La Santé publique déclenche une enquête sur la SLA dans Charlevoix
Au moins 24 habitants de Charlevoix-Est ont développé la maladie depuis l’an 2000, a découvert notre Bureau d’enquête
Nora T. Lamontagne et Louis-Philippe Bourdeau
La Santé publique de Québec a déclenché une enquête en bonne et due forme sur la multiplication des cas de SLA dans Charlevoix après les révélations de notre Bureau d’enquête.
C’est ce qu’a annoncé en entrevue Philippe Robert, le directeur de santé publique par intérim du CIUSSS de la Capitale-Nationale.
«On est à l’étape de vérifier s’il y a davantage de cas, de confirmer, de comparer, de regarder tout ça. C’est la première étape d’une enquête épidémiologique», a-t-il expliqué.
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Cette décision survient après un reportage où nous avons révélé que 24 personnes avaient été atteintes de la sclérose latérale amyotrophique (SLA) dans Charlevoix-Est depuis l’an 2000.
De l’avis de chercheurs, il s’agit à première vue d’une incidence particulièrement élevée dans une MRC qui ne compte que 15 000 habitants.
L’annonce de cette enquête réjouit Elsa Tremblay, une agente de recherche en neurosciences qui a perdu sa grand-mère et son père de la maladie. «Les gens de la région méritent cette enquête. Même si ça va prendre un certain temps avant d’avoir des réponses, c’est très bon signe qu’elle soit enclenchée.»
Les autorités affirment n’avoir jamais reçu de signalement formel avant que notre Bureau d’enquête ne les informe de son recensement.
Aussi appelée maladie de Lou Gehrig, la SLA est une maladie incurable et fatale, qui emporte la moitié de ses victimes moins de deux ans après leur diagnostic.
Peu de données
Pour faire un portrait de la situation dans Charlevoix, la santé publique a notamment approché SLA Québec, l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), différents ministères, des neurologues ainsi que la papetière de Clermont, dont au moins cinq employés sont morts de la SLA.
Les familles des Charlevoisiens touchés seront aussi éventuellement contactées afin de détailler le passé et les habitudes de vie de leur proche.
«On n’a pas beaucoup de données fiables au Québec sur la survenue des cas», regrette toutefois le Dr Philippe Robert, qui entrevoit «un travail fastidieux».

«Je comprends les gens qui voudraient savoir la cause précise, mais on sait que ce [genre d’enquêtes] sont des exercices difficiles», prévient-il.
Parallèles avec l’Estrie
Les équipes de la Capitale-Nationale sont aussi en contact avec leurs vis-à-vis de la santé publique de l’Estrie, qui a déclenché sa propre enquête en décembre sur un nombre de cas anormalement élevé.
«Ça va peut-être générer des hypothèses pour la recherche sur des causes possibles», entrevoit le Dr Robert.
Car dans les environs de Windsor aussi, plusieurs travailleurs d’une usine de pâtes et papier ont été atteints de la SLA dans les dernières années.
Plusieurs des habitants atteints du Val-Saint-François vivaient également à proximité d’un lac, alors que la science a déjà fait des associations entre la SLA et la présence de cyanobactéries.
À ce jour, les chercheurs ignorent encore les facteurs de risque exacts liés à la SLA, alors que seuls 5 à 10% des cas sont d’origine génétique.