Budget Girard: face à un déficit record de 11 milliards $, des choix difficiles à venir au Québec

Geneviève Lajoie
Aux prises avec un déficit record de 11 milliards $, le gouvernement Legault repousse le retour à l’équilibre budgétaire à 2030. Pour sortir la tête de l’eau, Québec coupe dans l’aide aux entreprises, serre la ceinture des sociétés d’État et taxe les fumeurs. Mais le pire est à venir.
• À lire aussi: Voici 8 choses que vous devez savoir sur le budget Girard
• À lire aussi: Budget Girard: Dépêchez-vous! La généreuse subvention à l’achat d’un véhicule électrique disparaîtra
Écrit à l’encre rouge foncé, le sixième budget d’Eric Girard sème les graines de l’austérité, mais le ministre s’en défend. Le déficit est presque quatre fois plus élevé que prévu. Même au plus fort de la pandémie, le trou (10,7 milliards $ en 2020-2021) n’avait pas atteint ce niveau.

La santé des finances publiques est plombée par la stagnation de l’économie, les catastrophes naturelles et l’entente avec les profs, qui coûte plus de 3 milliards $ de plus par an.
Le ministre Girard met aussi une grande part de l’odieux sur la COVID-19 et la récession qui a suivi. Il espère que les gens ne le jugeront pas trop sévèrement et se souviendront qu’il a hérité d’une situation exceptionnelle.
- Écoutez l'analyse d'Antoine Robitaille, chroniqueur au Journal de Montréal et de Québec, avec les informations de dernière heure sur le budget sur QUB :
«La pandémie nous a laissé des impacts permanents dans le réseau de la santé, s’est défendu le grand argentier du gouvernement. Désormais, on va toujours garder des stocks de masques, on va toujours garder des cliniques de vaccination.»
Ancien banquier, Eric Girard a tenu à se faire rassurant. Le déficit est «gérable», a-t-il assuré. Il mise gros sur une embellie dans la seconde moitié de l’année. Mais les choix difficiles sont reportés à l’an prochain. C’est à ce moment que les Québécois connaîtront l’ampleur des mesures de rigueur qui permettront de revenir au déficit zéro.
Révision des taxes
Québec promet d’entreprendre une révision de l’ensemble de ses dépenses. Même le régime d’imposition des particuliers et celui des taxes à la consommation seront passés au peigne fin.
Le ministre Girard jure toutefois qu’il n’est pas question pour son gouvernement de hausser les impôts des citoyens ou d’augmenter la TVQ pour combler le déficit. Pour le reste, tout est sur la table.
Une cure minceur s’amorce aussi dans les ministères, mais pas question de couper des fonctionnaires, a prévenu la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel.
Si la CAQ ne compte annoncer son plan précis de retour à l’équilibre budgétaire que l’an prochain, plusieurs ministères goûteront dès cette année au régime sec. C’est le cas au Tourisme, qui voit ses dépenses de programmes diminuer de plus de 7%, alors que le ministère de l’Environnement devra les réduire de 1,4%.
Finie la subvention aux voitures électriques
D’ici là, Québec sonne le glas des crédits d’impôt aux entreprises qui employaient des retraités, une mesure pourtant mise en place par la CAQ il n’y a pas si longtemps pour contrer la pénurie de main-d’œuvre. «Elle n’est pas très performante, très peu réclamée par les entreprises», a laissé tomber le ministre, au huis clos du budget.
Les principales sociétés d’État comme Hydro-Québec ou Loto-Québec devront se serrer la ceinture pour trouver un milliard $ sur cinq ans.
Mieux vaut vous dépêcher si vous souhaitiez vous procurer une voiture électrique à bon prix. La subvention accordée à l’achat d’une auto verte diminuera drastiquement de près de moitié le 1er janvier prochain, avant de disparaître complètement en 2027.
Le gouvernement ira chercher de l’argent chez les propriétaires de minounes. Il ne sera plus possible de vendre son vieux bazou âgé de dix ans pour 1$. Il faudra dorénavant payer la taxe de vente sur toutes les voitures de moins de 15 ans.
Les fumeurs écoperont aussi. Dès demain, griller une clope coûtera plus cher, alors que le prix de la cartouche augmentera de 2$. Les amateurs de cigarettes devront encaisser une seconde hausse en janvier prochain.
Malgré le contexte difficile, le ministre Girard promet de remettre les finances publiques du Québec dans un bon état à son successeur. Il prédit déjà que ce sera une femme...
Ce qu’ils ont dit:
«Le plan de retour à l’équilibre nécessitera des gestes réels, mais c’est gérable.»
– Le ministre des Finances, Eric Girard
«La CAQ a perdu le contrôle des finances publiques. La CAQ ne comprend plus comment créer de la richesse.»
– Le libéral Frédéric Beauchemin
«Le plus gros déficit de ce budget, il est dans le logement. Il manque un mot à côté de la santé et de l’éducation, et c’est l’habitation.»
– Le solidaire Haroun Bouazzi
«C’est décevant qu’on recule sur le ratio dette PIB [...] Mais ce n’est pas un scénario catastrophe. On parle d’un manque de prudence dans le budget 2023 [avec les baisses d’impôts].»
– Le chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon
Vous avez des informations à nous communiquer à propos de cette histoire?
Écrivez-nous à l'adresse ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.