«Je suis née gelée»: on a jasé avec Gaby Gatineau, une ex-toxicomane devenue humoriste


Mathieu Carbasse
Certains la connaissent pour les vidéos humoristiques qu’elle partage sur TikTok, d’autres pour les conférences qu’elle donne sur son passé de drug addict. D’autres encore l’ont déjà vue sur scène travailler des jokes pour son premier spectacle en construction. Mais derrière ces multiples casquettes, il y a un passé cabossé. On est allé prendre un café avec Gaby Gatineau pour qu’elle nous raconte son histoire.
«Je suis née gelée»
Gaby Gatineau, de son vrai nom Gabrielle Garcia-Cournoyer, est née d’une mère allemande immigrante qui ne pouvait s’occuper d’elle.
«Ma mère a eu trois enfants. Elle a consommé pour les trois enfants qu’elle a eus. Elle consommait de la cocaïne, de l’héroïne et beaucoup d’alcool. Je suis littéralement née gelée, sous influence de la drogue. Je suis née en césarienne, parce que ma mère était trop intoxiquée quand elle est arrivée à l’hôpital au moment d’accoucher.»
Après une période de sevrage de deux mois, Gabrielle est placée définitivement dans une famille portugaise de Gatineau. Elle change de nom et se retrouve entourée de cinq sœurs.
• À lire aussi: La vraie histoire de Griselda Blanco, la première femme à la tête d’un cartel personnifiée par Sofia Vergara
La descente aux enfers
Ado difficile, elle commence à consommer à l’âge de 16 ans, de l’alcool, du cannabis, des pilules d’ecstasy, du speed et, finalement, de la cocaïne.
À 18 ans, ses parents la mettent à la porte, car elle refuse leur aide tout en se montrant de plus en plus violente envers eux.
«J’ai menacé de mort mes parents, j’étais devenue un danger pour eux, pour ma famille.»
S’en suivent plusieurs années d’itinérance cachée, de relations toxiques, de violence, de prostitution dissimulée sous sa dépendance à la coke. Elle prenait au moins 3 grammes par jour, pour se sentir bien.
«Je me suis mise en couple avec un gars qui m’a amené au plus bas. J’ai arrêté de travailler, vendu mes meubles et tout ce que je possédais. J’étais devenue dépendante de lui et de sa cocaïne. J’étais rendue à un point où si je n’avais pas ma cocaïne, je tremblais. Je ne mangeais plus, je ne dormais plus, je ne me lavais plus. Mes dents saignaient constamment.»
La lumière
Le 11 juillet 2016, c'est le jour qu’elle choisit pour en finir. Elle l’a d’ailleurs tatoué sur l’avant-bras.
«Ce jour-là, je me suis dit: c’est aujourd’hui que je vais mourir.»
Sa lettre de suicide est prête, son chum est en train de dormir. Elle va pouvoir partir tranquillement. Mais c’est là qu’elle voit une grande lumière.
«Même si j’ai grandi dans une famille portugaise québécoise très catholique, je n’ai jamais cru en Dieu. Pourtant, au moment où je m’en allais pour passer à l’acte, j’ai vu une grosse lumière et j’ai senti un grand amour me transpercer, me dire que je ne pouvais pas mourir, que ça ne valait pas la peine, que j’avais une plus grande destinée.»
Gaby quitte alors son chum et part chercher de l’aide... auprès de ses parents. Elle part en cure de desintox, «la période la pire de sa vie». «J’ai eu mal partout pendant des jours», se souvient-elle.
Humoriste sur Tik Tok...
Après sa tentative de suicide, Gaby réapprend à vivre, à gérer son argent, ses affaires, sa maison. Elle reprend sa carrière de massothérapeute, un métier qu’elle exerce encore aujourd’hui.
Et puis arrive la pandémie en 2021. Autour d’elle, elle constate que tout le monde déprimé. Elle décide donc de lancer un compte parodique sur TikTok. Son compte dépasse aujourd'hui les 50 k abonnés.
... et conférencière
Avec son deuxième compte TikTok, Gaby Gatineau sensibilise les jeunes sur les dangers de la drogue en parlant de son histoire.
Conseillère et conférencière pour Jeunesse sans Drogue, Gaby donne depuis 2 ans des conférences dans des écoles secondaires, des cégeps, des centres jeunesse et des centres de rétablissement.
«Je parle aux jeunes de la drogue, de mon passé, de comment je m’en suis sortie. Je leur explique l’importance d'aller chercher de l’aide. La maladie de la dépendance est très sournoise, on se pense tout le temps en contrôle mais quand on se rend compte qu’on perd le contrôle, il est trop tard.»
Premiers pas sur scène
Sous les conseils de l’humoriste Renzel Dashington, Gaby Gatineau a commencé il y a quelques années à écrire des jokes et un premier 5 minutes qu’elle livre sur scène. Elle travaille actuellement sur du nouveau matériel, inspiré de sa propre histoire!
«L’humour, c’est ça qui m’a aidée à passer au travers. C’est grâce à l’humour que j’ai réussi à me sortir de mes périodes les plus sombres. Aujourd'hui, je dédramatise, je fais beaucoup d’autodérision pour déconstruire le stigma concernant les dépendances. Quand j’étais dans la rue, je mangeais dans les poubelles. Aujourd’hui, je suis capable d’en rire», explique celle qui pourrait bientôt assurer la première partie d’un artiste connu.