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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

«L'homme au camion«: voici le triste récit d'hommes qui vivent avec les séquelles de leurs années à l'orphelinat, raconté par la romancière Louise Dupré

Louise Dupré présente un récit sur son père, sur une troublante découverte familiale sur fond de Révolution tranquille dans «L'homme au camion».
Louise Dupré présente un récit sur son père, sur une troublante découverte familiale sur fond de Révolution tranquille dans «L'homme au camion». © Julia Marois / Éditions Héliotrope
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Photo portrait de Marie-France Bornais

Marie-France Bornais

2025-02-15T20:30:00Z
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Poète et romancière primée, autrice d’une vingtaine de livres, Louise Dupré s’est penchée sur l’histoire mystérieuse de son père pour écrire un récit émouvant, L’homme au camion. Et elle le fait plus de dix ans après la publication de L’album multicolore, où elle parlait de sa mère. Véritable enquête familiale sur un homme, une famille et son temps, cet ouvrage est aussi un livre sur la bienveillance, le pardon et la réconciliation. Un livre de mémoire... et de cœur.

Louise Dupré publie «L'Homme au camion» aux Éditions Héliotrope.
Louise Dupré publie «L'Homme au camion» aux Éditions Héliotrope. © Éditions Héliotrope

Dans L’Homme au camion, une femme apprend que ce qu’on a raconté dans la famille sur l’enfance de son propre père n’est pas vrai. On n’a pas dit la vérité sur cet homme qui n’est plus de ce monde.

Ses questions – nombreuses – la conduisent à voir autrement les liens décevants qu’elle avait eus avec son père, à essayer de comprendre davantage. Sa quête la conduit sur le chemin de l’acceptation et de la réconciliation.

Louise Dupré s’est inspirée de sa propre histoire familiale. «On est vraiment dans le récit, confirme-t-elle en entrevue. J’ai essayé de me tenir loin de la fiction, pour essayer de connaître mon père. Ça reste un récit littéraire parce qu’évidemment, c’est toujours ma vision. J’ai essayé de rester fidèle à mes souvenirs, à des paroles qu’il m’a dites, aux paroles de ma mère, aux photos. J’ai fait tout un travail de mémoire.»

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Une découverte étonnante

Louise Dupré avait écrit en 2014 L’album multicolore, un récit sur sa mère. «Je m’étais dit que j’écrirais un jour sur mon père. Ce qui a provoqué la chose, c’est que mon frère m’a dit, un jour, qu’il avait fait des recherches et que ce n’était pas vrai que notre grand-père et notre grand-mère étaient morts en même temps et que les enfants avaient été placés à l’orphelinat. Le grand-père aurait vécu plus longtemps.»

L’écrivaine a eu tout un choc. «Donc, ce qu’on avait toujours entendu, ce n’est pas vrai. Qu’est-ce qui est arrivé? Mes quatre oncles avaient été placés à l’orphelinat, du vivant de leurs parents, ce qui est quand même assez spécial. Mon père y était allé après la mort de sa mère. On a commencé à faire des recherches.»

Trop tard...

Elle a procédé un peu «comme un détective» pour essayer de voir où étaient les garçons. «Qu’est-ce qu’ils faisaient, à quel âge mon père avait retrouvé ses frères? Il était adulte. Comment s’est passée sa vie? J’ai regretté de ne pas lui avoir posé ces questions de son vivant. Là, il est trop tard.»

«On ne sait pas si les garçons se connaissaient quand ils étaient à l’orphelinat. On ne sait pas si mon père a connu ses frères dans cet orphelinat et les a perdus de vue. C’est un oncle de la famille qui a décidé de les retrouver tous les cinq.»

«Mon père est allé demeurer chez l’aîné, qui vendait des boissons gazeuses. D’où le gros camion Jumbo qui est sur la couverture du roman. C’est la première photo qu’on a de mon père, vous rendez-vous compte?»

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Louise Dupré dit que son père était un homme joyeux, aimant, qui aimait rire, qui aimait la vie, qui a toujours été gentil avec les femmes et doux avec ses enfants. «Il était plus pour moi un frère qu’un père, dans le fond. Lui-même était resté un fils, plutôt que devenir un père.»

Portrait de société

En dessinant le portrait de cet homme, Louise Dupré fait aussi celui de toute une génération québécoise, celle de la Révolution tranquille, où un fossé s’est creusé pour beaucoup entre les parents et les enfants.

«Je trouve que c’est important d’avoir une mémoire de ce que la société était, il n’y a pas si longtemps quand même. D’où on vient, dans le fond.»

L’homme au camion

Louise Dupré

Éditions Héliotrope

162 pages

  • Louise Dupré est poète et romancière.
  • Elle a écrit une vingtaine de livres, dont La Memoria, La Voie lactée et Plus haut que les flammes.
  • Ses écrits ont été maintes fois récompensés, notamment par le prix Ringuet et le Prix du Gouverneur général.
  • Elle a publié L’album multicolore en 2014 et Théo à jamais en 2020, finaliste au prix France-Québec l’année suivante.
«Selon les jours et les heures, il me vient mille scénarios à propos de mes grands-parents, et je me fais un roman. J’imagine la déclaration d’amour de Toussaint, sa demande en mariage, l’arrivée de Louisa dans la nouvelle maison le 21 novembre 1898, l’accueil de Jeanne et d’Armand, la naissance de mes oncles, les accouchements difficiles de l’époque, mais aussi les moments de joie, les rires lors des fêtes, tout ce qui fait la trame de la vie concrète, celle des gens modestes dont la principale ambition est de manger tous les jours et de vivre en santé le plus longtemps possible.»
- Louise Dupré, L’homme au camion, Éditions Héliotrope

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