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L'article provient de Le Journal de Québec
Société

Visite du pape: les victimes d’abus sexuels veulent des actions

Les excuses du pape seront mieux accueillies si elles s’accompagnent d'un règlement des actions collectives

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Photo portrait de Pierre-Paul Biron

Pierre-Paul Biron

2022-07-29T19:31:11Z
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Les victimes d’abus sexuels commis par des membres de l’Église catholique sont catégoriques: le pape a fait un premier pas en reconnaissant les abus et en appelant à des «actions fortes», mais la seule action qui vaille serait un règlement rapide de la vingtaine de recours collectifs déposés au Québec.

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Gaétan Bégin, victime d’abus d’un religieux dans son enfance, salue la reconnaissance par le pape François jeudi des torts qui lui ont été faits, mais il lui en faudra plus.

Parce qu’après tant d’années de lutte, les mots et les prières ne suffisent plus.

«Ils doivent réparer ce qu’ils ont brisé. C’est le temps maintenant si je veux être capable de vivre le temps qu'il me reste l’esprit en paix», confie l’homme, qui aura 82 ans le mois prochain. «Plusieurs victimes sont mortes aujourd’hui tant ça a été long. Ça doit finir», clame celui qui affirme avoir été agressé avec ses deux frères par un abbé de la Beauce à la fin des années 1950.

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Même chose pour Jean Simard, victime de Sœurs de la Charité au Mont d’Youville. L’homme de Québec saisit mal pourquoi le pape, en tant que chef de l’Église, ne prend pas le dossier en main pour régler les recours entrepris.

«Plutôt que juste s’excuser, il aurait le pouvoir de régler. Mais à la place, on est coincés dans cette folie-là», déplore M. Simard.

Actions fortes

Dans une messe tenue jeudi à la basilique Notre-Dame de Québec, sa dernière célébration officielle dans la Vieille Capitale, le Saint-Père a reconnu pour la première fois les abus sexuels commis au pays par des membres de l’Église.

Parlant de «scandales», François a appelé à «des actions fortes» et «un combat irréversible», des paroles qui mettent une forte pression sur les diocèses et les congrégations visés par des actions collectives.

«Le pape les appelle à des actions fortes. Pour moi, la seule vraie action, c’est de régler les dossiers», martèle Jean Simard.

«J’espère que les organisations qui sont en dessous de lui prennent acte de sa position. Elles n’ont plus le choix», observe Me Alain Arsenault, qui représente des victimes dans certains de ces recours. «Et ça continue de rentrer. J’en ai encore une autre qui m’a contacté ce matin.»

Parce que si rien ne se passe, ces belles promesses du pape François n’auront qu’un goût amer pour les victimes.

«Si rien ne bouge, sa visite serait la même chose que [causer] un accident d’auto, débarquer pour dire qu’il a honte et s’excuser, avant de se sauver. C’est ce que le pape aura fait s’il n’y a pas réparations», image Roger Lessard, qui agit comme porte-parole de groupes de victimes d’abus sexuels.

Bâtons dans les roues

Pour les victimes interrogées par Le Journal, la visite du pape aura remué bien des souvenirs d’horreur. Gaétan Bégin n’avait même pas eu vent des propos du Saint-Père à propos des abus sexuels, incapable de suivre les détails de sa visite.

«Quand il a dit à son arrivée qu’il demandait pardon pour ce que des membres de l’Église avaient fait sans reconnaître que c’était l’Église elle-même le problème, j’ai tellement ressenti de rage, je ne voulais plus le voir», raconte l’homme de Sherbrooke.

Ce dernier faisait partie des signataires d’une lettre à l’endroit du pape François, demandant des excuses et une accélération des démarches de réparation. Le Saint-Père n’a donc fait qu’une partie du chemin pour le moment.

«Ça doit bouger le plus vite possible», réclame-t-il.

«Il faut qu’ils arrêtent de mettre des bâtons dans les roues des victimes. Ils sont vite pour prier pour les victimes, mais quand c’est le temps d’indemniser, c’est la catastrophe. Là, c'est assez», ajoute Roger Lessard.

Les actions collectives contre l’Église pour abus sexuels au Québec

  • 24 dossiers en cours
  • 7 contre des diocèses, 17 contre des congrégations religieuses
  • Environ 2000 victimes déclarées

Source: Me Alain Arsenault

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