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Culture

Sandrine Bisson révèle sa plus grande peur dans son métier

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Michèle Lemieux

2025-04-11T11:00:00Z
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Elle fait partie des actrices les plus appréciées de sa génération, et pourtant, Sandrine Bisson aborde chaque rôle comme si c’était le dernier. Lorsqu’elle étudiait le théâtre, elle n’aurait jamais imaginé réussir à se tailler une place dans ce métier. On s’était même permis de lui dire qu’elle ne ferait jamais de télévision! Aujourd’hui, 25 ans plus tard, la comédienne regarde son parcours avec une immense gratitude pour le chemin parcouru.

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Sandrine, se joindre à la troisième saison de Bête noire représente-t-il un défi en soi?

C'est vraiment une grande chance d'être appelée pour jouer dans une série qui existe depuis déjà deux ans. C’est agréable d'arriver dans un univers déjà construit, avec les personnages solides que sont deux de Sophie (Cadieux) et Martin (Dubreuil). On saute à pieds joints dans une famille déjà construite. Je suis arrivée en même temps que Mariloup (Wolfe, la réalisatrice), et c’est elle qui m’a choisie. Déjà, d'être choisie, c'est vraiment agréable... Nous avions déjà eu un rendez-vous manqué, Mariloup et moi, pour un superbe film qu’elle avait réalisé: Arlette. Moi, j'adore Mariloup! J’aime sa vision, sa manière de diriger. Elle est investie et passionnée. Cette femme-là m'inspire.

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C'est drôle: vous décrivez Mariloup, mais il pourrait aussi s'agir de vous...

Oh! C’est gentil! J’étais honorée d'être appelée par Mariloup. C’est un contrat qui est arrivé en surprise, à la dernière minute. Je ne pensais pas refaire de la télé tout de suite parce que je trouvais que j'en avais beaucoup fait. Ça s’est présenté durant un été où des shows avaient été annulés... alors j’ai embarqué. J’ai eu du plaisir à tenir ce rôle.

Parlez-nous de cette policière plutôt froide que vous incarnez...

J’aime avoir cette froideur, ce manque d'empathie. Elle n’a aucune émotion. Elle est appelée en renfort de Montréal pour comprendre ce qui a bien pu se passer. Elle est confrontée à des équipes qui ne sont pas les siennes. Je n’ai pas vu la série encore, car j'ai besoin de toute ma confiance, parce que je joue au théâtre... Quand je me vois, ce n'est pas super. Je n'ai pas une belle vision de moi-même. J'attends toujours avant de voir les affaires que j’ai tournées...

D’autres projets vous occupent?

Oui, je suis au théâtre Denise-Pelletier et je ferai un remplacement dans un gros show. Je continue aussi la tournée de Moi et l'autre. Le travail au théâtre est tellement différent. J’aime beaucoup le travail en amont, ça me ramène à ma base. Je ne veux jamais que ça ne soit que du texte, et je ne veux pas être blasée. À chaque fois, je veux appeler mon père pour lui dire: «Papa, j’ai eu un rôle!» Je veux encore ressentir ce plaisir.

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Votre rêve, au départ, c'était vraiment de faire du théâtre?

À l'origine, je ne pensais pas faire de la télé. On m’avait dit que je n’en ferais pas. Je ne pensais même pas faire du théâtre. Je pensais que j'allais faire quatre ans à l’école et que j’allais me trouver un autre métier par la suite.

Vous le faisiez quasiment pour le plaisir?

Oui. Je l'ai fait pour le plaisir, et ça m’a permis de découvrir mon identité, que je ne connaissais pas. J’ai donc pu me rencontrer à l’École nationale de théâtre.

Vous ne connaissiez personne, vous n’aviez donc rien à perdre?

Exactement. Ç'a été une renaissance, en fait. Comme si je pouvais déployer mes ailes, exister, assumer mon caractère. Je n’étais pas ce qu’on voulait que je sois. Ça faisait longtemps que j’essayais de le dire, mais ça ne passait pas. C’était maintenant possible. Ça m'a permis de devenir une meilleure personne.

Vous avez quand même une personnalité hors norme...

Je ne sais pas... (rires) Moi, je me trouve bien ordinaire. Peut-être que je ne veux pas l'entendre? Je ne sais pas... C’est rare que les gens me parlent de moi quand je suis là. Je ne sais pas ce qu'ils disent de moi, mais tout ce que j’aimerais, c’est qu’on dise que je suis une bonne personne. C'est ce qui est important pour moi.

La télé a donc quasiment été une erreur de parcours?

C’est un diamant que j'ai ramassé dans une ruelle. J'ai eu la chance d'avoir été prise pour jouer des rôles plus explosifs, des seconds rôles. Avec le casting que j'avais, j'avais des propositions plus éclatées, mais ça ne pouvait pas être un premier rôle. Donc, j'en ai profité pleinement pour m'éclater. J'ai eu la chance de travailler dans Le Négociateur puis de faire le film de Ricardo (Trogi). Maintenant, je suis capable de pratiquer tous les canaux, toutes les nuances.

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Depuis combien d’années faites-vous votre métier?

Je pense que ça fait 25 ans. J'ai aussi eu la chance d'avoir des gens sur ma route qui m’ont proposé de faire autre chose. C’est merveilleux!

Vous n’aviez donc jamais osé rêver de la carrière que vous avez aujourd'hui?

Non. Je me pince encore. J'ai toujours peur que ça finisse. Toujours. Chaque fois, je me dis que ça sera la dernière fois.

C'est fatigant, mais à la limite, c'est une énergie qui propulse, qui donne l'envie d'être meilleure...

C'est ça qui est fou: un défi, ça donne de l'énergie, ça oxygène. La peur, la crainte, l'insécurité, ça me garde vivante. Je vais avoir 50 ans, mais j'ai l'impression que je suis beaucoup plus jeune. Je sens que je suis à mon meilleur. Ce métier, c'est vraiment un cadeau. Parfois, je me demande: «Mais qu'est-ce que tu serais devenue, Sandrine?» et tout de suite, je m’efforce de penser à autre chose. J’ai été chanceuse.

Effectivement, Sandrine, que seriez-vous devenue?

J'ai peur de la réponse: «Dépressive»... Sans mon métier, je ne peux pas m'en sortir. Je n’avais pas d’autre intérêt réel.

La vie a été bonne pour vous. Vous êtes sur votre X, comme on dit...

Oui, et j’ai été chanceuse que les autres autour de moi soient là pour m'accueillir. Parce que sans les autres, je n'existe pas. Je ne serai jamais productrice ou réalisatrice. Je n'ai que moi à m'occuper, et c'est bien en masse! (rires)

Vous êtes d'une époque où des profs prenaient la liberté d'éteindre des rêves.

Oui, et c'est un métier qui est quand même cruel. C'est dur de ne pas être choisie, de repartir avec l'orgueil blessé, peu de confiance en soi. Personne ne peut te donner la confiance. C'est à l'intérieur de toi que tu dois la trouver. L’espoir est un moteur.

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Compte tenu de votre parcours, êtes-vous fière de ce que vous avez accompli jusqu'à maintenant?

Oui. Je suis fière d'avoir appartenu à des projets, d'avoir fait partie de belles gangs. Je suis très solitaire. Je suis contente d'avoir eu des amis. Je suis fière d'avoir traversé tout ça, et de l’avoir fait avec toute mon imagination, qui était plutôt une tare lorsque j'étais jeune. Ce n’était pas quelque chose de valorisé chez moi. Pouvoir me servir de ce qui était au départ une faiblesse, je trouve ça extraordinaire. J’avais la volonté de durer, dans des petites affaires, mais de durer.

Sandrine, vous disiez que vous aurez 50 ans cette année...

Oui, mais je pense que ma mère s'est trompée... (sourire). Parfois, je google mon nom: est-ce que je vais vraiment avoir 50 ans? Je n'en reviens juste pas! Parce que, sincèrement, je ne sens pas mon âge. Je pense que je rajeunis.

Avez-vous été une «jeune vieille»?

Oui! J’ai joué des vieilles en sortant de l'école. J'ai toujours eu 42 ans!

Est-ce un choc d’envisager la cinquantaine?

Non, mais je ne retournerais pas en arrière. Parfois, je regarde mes jeunes et beaux amis. Je me demande comment ils vont faire pour vieillir... Moi, je n’ai jamais eu la beauté physique, le charisme naturel, la facilité d'attirer la caméra. Il y a quelque chose qui m’attire dans le fait de vieillir dans le métier. Je pense qu'on va m'offrir d'autres rôles. Ce n’est pas épeurant pour moi. Je veux être la vraie vieille de service. La vieillesse, ce n’est plus 50 ans. Ma grand-mère a 104 ans, alors je me dis qu’il reste encore une couple d’années devant moi... (rires)

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