Il n’y a pas trop de pistes cyclables à Montréal, il y a trop de voitures!


Andrea Lubeck
Chaque été, des automobilistes se plaignent de la place de plus en plus grande qu’occupent les pistes cyclables sur la voie publique et accusent les vélos d'alourdir la circulation. Ont-ils raison?
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Dans une chronique publiée jeudi dans le Journal, Loïc Tassé dénonce la place prépondérante des pistes cyclables sur des «artères vitales» du centre-ville de Montréal.
Selon le chroniqueur, il faudrait «des dizaines de minutes de plus» pour se déplacer à cause de l’aménagement de pistes cyclables, qui aurait réduit de moitié l'espace pour circuler en voiture et en camion sur certaines rues.
«Il est complètement à côté de la plaque. C’est de la désinformation», affirme Blaise Rémillard, directeur général par intérim du Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-Montréal).
«Ceux qui n’utilisent pas les pistes cyclables en sont des bénéficiaires indirects», insiste pour sa part Catherine Morency, titulaire de la Chaire Mobilité de Polytechnique Montréal.
«Plus il y a de gens à vélo, mieux ça va pour tout le monde. Le cycliste prend nettement moins d’espace qu’un véhicule de plus sur la route.»
Moins de 2% de la voirie
Les espaces réservés aux cyclistes représentent que 1,3% de toute la voie publique sur l’ensemble du territoire, révèlent des données de 2018 de la Chaire Mobilité.
Cette proportion grimpe à 73,8% pour la circulation automobile.
Dans l’arrondissement de Ville-Marie, qui comprend le centre-ville, on parle plutôt de 1,5% de la voie consacré aux vélos, contre 66,1% pour les véhicules.
Et même si le nombre de kilomètres de pistes cyclables a augmenté depuis 2018 à Montréal, notamment avec l’aménagement du Réseau express vélo (REV), leur proportion est loin d’atteindre les 50% de la voirie.
On est à 2% tout au plus, estime Blaise Rémillard.
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«Pourquoi est-ce essentiel que 100% des rues soient accessibles à l’auto, mais dès que tu prends deux rues et que tu mets du vélo, les gens s’énervent?», questionne Catherine Morency.
Des accusations sans fondement
Les deux experts s’entendent: les coupables de la congestion routière ne sont pas les cyclistes, mais bien les automobilistes eux-mêmes.
D’année en année, le nombre de véhicules augmente effectivement à Montréal, tout comme leur taille.
Selon les plus récentes données, on dénombrait 811 815 voitures et camions légers en circulation dans l’agglomération de Montréal en 2020, soit 42 662 de plus qu’en 2015.
Entre 2013 et 2021, la masse des véhicules a également augmenté de 5,6%, selon une évaluation de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal.
Résultat: il manque de place.
«Ça ne rentre pas! Si tout le monde voulait aller au centre-ville de Montréal en auto, ça ne rentre pas. On aurait beau paver le Saint-Laurent, à un moment donné, ça ne rentre pas. Il y a trop de voitures et elles sont devenues trop grosses. Il y a une contrainte de capacité», déplore Catherine Morency.
C’est sans compter les chantiers d’entretien du réseau routier, qui compliquent les déplacements de tout le monde pendant l’été, souligne Blaise Rémillard.
La popularité du vélo à la hausse
Selon la plus récente enquête Perspectives mobilité de l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), 11% des déplacements dans le centre de la ville se sont faits à vélo en 2021, près du double par rapport à 2018.
Chaque année, le REV Saint-Denis et le service de vélopartage BIXI battent également des records de déplacements.