Allégations d’inconduites à l’UPAC: la Couronne et la police avaient des doutes


Jean-Louis Fortin
Autant la Couronne que la police de Québec avaient de gros doutes sur l’enquête lancée par l’ex-patron de l’UPAC pour découvrir l’auteur de fuites dans les médias, enquête qui est maintenant qualifiée de « bidon » par un juge de la Cour du Québec.
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Des documents produits par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) montrent à quel point le fameux Projet A, à l’initiative de Robert Lafrenière, ne faisait pas l’unanimité.
Le 30 octobre 2017, cinq jours après l’arrestation du député Guy Ouellette, alors soupçonné d’avoir joué un rôle dans les fuites, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) estimait qu’il n’avait pas en main tous les éléments pertinents dans cette affaire.
« L’un de nos mandats est de conseiller les services policiers sur le cadre juridique d’une enquête. Pour le faire adéquatement, nous avons besoin d’informations complètes et transparentes. [...] Je considère que ce n’est actuellement pas le cas dans l’affaire Projet A », écrit Me Josée Grandchamp, procureure en chef au Bureau de la grande criminalité et des affaires pénales du DPCP, à André Boulanger, alors directeur des opérations à l’UPAC.
« J’ai donc demandé à Me Betty Laurent [une autre procureure du DPCP] de ne plus conseiller dans l’enquête Projet A et ce, jusqu’à ce qu’un affidavit complet nous soit soumis », poursuit-elle.
Pas d’accusation
On connaît la suite. Non seulement Guy Ouellette n’a jamais été accusé, mais l’UPAC a même dû lui présenter des excuses officielles quelques années plus tard.
Un autre courriel montre que trois jours avant l’arrestation du député, le DPCP n’était pas d’accord avec l’idée de saisir le téléphone cellulaire du député.
« Après analyse du dernier affidavit soumis, [...] nous vous recommandons de ne pas présenter cette demande [pour saisir le téléphone], écrit Me Laurent à l’enquêteur de l’UPAC Jean-Frédérick Gagnon.
La police de Québec mal à l’aise
Un enquêteur de l’UPAC, Denis Pelletier, a pour sa part raconté au BEI avoir été obligé de se rendre à Québec en prévision de l’opération visant Ouellette, car le directeur du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) Robert Pigeon était mal à l’aise avec l’implication de ses troupes dans cet aspect de l’enquête.
« Robert Pigeon se retirait de tout ce qui touchait Guy Ouellet [sic], refusant toute implication de ses policiers de près ou de loin concernant l’arrestation d’un député », écrivent les enquêteurs qui ont interrogé M. Pelletier.