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L'article provient de Le Journal de Québec
Société

Ce meurtre commis en 1926 n’est toujours pas résolu: le comptable Henri Bertrand a-t-il tué son patron?

Le comptable de Beaudry, Henri Bertrand, avait été licencié par «La Revue moderne» quelques semaines plus tôt, le privant d’un salaire de 60$ par semaine. Il avait aussi manipulé les livres comptables de Beaudry. Il est le principal suspect dans l’assassinat, mais s’en tire sans condamnation.
Le comptable de Beaudry, Henri Bertrand, avait été licencié par «La Revue moderne» quelques semaines plus tôt, le privant d’un salaire de 60$ par semaine. Il avait aussi manipulé les livres comptables de Beaudry. Il est le principal suspect dans l’assassinat, mais s’en tire sans condamnation. Source : LSJML
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Photo portrait de Mathieu-Robert Sauvé

Mathieu-Robert Sauvé

2023-12-21T05:05:00Z
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Antonio Beaudry est un homme engagé dans sa communauté auquel on ne connaît aucun ennemi. Pourtant, quand il est retrouvé mort dans son bureau, il faut bien se rendre à l’évidence: il a été tiré à bout portant.

«Les soupçons se sont rapidement tournés vers son comptable, Henri Bertrand, qui était sur les lieux le jour du crime, le 16 août 1926», relate l’historien Simon Dubé, adjoint exécutif au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale. 

Dans les archives de ce laboratoire unique au Québec, qui célèbre son 110e anniversaire en 2024, on garde encore l’analyse balistique de ce cas non résolu qui a passionné la presse à l’époque. 

C’est dans cet immeuble qu’on a retrouvé le corps de Beaudry.
C’est dans cet immeuble qu’on a retrouvé le corps de Beaudry. Source LSJML

L’accordeur était aveugle

Non seulement le comptable Bertrand avait un mobile incriminant, une dette de 10 000$ qu’il devait rembourser rapidement, mais on sait qu’il avait acheté une arme peu avant le drame. «Un révolver de calibre .32 acquis à un accordeur de piano que la police avait réussi à retracer», ajoute M. Dubé. 

Le calibre du pistolet correspondait aux balles retrouvées dans le corps du défunt, comme avait pu le constater le fondateur du Laboratoire, le Dr Wilfrid Derome, l'un des plus grands cerveaux de son temps en matière de criminalistique. 

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Le Dr Wilfrid Derome, médecin légiste et fondateur du Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, présente son expertise balistique au procès de 1926.
Le Dr Wilfrid Derome, médecin légiste et fondateur du Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, présente son expertise balistique au procès de 1926. Source : LSJML

Durant le procès, qui s’était ouvert en novembre 1926, les analyses des experts se sont succédé et les procureurs y sont allés de leurs plaidoiries. 

Pour la Couronne, un problème se pose assez rapidement: l’arme du crime n’a jamais été retrouvée. Or, si l’autopsie révèle un homicide par arme à feu assez précisément pour identifier le calibre de l’arme fatale, il est essentiel de coupler les balles et le pistolet pour établir une preuve. 

«Autre problème, ajoute M. Dubé, l’accordeur de piano auquel le comptable avait acheté le pistolet était aveugle. Même s’il avait reconnu la voix de son client, les avocats ont mis son témoignage en pièces.» 

Tiré des archives du laboratoire, voici le bureau où le meurtre a été commis. J. Antonio Beaudry a reçu deux balles de revolver de calibre .32.
Tiré des archives du laboratoire, voici le bureau où le meurtre a été commis. J. Antonio Beaudry a reçu deux balles de revolver de calibre .32. Source : LSJML

Acquitté!

Au prononcé de la sentence, l’audience a réagi avec étonnement. «Infâme», titrera le journal La Presse dans son édition du lendemain. 

Le comptable a retrouvé sa liberté immédiatement après le procès et on n’a plus jamais entendu parler de lui. 

Pour le personnel du laboratoire, c’était l'une des premières expériences de procès hautement médiatisés où des experts des sciences judiciaires sont appelés à la barre. Une source d’information dont on ne saura désormais plus se passer.

Le Dr Derome, qui s’était inspiré de laboratoires européens pour créer son unité professionnelle, acquerra une réputation internationale telle que le fondateur du Federal Bureau of Investigation (FBI) des États-Unis, J. Edgar Hoover, viendra visiter le laboratoire montréalais pour s’en inspirer à son tour. 

J. Antonio Beaudry était un homme d’affaires de Westmount, propriétaire entre autres de «La Revue moderne». Il est assassiné en 1926.
J. Antonio Beaudry était un homme d’affaires de Westmount, propriétaire entre autres de «La Revue moderne». Il est assassiné en 1926. Source : LSJML

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