Procès pour meurtre: la Couronne ne contre-interrogera pas Charles Lassonde
Guillaume Cotnoir-Lacroix
Coup de théâtre au procès pour meurtre au premier degré de Charles Lassonde: la procureure aux poursuites criminelles et pénales Stéphanie Landry a annoncé aux 13 jurés jeudi matin qu’elle n’avait pas de question à poser à l’accusé en contre-interrogatoire.
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Quelques instants auparavant, le juge annonçait aux jurés qu’ils allaient maintenant entendre le contre-interrogatoire de Charles Lassonde.
«La Couronne n’a aucune question à poser à l’accusé», a toutefois lancé d’entrée de jeu Me Landry, causant la stupéfaction dans la salle de cour et même une certaine surprise dans le visage du juge Claude Villeneuve.
La défense a de son côté indiqué au jury qu’elle ne fera pas entendre d’autres témoins, et donc la preuve est maintenant close des deux côtés.
Hier, lorsqu’interrogé par son avocat Martin Latour, Charles Lassonde a rejeté le blâme sur son ex-conjointe Lana Dubois pour expliquer le décès de Serge Boutin. Selon sa version, il croyait faire peur à la victime en versant de la terre sur lui dans une carrière de Danville dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021.
«On fait juste lui faire peur. Jamais il n’a été question de l’enterrer vivant ou peu importe», a témoigné Lassonde mercredi.
Selon son récit, Lana Dubois aurait toutefois empoigné une roche au sol à un certain moment. «Je suis en train de pelleter. [...] Je vois que madame, elle a une roche dans les mains, elle lui lance de même, drette sur la tête», a témoigné Charles Lassonde mercredi. Il aurait ensuite réalisé que la victime était décédée sur le coup.
Dans son contre-interrogatoire il y a deux semaines, Lana Dubois a toutefois nié catégoriquement avoir balancé une roche sur la victime.
En entrevue après l’audience, la procureure Landry a préféré réserver ses commentaires sur cette décision, pour l’instant. «La poursuite a fait le choix de ne pas contre-interroger M. Lassonde et donc la preuve est close de part et d’autre. Il y a des raisons derrière ce choix-là qui seront expliquées lors des plaidoiries», a-t-elle expliqué aux membres des médias.
Si la Couronne a fait le choix de ne pas poser de questions à l’accusé, les 13 membres du jury, eux, auraient souhaité pouvoir lui en poser. Le juge Claude Villeneuve a toutefois refusé leur demande de poser cinq questions à l’accusé. Il a rappelé au jury les directives qu’il leur avait données au début du procès.
«Il ne vous appartient pas de mener le procès. Vous devez examiner la preuve qui est présentée et non décidée des questions à poser aux témoins ou de la manière dont elles devraient être posées», a-t-il lancé. Il a néanmoins rappelé que les jurés pouvaient poser des questions pour éclaircir certains points.
Le jury aurait notamment voulu demander à Lassonde «pourquoi il n’a pas parlé ou collaboré avec la police», selon le juge Villeneuve. «Ça touche une question fondamentale, je l’ai expliqué dès le début du procès : le droit au silence», a tranché le juge. «Une personne a le droit de ne pas parler. Il ne faut pas tirer d’inférence négative de quelque façon que ce soit du fait qu’une personne a décidé de ne pas parler, de ne pas dire quoi que ce soit, de ne pas donner sa version des faits», a-t-il continué.
«Les questions que vous posez, ce ne sont pas des questions d’éclaircissement. Ça va beaucoup plus loin. Vous posez des questions que soit la Couronne a décidé de ne pas poser pour des raisons qui lui appartiennent, ou que la défense a décidé de ne pas poser pour des raisons qui leur appartiennent aussi», a dit le juge Claude Villeneuve.
«La série de questions que vous voulez poser touche plusieurs sujets, qui soit visent à tester la crédibilité de M. Lassonde. Ce n’est pas votre rôle», a-t-il expliqué au jury.
«Je comprends pourquoi vous posez des questions, mais je ne peux pas les permettre», a poursuivi le juge.
Le jury sera en pause pour plusieurs jours, alors que le juge Villeneuve prépare ses directives en vue des délibérations, avec la collaboration de la Couronne et de la défense. Les 13 jurés ont pour l’instant la consigne de revenir au palais de justice le 17 janvier et devraient entendre les plaidoiries des deux parties le lendemain.