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L'article provient de Le Journal de Montréal
Politique

Ottawa s'attaque au gain en capital: moins payant de vendre votre chalet dès juin

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Julien McEvoy et Gabriel Côté

2024-04-16T20:00:00Z
2024-04-16T20:22:32Z
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Ceux qui ont des centaines de milliers de dollars d’actifs à liquider ont deux mois pour le faire. Dès le 25 juin, le gain en capital sera taxé davantage afin de permettre au gouvernement Trudeau de payer ses nouvelles mesures. 

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«Je suis confiante que cette mesure n’aura pas d’effets négatifs sur le climat d’investissement au pays», a dû se défendre la ministre des Finances, Chrystia Freeland, lors de la présentation de son budget, mardi après-midi.

Confronté à la perspective de perdre sa cote AAA parfaite, le gouvernement Trudeau sort le bazooka. Il souhaite aller chercher 20 milliards sur cinq ans en augmentant le taux d’inclusion des gains en capital supérieurs à 250 000 $.

Le gain en capital, c’est le profit qu’on touche quand on revend quelque chose dont la valeur a augmenté. Plus souvent qu’autrement, il s’agit d’actions d’entreprises cotées en bourse ou d’une résidence secondaire comme un chalet. La vente de la résidence principale, elle, va demeurer exempte d’impôts.

Le gouvernement prévoit qu’environ 40 000 Canadiens – 0,13 % de la population – et 300 000 entreprises – 12 % du total – auront des revenus tirés de gains en capital l’an prochain.

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Aussi bien dire que la mesure ne touche que les ultra-riches. Les 40 000 individus visés gagnent en moyenne 1,4 million $.

2 milliards $ pour Québec

La mesure est douce-amère du côté des entreprises, car Ottawa ne pigera pas que dans les poches des multinationales, selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

«Des PME locales qui possèdent de plus gros actifs, comme des locaux ou des terrains, vont être désavantagées et devront payer plus d’impôt», a indiqué le vp de l’organisme, Jasmin Guénette, en entrevue avec Le Journal.

D’autres sont plus directs dans leurs critiques. «Le gouvernement est désespéré. Il tente de sauver sa peau et de s’en sortir en augmentant les taxes», s’est offusqué Robert Asselin, du Conseil canadien des affaires.

Il s’agit d’un budget «anti-productivité» qui va nuire aux investissements au pays, a-t-il ajouté. Cela pourrait aussi faire mal aux propriétaires de vieux immeubles qui ont gagné beaucoup de valeur.

Le fiscaliste Luc Godbout n’est pas prêt à aller jusque-là. «On va aller chercher le plus d’argent dans les poches des grandes entreprises avec ça», a-t-il précisé, mardi.

Cela sans compter, souligne-t-il, que Québec ne se fera pas prier pour accepter d’harmoniser ses propres règles. On parle d’un ajout de 2 milliards de dollars par année dans les coffres de l’État québécois.

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C’est quoi, le taux d’inclusion des gains en capital?

Un Ontarien gagne 400 000$ par année et réalise un gain de 300 000$ en vendant son chalet. Avec le taux d’inclusion actuel de 50%, il doit déclarer un revenu additionnel de 150 000$. Dès juin, il devra payer de l’impôt sur 158 333 $ de son gain, soit 4461$ de plus.

Ottawa s'attaque au problème de productivité

Le gouvernement fédéral mise sur l’intelligence artificielle et le soutien à la recherche pour régler le problème lancinant de productivité au pays, mais ces investissements ne serait qu’un rattrapage nécessaire après des années de vache maigre.

«On redouble d’efforts pour augmenter la productivité», a lancé la ministre des Finances Chrystia Freeland lors de la présentation de son budget, mardi après-midi, comme pour répondre à la sous-gouverneure de la banque du Canada, qui soulignait dans les derniers jours qu’il est «urgent» de s’attaquer à cet enjeu.

Au total, Ottawa consacrera 5 milliards $ sur quatre ans pour tenter de régler ce problème, a plaidé Mme Freeland, qui additionne notamment les 2,4 milliards déjà annoncés pour l’intelligence artificielle, ainsi que les sommes pour soutenir la recherche universitaire (825 millions $) et améliorer le programme «Recherche scientifique et développement expérimental» (600 millions $).

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Concrètement, cela se traduira entre autres par une augmentation du financement des études supérieures : les bourses fédérales de maîtrise passeront de 17 500$ à 27 000$, et celles de doctorat de 20 000$ à 40 000$.

Le gouvernement Trudeau espère ainsi créer un cercle vertueux. De meilleures bourses doivent attirer de meilleurs chercheurs, et de meilleurs chercheurs doivent «créer de l’innovation», ce qui en définitive permettra d’améliorer la productivité, nous a-t-on expliqué.

«Un pas en avant, deux pas en arrière»

«Ça fait un bout qu’on attendait ça», a réagi Robert Asselin du Conseil canadien des affaires. «Mais c’est un pas en avant et deux pas en arrière, en raison de l’augmentation du taux d’inclusion des gains en capital.»

«De cette façon, on dit aux investisseurs qu’on va en prendre plus dans leur poche, et ça fait que le risque est plus grand pour eux d’investir dans l’économie», poursuit-il.

Lors de la présentation de son budget, la ministre Freeland s’est défendu en disant que la décision de son gouvernement «n’aura pas d’impact négatif» sur le climat d’investissement au pays, en rappelant du même souffle que le Canada demeure le pays du G7 où le taux d’imposition marginal est le plus bas.

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Quelques mesures en vrac

Vite, vite, le char électrique

Il reste peu de temps à ceux qui veulent profiter du 5000$ du fédéral pour l’achat d’une voiture électrique. Le budget Freeland prévoit 607,9 M$ pour cette année et l’an prochain pour le Programme d’incitatifs pour l’achat de véhicules zéro émission. Alors qu’à Québec, le programme Roulez vert sera mort et enterré dès 2027, à Ottawa, le mystère plane. Tout indique qu’il reste deux ans au programme, mais il a été impossible de le confirmer, hier.

Fini, les frais excessifs pour un chèque qui rebondit

Le fédéral veut limiter à 10 $ les frais d’insuffisance de fonds imposés par les banques. Les banques devront aussi avertir leurs clients que leurs fonds sont insuffisants avant que le chèque ne rebondisse. Ce sont de belles paroles, mais il faudra voir: la mesure devrait voir le jour «au cours des prochains mois».

À bas les frais mesquins

Les fournisseurs de service de téléphonie mobile sont aussi dans le viseur du fédéral. Ils ne pourront bientôt plus facturer des frais aux clients qui les quittent pour un autre. Surtout, les entreprises seront tenues d’aider leur client à trouver le forfait au meilleur prix, même si le contrat n’est pas terminé. Ils devront aussi offrir un portail libre-service en ligne qui permet de changer facilement de forfait.

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