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L'article provient de Le Journal de Montréal
Justice et faits divers

Procès de Charles Lassonde: le jury a reçu les directives et est maintenant séquestré

Capture d'écran / LCN
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Guillaume Cotnoir-Lacroix

2025-02-18T23:37:28Z
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Les 12 membres du jury restant au procès pour meurtre au premier degré de Charles Lassonde sont maintenant séquestrés et doivent désormais décider du sort de l’accusé. 

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Le Victoriavillois de 52 ans est accusé d’avoir tué la victime Serge Boutin dans la nuit du 6 au 7 juillet, à Danville.

Ce mardi matin, un dernier membre du jury avait été renvoyé chez lui, pour ramener le nombre de jurés à 12, le nombre habituel pour les délibérations.

Le juge Claude Villeneuve leur a lu 134 pages de directives pour les guider dans leurs délibérations.

«Votre responsabilité est lourde et ne doit pas être prise à la légère», a lancé d’entrée de jeu le juge des faits, lors de la lecture de ses directives.

Il a rappelé aux citoyens que le verdict devait être unanime.

Il a aussi rappelé les deux règles qui découlent de la présomption d’innocence, soit que la Couronne a le fardeau de prouver la culpabilité de l’accusé et que la culpabilité doit être prouvée hors de tout doute raisonnable.

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Le juge a aussi présenté un arbre décisionnel aux membres du jury. Bien que différents chemins puissent être empruntés par les jurés pour s’y rendre, quatre scénarios sont possibles: 

  • Coupable de meurtre au premier degré 
  • Non coupable de meurtre au premier degré mais coupable de meurtre au deuxième degré 
  • Non coupable de meurtre au premier degré mais coupable d’homicide involontaire coupable 
  • Non coupable  

Le juge a présenté au jury pendant de longues minutes les deux versions « contradictoires » des événements de la nuit du 6 au 7 juillet 2021. Rappelons que l’ex-conjointe de l’accusé, Lana Dubois, a témoigné que la victime avait été enterrée vivante dans une carrière.

Selon la version de l’accusé, la victime aurait bel et bien été enterrée, mais alors qu’elle était déjà morte, assommée par une roche lancée par Lana Dubois.

Le juge a aussi évoqué la crédibilité de la témoin principale de la Couronne, Mme Dubois.

«Dubois a commis des infractions toute sa vie et elle pourrait notamment avoir un intérêt dans l’issue de cette affaire en raison du contrat de témoin collaborateur conclu avec l’État qui lui confère certains avantages en échange de sa collaboration. Elle peut aussi vouloir minimiser sa participation en lien avec la mort de Boutin», écrit le juge dans ses directives.

Quant au témoignage de Charles Lassonde, le juge a indiqué au jury «qu’iI vous appartient de décider jusqu’à quel point vous le croyez, ou non, lorsqu’il vous livre son témoignage».

Ce que le jury ne sait pas

Le jury composé de 12 citoyens étant maintenant séquestré, les médias sont autorisés à diffuser les discussions qui se sont déroulées tout au long du procès sans la présence des membres du jury.

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Un membre du jury exclu parce qu’il... dormait

Au début du procès, 14 citoyens ont été sélectionnés pour faire partie du jury. Dès les premières journées, l’un d’eux a semblé somnoler en pleine salle d’audiences à quelques reprises.

Les avocats de la Couronne, de la défense, le juge Claude Villeneuve, les employés de la cour et même les membres des médias ont noté la situation, qui pouvait poser problème dans le contexte où le jury doit prendre connaissance de toute la preuve pour finalement rendre sa décision.

Après un peu plus d’une semaine de procès, ce membre du jury a été convoqué seul en salle de cour et le juge Villeneuve lui a carrément demandé s’il avait dormi pendant les audiences. Il a d’abord hésité, avant de finalement insister pour dire qu’il était resté éveillé tout au long des témoignages et qu’il n’avait rien manqué de la preuve.

Le juge s’est satisfait de cette réponse et le juré a pu retourner avec ses homologues. Toutefois, la Couronne et la défense se sont entendues quelques minutes plus tard pour demander l’exclusion du citoyen.

Le juge a acquiescé à leur demande et a renvoyé le juré #3 chez lui. Les 13 membres restant du jury sont revenus en salle de cour par la suite et non pas été informés des motifs de l’exclusion de leur confrère.

Une requête Jordan rejetée

La défense menée par Me Martin Latour et Me Camille Blanchette-Sinotte a tenté de faire acquitter Charles Lassonde en invoquant des délais déraisonnables pour les procédures judiciaires, mieux connue sous le nom de requête Jordan.

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La requête a été plaidée en décembre 2024 en ouverture de procès mais a été rejetée par le juge Claude Villeneuve. Le jury n’était pas au courant de cette information.

La loi prévoit effectivement dans un cas comme celui de Charles Lassonde que le procès doive se tenir dans un délai de 30 mois suivant le dépôt des accusations. M. Lassonde a effectivement été accusé en août 2021 et le procès s’est finalement ouvert en janvier 2025.

Le juge a toutefois rejeté les arguments de la défense qui invoquait notamment une « stratégie nébuleuse employée par le Poursuivant » et la « divulgation tardive de nouveaux éléments de preuve ».

«Même en faisant abstraction de certains délais occasionnés par la défense, les circonstances exceptionnelles reliées aux aveux tardifs de [Lana] Dubois et à la découverte de nouveaux éléments de preuve ont rendu impossible la tenue du procès à l’intérieur du plafond de 30 mois malgré tous les efforts déployés par la Cour et le Poursuivant », a écrit le juge Villeneuve dans sa décision datée du 23 décembre 2024.

Le juge refuse d’admettre en preuve des lettres de Charles Lassonde à Lana Dubois

Au cours du procès, la défense de Charles Lassonde a présenté des lettres d’amour écrites par Lana Dubois à partir de la prison et dirigées à l’accusé Lassonde. Ces lettres permettent de comprendre que Lana Dubois aimait « follement » Charles Lassonde après la disparition de Serge Boutin.

«J’te demande de me pardonner pour tout les souffrances infligé, lit-on. J’ai pourtant tellement d’amour pour toi seul [...] Nous somme et étions tellement faite l’un pour l’autre», écrivait Lana Dubois à Charles Lassonde dans un français approximatif, en janvier 2022.

La Couronne a tenté de faire de même et de produire en preuve les lettres écrites par Charles Lassonde à Lana Dubois en prison. Dans ce cas, toutefois, le juge Villeneuve a refusé de les admettre.

En effet, la Couronne n’a pas été en mesure de faire la preuve hors de tout doute raisonnable que les lettres avaient été écrites par l’accusé, par exemple en présentant une expertise en écriture. Le juge a donc refusé qu’elles soient présentées aux membres du jury.

Les membres du jury ne peuvent parler à leurs proches et n’ont plus accès à leur téléphone cellulaire pendant la durée de la séquestration.

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