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L'article provient de 24 heures

Le rabais de 100$ de la SAAQ sur le permis de conduire ne fait pas plaisir à tout le monde

Jean-François Desgagnés / Journal
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Photo portrait de Andrea Lubeck

Andrea Lubeck

2023-11-15T17:43:32Z
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Le maintien du rabais sur le prix du permis de conduire fait controverse, alors que les sociétés de transport en commun du Grand Montréal envisagent, selon divers scénarios, de réduire leurs services en raison de déficits importants.

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Pour 2024, un automobiliste québécois n’aura à débourser que 25,50$ pour son permis de conduire, ce qui représente 101,55$ de moins que le prix normal pour les titulaires d'un permis de classe 5. C'est ce qu'a annoncé mardi la ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbeault. 

Comment expliquer un tel rabais? 

Les coffres de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) débordent, en raison notamment de la baisse du nombre d'accidents − et donc d’indemnisations − depuis la pandémie de COVID-19 qui a provoqué une baisse des déplacements. 

En fixant le prix du permis de conduire à 25,50$, la SAAQ se prive de 600 millions $ en revenus avec ce congé de paiement, chiffre le gouvernement.

Si de nombreux automobilistes accueillent l’annonce favorablement, d’autres y voient une occasion ratée d’utiliser ces fonds pour financer les transports en commun.

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«Annonce importante de la part de la ministre des automobilistes du Québec», a ironisé Justine McIntyre, ancienne élue municipale, dans un message publié sur X (anciennement Twitter).

«600 M$ de surplus... plus d’un demi-milliard. Et après, on manque d’argent pour investir dans les transports collectifs», a déploré Angèle Pineau-Lemieux, porte-parole de l’organisme Accès transports viables.

«On continue de faire dérailler des projets de transport collectif, car trop chers, tout en se réjouissant de prolongements et d'élargissements d'autoroutes et de l'argent donné directement aux automobilistes. Et après, on se demande pourquoi les routes sont congestionnées...», s’est également indigné le spécialiste en science du climat Chris McCray.

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La culture du «char» en cause?

Selon Florence Junca-Adenot, professeure au département d’études urbaines et touristiques de l’UQAM, la culture de l’auto a tout à voir avec la multiplication des annonces concernant les investissements dans les projets routiers et la réticence perçue vis-à-vis de la réalisation de projets de transport en commun.

«C’est parce qu’on vit dans un monde de chars», indique en riant celle qui est également cofondatrice de l’Alliance pour le financement des transports collectifs du Québec. 

«La vision [du gouvernement en matière de transports en commun] est bonne. On soumet les projets à plein de consultations, mais quand arrive le moment de passer à la réalisation, il n’y a plus d’argent. Par contre, on continue de faire des routes. Mais si on veut être cohérent par rapport aux enjeux environnementaux, on n’a pas le choix que de développer des outils autres que l’auto-solo et réaménager nos villes. Et ça, ça passe par le transport en commun», regrette-t-elle en entrevue avec 24 heures pour discuter de transport en commun. 

  • Écoutez l'entrevue avec la ministre Geneviève Guibault à l’émission de Mario Dumont via QUB radio : 

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Ça ne veut toutefois pas dire qu'il ne faut pas construire des routes, précise l'experte. Avec l'étalement urbain qui continue de progresser, les déplacements en voiture sont souvent inévitables, reconnaît-elle. 

Le fait que Québec investisse toujours davantage dans les routes que dans les projets de transport en commun, contrairement à l'Ontario, peut ainsi s'expliquer, en partie du moins, par le manque de densification dans les villes, soutient Fanny Tremblay-Racicot, professeure agrégée à l’École nationale d’administration publique. 

Dans son budget 2023, le gouvernement de l’Ontario consacre 70,5 milliards $ sur 10 ans pour les transports en commun, tandis que l’enveloppe pour les projets d’expansion et de réfection routières dans toute la province est de 27,9 milliards $ sur la même période.

Au Québec, la classe politique semble oublier le phénomène de demande induite lorsqu’elle décide d’investir dans des projets d’expansion de routes, explique Mme Tremblay-Racicot dans une entrevue avec 24 heures au sujet du transport en commun.

«Lorsqu’il y a de la congestion, [les gouvernements] ont tendance à augmenter la capacité routière. Mais plus on augmente l’offre, plus ça engendre une demande. C’est le cas pour tous les ministères des Transports axés sur les routes», insiste-t-elle.

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