«On a développé une réputation de mauvaise mobilisation»: malgré des visites syndicales, des chantiers de construction résidentiels actifs à Québec


Jean-Philippe Guilbault
Des chantiers de construction résidentiels roulaient toujours à plein régime dans la région de Québec malgré la grève générale illimitée suscitant l’exaspération de certains syndiqués voulant mobiliser leurs membres.
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Le Journal a notamment suivi une «visite de sensibilisation» syndicale sur un chantier du secteur de Beauport jeudi matin.
Sur la rue aménagée pour un nouvel ensemble résidentiel, la machinerie roulait comme si de rien n’était et plusieurs ouvriers étaient à l’œuvre malgré les appels à abandonner les chantiers.

«On a développé une réputation de mauvaise mobilisation», lâche Jean (nom fictif) rencontré sur ce chantier. Il ne souhaite pas être identifié puisqu’il n’est pas autorisé à parler publiquement.
Le charpentier-menuisier juge que le secteur résidentiel fait mauvaise figure en comparaison aux autres secteurs de la construction qui ont déjà conclu de nouvelles ententes de travail.
«Lors des dernières grèves multisectorielles en 2013 et en 2017, ça chialait déjà dans les autres secteurs qu’on n’était pas mobilisés», raconte celui qui travaille depuis une vingtaine d’années dans la construction résidentielle.
Il ne s’étonne donc pas de voir plusieurs de ses confrères rester sur les chantiers malgré les appels à la grève des syndicats. Il dit même «comprendre les petits jeunes d’avoir cette loyauté envers leurs employeurs» en raison de leur précarité économique.
«Mais s’ils sont là aujourd’hui, c’est entre autres à cause des meilleures conditions qu’on a réussi à gagner par le passé», fait-il valoir.
La visite syndicale à laquelle a assisté Le Journal s’est déroulée dans le calme et avec la présence de policiers du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ).
«Faut être capables de continuer à vivre»
Encore jeudi, Le Journal a pu s’entretenir brièvement avec plusieurs de ces travailleurs de la construction qui préféraient travailler que de faire valoir leur droit de grève.
«Le coût de la vie est assez cher. J’ai quatre filles donc avec toute la famille, ce n’est pas toujours évident, explique Alexandre Jobin, un autre charpentier-menuisier membre de la CSN et rencontré sur un autre site à Québec. La plupart du monde sur le chantier ici va vous dire la même chose...»
De son côté, le couvreur Marc (nom fictif) se dit solidaire des revendications syndicales pour un meilleur salaire. Il était toutefois au boulot et ne pouvait pas, selon lui, se priver de son salaire.
«Avec tous nos paiements, c’est plus dur [de ne pas travailler], note-t-il. Je suis pour toutes les raisons de la grève, mais ce n’est pas assez payant. Il faut être capable de continuer à vivre pareil!»
Si plusieurs chantiers étaient bien actifs à Québec, la rue d’un développement résidentiel où travaillait Marc était beaucoup plus tranquille et s’était «complètement vidée» depuis le début de la grève générale illimitée.