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Doit-on arrêter d’écouter les «véloanxieux», ces «faux experts» qui critiquent les pistes cyclables?

Courtoisie d'Équiterre, Photomontage Benoit Dussault
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Photo portrait de Sarah-Florence  Benjamin

Sarah-Florence Benjamin

2025-06-16T11:00:00Z
2025-06-16T18:57:17Z
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Qu’ont en commun Olivier Primeau, Loïc Tassé, Sam Hamad et Lino Zambito? Ils sont décrits comme des «véloanxieux» par Équiterre. L’organisme environnemental déplore que ces personnalités soient présentées comme des experts en mobilité dans les médias.

«Il y a des gens qui ont beaucoup d’influence, parce qu’ils sont célèbres, mais dont les opinions devraient être traitées comme une autre. On leur donne de la valeur parce qu’ils sont connus», affirme le directeur des affaires gouvernementales d’Équiterre, Marc-André Viau.

Dans un texte publié le 10 juin dernier, il s'intéresse aux «véloanxieux», ces personnalités publiques qui, selon lui, ont «l’épiderme très sensible à la vue d’une piste cyclable». 

Et qui sont-ils, ces «véloanxieux», selon lui? 

L’homme d’affaires Olivier Primeau, décrit par Équiterre comme un «propriétaire de club de plage qui vend des poutines congelées», ou encore le chroniqueur du Journal Loïc Tassé.

Dans une chronique publiée récemment dans Le Journal, M. Tassé déplorait que «les pistes cyclables ont rétréci de moitié l’espace pour circuler en voiture et en camion sur de nombreuses artères vitales» du centre-ville de Montréal.

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Aux yeux de Marc-André Viau, de telles opinions, qui ne s'appuient sur aucune donnée, «ne doit pas se substituer l’expertise, ni la dénigrer».

Il rappelle au passage qu’à peine 1,3% de la voirie de Montréal est réservée aux pistes cyclables et que «le facteur principal de la congestion automobile, c’est le nombre de voitures en même temps à un endroit donné».

Marc-André Viau
Marc-André Viau Photo courtoisie, Équiterre

«Culture du ressenti»

Marc-André Viau le reconnaît néanmoins: être coincé dans le trafic, c’est fâcheux et c’est un problème.

Or, l’expérience d’un automobiliste pris dans un bouchon de circulation ne devrait pas dicter la manière dont les villes sont aménagées.

Pourtant, même chez nos politiciens, l’expérience des automobilistes se substitue aux faits, regrette le directeur des affaires gouvernementales d’Équiterre. 

Il cite le député caquiste Samuel Poulin qui a dit «qu’on a trop été à l’écoute, à un moment donné, des gens qui avaient des données» à propos du troisième lien. 

Ce que prône M. Viau, ce sont «des conversations intelligentes sur l’aménagement urbain qui prennent en compte la réalité de tout le monde et qui ne sont pas basées uniquement sur le ressenti».

Les médias aussi coupables

Il n’y a pas que les automobilistes fâchés qui contribuent au discours anti-vélo.

Les médias accordent également trop de place à l’opinion, notamment lorsqu’il est question de mobilité, déplore le professeur titulaire au département d’études urbaines et touristiques de l’UQAM, Ugo Lachapelle.

«Les auteurs de ces articles et billets gageraient à avoir un regard critique sur l’ensemble des gens en déplacement dans la ville. On sait, par exemple, de façon très factuelle que dans la région de Montréal, plus de gens font plus de déplacements, dans de plus grosses voitures et de plus en plus en solo», martèle le professeur.

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Il rappelle que «la liberté d’opinion et d’expression n’est pas une raison pour véhiculer des faits erronés».

Ugo Lachapelle insiste d’ailleurs: les médias ont un biais lorsqu’ils parlent de mobilité. C’est ce que révèle une étude publiée dans le Canadian Journal of Urban Research dont il est le co-auteur.

Les systèmes de mobilité non motorisés comme BIXI ont généralement droit à une couverture plus négative que les systèmes motorisés comme Communauto et Car2Go, remarque le chercheur.

Et même si les voitures en autopartage «volent» des espaces de stationnement aux propriétaires de voitures, elles sont considérées comme plus légitimes d’occuper l’espace public, contrairement aux pistes cyclables, notamment.

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