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L'article provient de 24 heures

Prendre le métro sans payer, c’est un jeu d’enfant: plein d'usagers sautent les tourniquets

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Photo portrait de Gabriel  Ouimet

Gabriel Ouimet

2024-02-15T12:00:00Z
2024-02-15T14:59:50Z
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Métro de Montréal, à l’heure de pointe matinale. En moins de 40 minutes, une quinzaine de personnes franchissent sans payer les tourniquets d’une station de la ligne orange. Dans tout le réseau, cette pratique illégale engendrerait annuellement des millions de dollars en pertes de revenus pour la STM. 

Certains se faufilent, d’autres sautent carrément par-dessus les tourniquets. La majorité passe sans hésitation. Lors du premier passage de 24 heures, c’est une personne toutes les trois minutes qui a franchi les tourniquets sans payer, soit une vingtaine par heure. 

À l’heure du retour à la maison, la scène se répète dans une station de la ligne verte. 

Rien d’étonnant: «c’est comme ça tous les jours», nous confirme un agent de station, qui ne peut rien faire face aux usagers fautifs. 

«On envoie un message à la centrale et on espère que quelqu’un va intercepter la personne, lance-t-il sous le couvert de l’anonymat. C’est frustrant!»

Photos Gabriel Ouimet, photomontage Benoît Dussault
Photos Gabriel Ouimet, photomontage Benoît Dussault

Même si l’expérience de 24 heures n’a rien de scientifique, on peut s’imaginer que des milliers de personnes entrent chaque jour illégalement dans les 68 stations du réseau montréalais. Alors que la Société de transport de Montréal (STM) a dû réduire ses dépenses cette année, en plus d’envisager des diminutions de services, il y a lieu de se questionner sur les conséquences financières de toutes ces entrées frauduleuses.

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Des pertes de plusieurs millions

La conseillère corporative aux affaires publiques de la STM Laurence Houde-Roy indique que «la notion de perte financière engendrée par la fraude est complexe à calculer, puisqu’elle nécessite d’arriver à un indice de fraude fiable et représentatif». 

«Un tel indice comporte nécessairement plusieurs biais statistiques et la STM ne considère pas qu’il s’agit d’un indicateur assez fiable pour être suivi ou utilisé», précise-t-elle dans un courriel envoyé à 24 heures

Il y a quelques années, la société de transport estimait néanmoins le taux de fraude «entre 1 et 2%» de l’ensemble des passages enregistrés dans une année dans le métro de Montréal, «ce qui n’est pas critique», selon Mme Houde-Roy. 

En 2023, il y a eu 214,7 millions d’entrées dans le métro de Montréal. C’est donc dire que près de 4,3 millions de passages frauduleux pourraient avoir été effectués.

En calculant le coût d’un passage à 2,75$, le prix le plus bas pour accéder au réseau de la STM − un billet régulier coûte 3,75$ −, on arrive à un manque à gagner d’au moins 11,8 millions de dollars, sur un budget de roulement de 1,7 milliard de dollars la même année. 

Le problème des passages frauduleux ne représente toutefois qu’une «petite partie» des problèmes financiers à la STM, rappelle la directrice générale de Trajectoire Québec, Sarah V. Doyon. 

Selon elle, les organismes de transport en commun ne devraient toutefois pas être soumis à des impératifs de rentabilité. 

«Le transport en commun, c’est rentable à peu près nulle part dans le monde, et ça n’a pas à l’être, parce que c’est un service public. C’est un coût qu’il faut décider d’assumer, c’est tout», martèle-t-elle. 

La sécurité avant tout, mais...

Malgré les millions de dollars perdus en raison des passagers frauduleux, la priorité des constables spéciaux est d’assurer la sécurité des usagers du métro, affirme la STM. 

Un choix que comprend Sarah V. Doyon, alors que le sentiment d’insécurité dans le métro a augmenté dans les derniers mois. Les appels d’intervention de la part de constables spéciaux sont en effet passés de près de 25 000 en 2019 à 43 000 en 2023. 

Les contrôles de titre ne représentent donc qu’environ 30% des tâches des constables, mentionne Mme Houde-Roy. Ils ont néanmoins remis 7171 constats pour non-paiement de titre de transport en 2023. Le coût de ces constats peut s’élever jusqu’à 500$.

Soyez d’ailleurs avertis: plusieurs de ces contrôles sont menés par des agents habillés en civils dans les stations les plus problématiques. 

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