«On va devoir payer»: quels sont les impacts de la décote de crédit et comment le Québec peut-il améliorer son sort?

Yannick Beaudoin
La décote de crédit du Québec par l’agence Standard & Poors (S&P) est à prendre très au sérieux, estime l’économiste et chroniqueur Francis Gosselin, même si les répercussions à court terme ne semblent pas énormes.
• À lire aussi: Déficit historique et décote du Québec: Legault ne regrette pas ses choix
• À lire aussi: Décote du Québec: le gouvernement Legault fait preuve «d’indécence»
• À lire aussi: 5 questions pour mieux comprendre la décote du Québec
En entrevue sur les ondes de LCN, samedi, celui-ci a indiqué que c’est le refinancement de la dette québécoise qui écopera dans un premier temps.
«Cette année, c'était dans le budget, on compte renouveler environ 30 milliards des 350 milliards de dettes qu'on a. Évidemment, ce sont des obligations à long terme. Donc, chaque année, il y en a qui arrivent à échéance. Il faut en émettre de nouvelles, il faut refinancer. Donc, pour cette portion-là, on risque de payer effectivement un peu plus. On parle de 30 à 40 millions de dollars de frais de financement additionnels», a-t-il expliqué.
Dans son rapport, S&P ouvre la porte à une autre décote si le Québec ne reprend pas le contrôle de ses dépenses. Si un tel scénario venait à se concrétiser, le Québec pourrait devoir débourser jusqu’à plusieurs centaines de millions en financement additionnel de sa dette.
Néanmoins, Francis Gosselin précise qu’une augmentation de 30 millions de dollars du service de la dette demeure un fragment de la dette du Québec, qui elle s’élève à 9,7 milliards $.
«30 millions, c'est beaucoup d'argent, mais toute proportion gardée, ce n’est pas une si grosse augmentation de nos coûts de financement», indique-t-il.
Malgré tout, la décote du Québec finira par avoir un impact sur le portefeuille des citoyens, précise l’expert.
«Si ce n'est pas maintenant, c'est demain qu'on va devoir payer éventuellement cette dette-là par soit des augmentations de taxes, soit par des réductions de services, donc éventuellement, de repousser à la génération prochaine les problématiques de saine gestion des finances publiques», mentionne-t-il.
Comment le Québec peut-il améliorer sa cote de crédit?
Pour Francis Gosselin, il ne fait aucun doute que le Québec doit resserrer ses dépenses pour éviter une seconde décote.
«On a connu une période économique plus stable depuis deux ans. Ça n'a pas empêché la CAQ de faire des déficits quand même assez monstrueux. Il y a eu des augmentations de salaire très importantes qui ont été consenties aux travailleurs du secteur public», commente l’économiste.
«Et on n'a pas vraiment travaillé très fort du côté des recettes fiscales. Par exemple, on peut penser à la baisse d'impôt qui avait été consentie, les chèques de 500 $, toutes sortes de mesures qui n'étaient franchement pas très nécessaires et qui ont affaibli la position du Québec en matière fiscale», ajoute-t-il.
Le gouvernement Legault doit apporter des «mesures correctives», soutient M. Gosselin.
«Qu'on arrête de jouer à l'improviste, à ces différentes mesures-là, et qu'on mette vraiment en place un cadre beaucoup plus sérieux pour équilibrer les finances publiques», affirme-t-il.
«Et Standard & Poor's l'a clairement écrit, la posture du gouvernement du Québec, oui, on a anticipé la guerre commerciale, mais peut-être d'une manière un peu naïve. Ça pourrait faire plus mal que ce qui est écrit dans le budget. Donc, la situation québécoise pourrait se détériorer davantage si M. Trump continue à aller de l'avant avec ces différentes mesures», ajoute l’économiste.
Le Québec doit dans un premier temps reconnaître qu’il se trouve dans une position de vulnérabilité et prendre ses décisions en conséquence.
«Les convictions, c'est toujours facile à dire, mais quand on vit au-dessus de ses moyens, peut-être des fois, il va y avoir des convictions un petit peu moins ambitieuses», soutient M. Gosselin.
Pour voir l'entrevue complète, visionnez la vidéo ci-haut.