et, dit-il, je sais moi-même le temps que ça m’a pris pour me prendre en main. J’ai commencé à consommer très jeune, et j’ai cessé à l’âge de 39 ans», ajoute-t-il. «Dans les deux situations, que ce soit à titre d’intervenant ou comme acteur, j’ai le sentiment d’être utile. Je me souviens d’une phrase que m’avait dite Janette Bertrand, à l’époque: “Si tu veux faire quelque chose de bien avec ton métier, sois utile.” Cette phrase-là m’a suivi jusqu’en 2018, lorsque j’ai décidé d’étudier pour travailler dans ce domaine.»

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Un nouveau projet

Mis à part ce travail, après avoir complété son cours à L’inis en scénarisation, il a décidé de se mettre à l’écriture. «Janette est ma mentore, et elle est script-éditrice sur un projet très original qu’on est en train d’écrire. On travaille ensemble, et ça, pour moi, c’est très stimulant», ajoute celui qui cumule 35 ans de carrière. Il voue visiblement une grande admiration à Janette qui, avec ses 53 Avec un grand A et ses nombreux livres, dit-il, a apporté énormément de connaissances à la population.

L’affirmation peut sembler banale, mais Mario a vraiment l’impression d’amorcer un nouveau cycle de sa carrière et de sa vie à 57 ans. «Tellement! Qui plus est, j’amorce ce nouveau cycle avec des données que je n’avais pas avant. Je peux utiliser toutes les connaissances acquises à l’université avec un nombre incalculable de travaux que j’ai faits, en plus de mes lectures, de mes expériences comme acteur et de mes études à L'inis, pour créer des univers de films, de séries et de pièces de théâtre. Je suis justement dans la création d'une pièce qui parle des problématiques de santé mentale et de toxicomanie, que je vais pouvoir promener un peu partout dans les écoles.»

Dominic Gouin / TVA Publications
Dominic Gouin / TVA Publications

Une nomination aux Gémeaux gratifiante

«Lorsque je l’ai appris, j’étais aussi excité que lorsque j’ai eu ma première nomination avec Janette Bertrand il y a 30 ans (Avec un grand A). Pour moi, ça souligne un retour qui me permet de me dire que je suis le bienvenu, à 50 ans et des poussières, et ça m’a confirmé que le milieu — puisque ce sont les gens de l’Académie qui votent — est content et aime ce que je fais, dit-il. Quand j’ai joué ce rôle, à voir les réactions des collègues sur le plateau, ça m’a confirmé que j’avais le goût de revenir et de jouer plus souvent.» Il faut savoir qu’avant Indéfendable, on avait vu Mario en 2016-2017, dans District 31. «Quand Izabel Chevrier (l’auteure et productrice d’Indéfendable qu’il connaît depuis de nombreuses années) m’a téléphoné pour m’offrir ce rôle, il y a deux ans, j’arrivais du village de Kawawachikamach, à côté de Schefferville, où j’ai travaillé comme intervenant. C’était un personnage qu’elle me servait sur un plateau d’argent.»

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