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L'article provient de Le Journal de Montréal
Monde

Révocation du droit à l’avortement: vague de soutien pour les Américaines

Des femmes de partout dans le monde se mobilisent pour protester contre la récente décision de la Cour suprême

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Photo portrait de Clara Loiseau

Clara Loiseau

2022-06-27T04:00:00Z
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WASHINGTON | Les Américaines qui se sentent comme des citoyennes de seconde zone parce qu’elles sont des femmes depuis la révocation du droit à l’avortement sont loin d’être seules pour mener ce long combat.

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«J’ai eu le droit de me faire avorter quand j’avais 21 ans. J’ai eu le droit de faire mes choix. Vendredi, quand la décision a été rendue publique, je me suis rendu compte que, nous, les femmes, nous avons maintenant moins de droits que les cadavres humains puisqu’il faut avoir donné un consentement pour prélever des organes», rage Donna Garon, 53 ans.

Au milieu de la foule qui manifestait hier matin devant le plus haut tribunal américain, cette femme qui travaille dans une clinique d’avortement du Maryland avait du mal à cacher ses larmes de colère derrière ses lunettes de soleil.

«Quand la décision est tombée, je me suis allongée à terre en pleurant toutes les larmes de mon corps. J’ai dû expliquer à mon fils que notre gouvernement venait de me retirer le droit de faire ce que je veux avec mon corps», ajoute-t-elle.

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Mobilisation

La seule chose qui la conforte aujourd’hui, c’est de constater qu’elle est très loin d’être seule à se mobiliser. Que ce soient les hommes ou même les organismes religieux, tous se serrent les coudes aux quatre coins de la planète.

«Partout dans le monde, partout au pays, des gens s’élèvent pour offrir leur aide. On continue de faire attention aux unes et aux autres comme on l’a fait avant Roe contre Wade et évidemment, on continuera de le faire», ajoute-t-elle confiante.

Dans la clinique où elle œuvre, il y a déjà près de deux mois d’attentes pour obtenir un rendez-vous pour un avortement, explique-t-elle. Elle s’inquiète déjà de voir la demande exploser dans les prochains jours.

«Toutes les opportunités que j’aurais pour aider le monde, légalement ou non, je les saisirais. Si je dois envoyer des cartes de vœux avec des pilules contraceptives, ça va me faire plaisir de le faire. Si je dois faire traverser la frontière de certains États à des femmes, je le ferais», lance Mme Garon.

Photo Clara Loiseau
Photo Clara Loiseau

Combat idéologique

Alors que la manifestation pro-choix se déroulait pacifiquement, de jeunes militants antiavortement sont revenus, hier en fin d’après-midi, célébrer leur «victoire», sous le regard attentif des policiers de la capitale.

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«Ils viennent jubiler alors que nous, nous sommes en deuil», a crié une manifestante.

S’ils savent qu’aujourd’hui le monde entier a le regard braqué sur leur pays, les manifestantes pro-choix rappellent qu’il a suffi d’un seul homme pour faire chavirer le droit des femmes.

«Ne tenez jamais vos droits pour acquis et continuez de vous battre pour eux. Avec la montée de la droite radicale, le Canada aussi peut être le prochain pays à remettre en cause le droit des femmes», met en garde Mme Garon. 

Les hommes joignent aussi leur voix     

Des hommes étaient bien visibles dans la manifestation d’hier.
Des hommes étaient bien visibles dans la manifestation d’hier. Photo AFP

WASHINGTON | Des centaines d’hommes sont venus allier leur voix à celles des milliers de femmes qui manifestent depuis vendredi devant la Cour suprême des États-Unis à Washington.

«Je suis là pour mes sœurs, pour mes amies, pour ma mère, pour ma grand-mère, pour toutes les femmes qui se sont battues et qui doivent encore se battre aujourd’hui. Nous nous devons de les aider à se faire entendre en ce jour de deuil aux États-Unis», a confié Akeem Raemon Adams, un résident de Washington rencontré par Le Journal devant l’imposant monument situé en face du Capitole des États-Unis.

Comme lui, ils sont des centaines à avoir été choqués de voir la plus haute instance du pays retirer le droit à l’avortement acquis depuis près de 50 ans. Au milieu des centaines de manifestantes, impossible de ne pas entendre ces maris, conjoints, amis, frères, pères s’époumoner lorsqu’ils scandent «leur corps, leur choix».

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«Si je suis là aujourd’hui, c’est parce que ma mère a choisi de m’avoir. Et c’est ça le plus important, c’est que ces femmes aient le choix», a expliqué Rusty, 35 ans.

Photo Clara Loiseau
Photo Clara Loiseau

Aider les femmes

Outre le fait de venir soutenir les femmes, il explique qu’il fera tout pour aider celles qui habitent des États où l’interruption volontaire de grossesse est devenue ou deviendra illégale.

«S’il faut les conduire jusqu’à un endroit sûr pour elles, s’il faut que je leur envoie et que je commande moi-même des pilules contraceptives, je le ferai et avec plaisir», ajoute-t-il.

Même chose pour M. Adams.

«Depuis vendredi déjà, je commence à me mobiliser pour venir au moins en soutien moral et émotionnel aux femmes de mon entourage. Je veux qu’elles sachent qu’elles ne sont pas seules», a-t-il lancé.

Pour Nathan Hall, il était impossible de ne pas venir manifester alors qu’il est le père de deux jeunes filles.

«J’ai peur de ce que nous réserve le gouvernement et l’avenir pour mes enfants. Je ne veux pas qu’elles vivent dans la peur de ce qui pourrait leur arriver», confie-t-il.

Selon plusieurs manifestants, le combat ne fait que commencer, car ils veulent montrer aux juges qu’ils sont loin de représenter la majorité des Américains.

«Nous nous tiendrons debout, c’est loin d’être fini», a affirmé Akeem Raemon Adams. 

Les croyances d’une minorité imposées à toutes      

WASHINGTON | Des groupes religieux qui défendent le choix des femmes se disent complètement dévastés par la décision de la Cour suprême et craignent que cela crée des dommages irréparables.

«C’est un échec moral désastreux pour notre pays. Aujourd’hui, des gens de tout horizon, de toute culture et de toute religion doivent se soustraire aux croyances d’une minorité de personnes», déplore Sheila Katz, présidente du Conseil national des femmes juives (NCJW), au Journal.

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Pas dans la Bible

Même son de cloche à l’organisation Catholiques pour le choix.

«Il n’y a rien dans la Bible qui parle d’avortement, alors je ne sais pas quel Dieu leur a dit d’imposer cela. On parle ici d’une certaine idéologie qui appartient à la frange la plus radicale», explique la présidente de l’association, Jamie Manson.

Selon cette dernière, 60 % des Américains catholiques étaient contre le renversement historique de l’arrêt Roe contre Wade.

«Pour plusieurs religions, comme le judaïsme ou l’islam, l’avortement est permis. Il faut vraiment que certains mouvements religieux arrêtent de mentir et de faire croire que l’avortement va à l’encontre des croyances, c’est un mensonge», ajoute-t-elle.

Détresse

Photo Clara Loiseau
Photo Clara Loiseau

Depuis vendredi, jour où la Cour suprême des États-Unis a rendu publique sa décision de révoquer le droit à l’avortement, des groupes religieux croulent sous les appels de détresse des femmes de leur communauté.

C’est notamment le cas de l’organisme Faith Choice Ohio (Choix de foi Ohio), qui travaille entre autres à intégrer la question de l’avortement avec la religion, peu importe la croyance, et qui vient en aide aux personnes souhaitant se faire avorter.

«Nous savons que maintenant, des gens vont devoir parcourir des kilomètres, vont avoir besoin d’argent et qu’ils auront besoin d’aide et de soutien pour se faire avorter en dehors de notre État. Nous serons là pour elles», promet la directrice générale, Elaina Ramsey, dont l’organisme a lancé une collecte de fonds.

Partout au pays, les organismes religieux se mobilisent ensemble, confient également Mme Katz et Mme Manson.

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