Dégustation 5 services au restaurant Mastard

Alexandra Diaz
Le Mastard est ce restaurant de quartier au menu secret et fabuleux qu’il faut essayer au moins une fois sans attendre de grande occasion. Le nom du Mastard veut dire «grand et costaud», tout comme son chef propriétaire, Simon Mathys, qui est attachant, humble, ultra-réservé et fou d’histoire et de Jehane Benoît.

Ses plats en sauce, en émulsion, en bouillon sont soyeux, sa marque de commerce même s’il ne veut pas d’étiquette. À chaque bouchée, le feeling de n’avoir jamais mangé quelque chose d’aussi bon est vraiment excitant. À chaque plat, l’impression de voir une toile au musée force l’admiration. Et le plus cool, c’est de goûter des aliments bien de chez nous (un poireau, c’t’un poireau, ici), qu’on voit au supermarché chaque semaine et qui proviennent de nos producteurs locaux préférés. Des plats fancy et réconfortants, simples et diablement délicieux.
Prix du convoité titre du chef de l’année aux Lauriers de la gastronomie 2022, celui du meilleur nouveau restaurant la même année par le prestigieux magazine En Route, celui du meilleur plat de l’année aussi la même année, par le même magazine, pour un sensationnel plat de tomate, et une mention dans le Canada’s 100 best et j’en oublie certainement, mais on est devant un king, comme on dit. L’un de nos meilleurs chefs au pays. Chez les foodies, qui viennent de l’étranger tout aussi bien que d’ici, le Mastard figure au haut de la liste des expériences à cocher sur sa bucket list, et dans Rosemont, c’est le restaurant du quartier où on est accueilli sans façon pour se délecter au bar ou à table avec les enfants habillés en jeans. Wow.

Je pense que la chose la plus hallucinante, c’est de voir un restaurant complet un mercredi soir par des clients qui n’ont aucune idée de ce qu’ils vont manger. Sur le site du Mastard, sous l’onglet «menu», on trouve bien une liste d’ingrédients, indice de ce qui inspire le chef et sa brigade à ce moment: canard, maitake, foie gras, ail, oignon, chou, pétoncle, poire, chocolat, œuf, jambon, Louis d’Or, clou de girofle, doré, herbes, sarrasin, betterave, topinambour. Ça veut tout dire et rien à la fois. Si la betterave ne vous plaît pas, on vous proposera autre chose. Et la pintade, qui ne figure pas dans la liste d’ingrédients d’inspiration, était exquise avec du chou nappé de sauce à l’estragon. On sait qu’on s’embarque pour 5 services avec un possible accord de vins naturels superbement sélectionnés.
Une petite carte de bienvenue nous présente l’équipe en cuisine et en salle qui veillera sur nos papilles. Tous les noms y figurent, avec mention particulière pour Viki Brisson-Sylvestre, l’amoureuse de Simon, sans qui rien de cela ne serait possible, comme il l’indique. On craque! Simon Mathys n’a rien du one man show. Il apporte l’un de vos plats à votre table, tout comme chaque cuisinier; c’est officiellement leur tâche en salle. Les serveurs, eux, servent le vin. Un beau monde à l’envers!

Afin de vous inviter à vivre la même surprise, je ne mentionnerai aucune autre description des plats créés par ce jeune chef de 41 ans, qui souligne cette année ses 20 ans après la sortie de l’école d’hôtellerie et qui fait la preuve chaque soir que le métier de chef propriétaire peut se faire à sa manière.
Levé tôt, Simon marche tous les jours pour accompagner sa fille à l’école, pendant que sa partenaire d’affaires et de vie veille ces jours-ci sur leur garçon de 6 mois entre autres tâches. Ensuite, Simon marche 5 min vers le gym, puis 10 minutes vers son restaurant, où la confiance des clients envers sa cuisine lui donne le privilège inouï de ce menu carte blanche depuis 3 ans. Samedi et dimanche? C’est congé.
Je vous dirai par contre que si vous rêvez de déguster 5 services comme si vous aviez devant vous le gagnant de Top Chef des 15 dernières années à prix complètement juste, vous allez vous en souvenir longtemps.