Voici pourquoi Mariloup Wolfe veut donner une qualité de vie à ses fils
Michèle Lemieux
Réalisatrice accomplie et demandée, Mariloup Wolfe jongle entre sa carrière et le temps qu’elle consacre à ses fils, Manoé , bientôt 15 ans, et Miro, 13 ans. Consciente du temps qui file à toute vitesse, la femme choisit de chérir chaque instant passé à leurs côtés. Son principal objectif: leur offrir sa présence et une qualité de vie avant qu’ils prennent leur envol.
• À lire aussi: Marilyn Castonguay a déjà rêvé d’un autre métier
• À lire aussi: Sandrine Bisson révèle sa plus grande peur dans son métier
• À lire aussi: 10 ans après «Unité 9», Mariloup Wolfe «ne dit pas non» à renouer avec le jeu
Mariloup, vous avez réalisé la troisième saison de Bête noire. Ce mandat vous a-t-il posé de grands défis?
Oui, car je prenais le relais après deux excellents cinéastes: Sophie Deraspe et Louis Bélanger. Ce sont de grands souliers à chausser. Séries Plus et les producteurs m'ont donné carte blanche, car ils voulaient ma couleur. On ne voulait pas que je refasse ce qui avait été fait, mais il fallait tout de même qu'il y ait une continuité entre les trois saisons. Je pouvais donc prendre des risques et oser. L’action se passe en forêt, dans un camp de vacances, alors que survient une tempête. Nous étions tributaires de la température. Nous avons tourné du mois d’août au mois d'octobre, mais la série se passe en 24 heures... À cela se sont ajoutés des défis techniques, notamment une panne d'électricité.
Après toutes ces années, avez-vous le sentiment d’être bien établie comme réalisatrice?
Oui, de plus en plus. Honnêtement, en réalisation, je me sens à ma place. Bête noire est arrivée après une année où j'avais pris plus de congés et où j’avais pris le temps de me rendre dans plusieurs festivals pour présenter Cœur de slush. J’ai beaucoup voyagé. J’ai continué mes collaborations avec Chevrolet et San Francisco, mais je n'ai pas pris de contrats de création pendant une année, parce que j'avais besoin de prendre du recul. J’avais besoin de prendre du repos et de passer du temps avec mes enfants. Ça ne peut pas durer éternellement. Pendant deux ou trois mois, j’ai ressenti un certain vertige. Je me demandais s’il allait y avoir quelque chose. Et Bête noire est arrivée. Le scénario était un véritable page turner. J’ai tout de suite vu l'univers. Je voulais vraiment qu’on me choisisse pour réaliser ce projet. Lorsque je suis arrivée sur le plateau, ça faisait un an que je n'avais pas tourné. C’était un bon test pour savoir si j’aimais encore ça. La réponse a été évidente: je me sens toujours à ma place.

À quoi ressemble la nouvelle collection de San Francisco?
J’adore les collections printemps-été! Cette année, c'est bleu et blanc. Il y a beaucoup de robes amples, des robes avec des poches, des jupes, des petites camisoles, des chandails, des lainages avec des détails de broderie, des fleurs. C'est très romantique. Je pense que ça va plaire à beaucoup de monde. San Francisco et moi, nous avons une relation de confiance. C'est une marque québécoise qui connaît bien sa clientèle. Je suis vraiment fière de faire partie de cette famille-là et je suis honorée de la confiance qu’elle me porte. Encourageons les entreprises québécoises et allons chez San Francisco!
Vous êtes une créative, mais j’ai le sentiment qu’il y a aussi une entrepreneure en vous...
En effet, le métier de réalisatrice implique la gestion d’un projet et d’une équipe. Il faut avoir des idées, savoir les mener à terme et négocier pour les réaliser. Et il y a de l'argent en jeu. Il faut convaincre tout le monde de marcher dans notre direction. Depuis longtemps, je suis impliquée en affaires. Pendant cinq ans, j’ai été copartenaire d'un Énergie Cardio à Fontainebleau. Je suis copartenaire dans un restaurant à Montréal, le bar à vin et cuisine gourmande Roseline. Le restaurant existe depuis un peu plus de cinq ans, et je suis partenaire depuis deux ans maintenant. C'est tout un défi, la restauration. Je laisse le soin à mes partenaires de le gérer, mais j'aime m'asseoir à table avec eux pour réfléchir à ce qu’il y a à faire et à améliorer. C'est un peu la même chose que la réalisation d’une production ou la construction d’une maison. J’ai aimé construire ma maison sur Le Plateau, diriger le chantier et décider de ce que je voulais.
D'autres projets vous occupent-ils?
Après le beau succès de Cœur de slush, Sarah-Maude Beauchesne travaille sur la suite du film, qui jumellera les deux tomes suivants de sa trilogie. Aussi, je suis en période d’écriture pour un long métrage. Cette fois-ci, je me suis donné le défi d’écrire mon premier jet. Par la suite, j’engagerai quelqu'un pour le peaufiner. Sinon, mon agenda est ouvert. Je ressens encore un certain vertige, un peu comme l'année dernière. Cette année, à deux reprises, on m’a demandé si je voulais jouer. Je ne suis pas fermée à l’idée. C’est merveilleux: je ne sais pas ce qui m'attend. C'est drôle parce que Miro, mon plus jeune, est souvent inquiet quand je lui dis que je ne travaille pas. Il me demande si je vais être capable de payer la maison... (sourire) Je lui explique que même si je ne travaille pas, je travaille quand même. J'ai Chevrolet et San Francisco, ce sont des contrats extraordinaires, mais ça me laisse plusieurs journées de libres. J’ai besoin de créer dans la vie.
Que faites-vous lorsque vous avez du temps devant vous?
Je passe du temps avec mes enfants. L’autre jour, alors que j’aidais Miro à faire ses devoirs, il m’a dit: «C'est super, maman, que tu sois là pour m'aider!» Son début d’année a été plus difficile en raison de son passage au secondaire et de moi qui, au même moment, était occupée au tournage de Bête noire. J'ai une qualité de vie extraordinaire avec mes enfants. Après une période chargée, je retrouve ma vie. Les tournages se font toujours l'été, mais je veux aussi passer du temps avec mes enfants. J'ai besoin de faire des voyages avec eux.
C’est l’un des plus beaux héritages qu'on puisse leur donner!
Je crois que oui. Miro a 13 ans, Manoé va en avoir 15. C’est donc sûrement dans mes derniers étés que je vais passer avec eux, car bientôt, Manoé travaillera durant la période estivale. Cet été, j’aimerais partir deux ou trois semaines en Europe. Mon objectif est de voyager avec mes garçons. J’essaie de tout protéger: le voyage et un contrat, car voyager est un risque. Ce sont des choix déchirants. Quand je ne sais pas ce qui m’attend, je suis toujours comme en attente et je n’arrive pas à profiter pleinement du moment. Actuellement, je me dis que je vivrai ce que j’ai à vivre et que, si quelque chose se place, je m’organiserai... Actuellement, j’ai trop peur de passer à côté des derniers étés avec mes fils.
Surtout que voyager avec nos enfants crée des liens.
Oui, j’ai l'impression d'être tellement proche de mes gars. Je ne regrette aucun choix que j'ai fait ces dernières années ni tous les petits voyages que j'ai faits avec l'un et l'autre. J'ai amené mon plus vieux à Paris, puis à New York. J’ai constaté que les grandes villes, ça l'allume. Je ne m’attendais pas à courir les musées. Je l’ai laissé choisir une activité par jour. Nous n’avons pas visité tout Paris, mais il en a gardé de bons souvenirs. Nous sommes allés au Louvre, aux catacombes, à la tour Eiffel. Son grand rêve, c’est d’aller au Japon. Nous sommes aussi allés à Banff, et il a adoré!
Et Miro?
Il veut tout faire dans la vie. Tout le passionne. Je dois le retenir. Lorsque nous sommes allés à Banff, je lui ai dit que ça serait vraiment agréable qu’il ne revienne pas avec une jambe cassée... C’est un vrai cascadeur. J’essaie, par ailleurs, de lui apprendre à accepter que parfois on essuie des refus dans la vie. Il joue au soccer, mais il ne voulait pas faire les essais de peur de ne pas être choisi. Je lui ai rappelé qu’il n’y va pas pour être choisi, mais pour vivre une expérience. Ça l’amène à se dépasser. Mes deux gars sont bons à l’école. Ils font leurs devoirs sans mon aide. Je les ai vus se motiver eux-mêmes afin de devenir meilleurs. Vraiment, je suis très chanceuse. Mes garçons, c’est ma vie. Quand je ne suis pas en période de tournage, je leur consacre tout mon temps.
C’est important, surtout quand ils sont en garde partagée.
Oui, je les vois 50 % du temps. J’ai quand même la chance de les voir tous les jours, parce que je les ai les dimanches soir, les lundis et les mardis. Leur papa les a les mercredis et les jeudis. Et nous les avons en alternance les week-ends. Je vois mes fils tous les jours, car même les mercredis et jeudis, ils viennent chez moi après l’école et repartent pour le souper. Chez moi, c’est donc leur base. Nous avons un cocon que nous aimons. J’ai toujours souhaité que les amis viennent à la maison, et c’est ce que nous vivons. Miro invite ses amis.
Puisque vos enfants ont grandi, les défis sont-ils différents?
Oui, ils le sont. Le passage au secondaire de Miro a été un peu difficile, car il a dû s’adapter à plusieurs changements: le métro, l’autobus, etc. Quant à Manoé, il est dans sa vie d’adolescent; il aime les jeux vidéos et il a plein d’amis virtuels que je ne connais pas. Il est très secret. Il est en troisième secondaire. Il a été élu président de sa classe, ce qui veut dire qu’il est apprécié de ses pairs, qu’il a du charisme, qu'il a des amis et qu’on lui fait confiance. Ça m’a vraiment rassurée comme maman. J’aime sa désinvolture. Actuellement, il ressemble à Bob Dylan avec sa grosse tête frisée... et il s’en fout!
Alors finalement, vous avez de bons adolescents!
Oui, je touche du bois. Peut-être que ça sera plus difficile éventuellement, mais pour l’instant, ça se passe bien. Nos années post-séparation nous ont vraiment soudés. J’ai investi beaucoup de temps et de cœur dans ma vie familiale. Tout tourne autour de mes enfants. Ma mère était comme ça, et je pense que je suis un peu comme elle.
On ne peut jamais regretter d’avoir investi du temps dans nos enfants.
C’est ce que je ressens et c’est ce que j’ai décidé de faire. C’est sûr que la conciliation travail-famille demeure le nerf de la guerre, mais j’arrive vraiment à atteindre un bon équilibre de vie. Mes fils sont rendus grands et plus autonomes. Quand les deux parents sont séparés et qu’ils n’habitent pas dans la même ville, les enfants doivent s’adapter. Ça leur donne des forces. Dès le début, je n’ai pas été celle qui appelait tout le temps. Je leur laissais leur espace. Oui, ils s’ennuyaient de maman, de papa, mais ils se sont adaptés. Je pense que c’est un cadeau dans la vie.