«Occupation Double»: une arme (insoupçonnée) contre la manipulation


Andrea Lubeck
Gaslighting, faux dilemme, chantage émotionnel: les candidats d’OD Chypre utilisent plusieurs tactiques de manipulation pour progresser dans le jeu. Et si on utilisait ces moments de télé pour éviter d’être pris soi-même au piège?
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Gaslighting
Il y a d’abord eu le gaslighting (décervelage) qu’Arnaud a employé contre Naomi. Cette tactique de manipulation consiste à déformer la réalité pour que la victime doute d’elle-même et de sa perception d’une situation.
En racontant son voyage aux autres candidats masculins, Arnaud a choisi d’omettre des détails des conversations qu’il a eues avec Naomi. L’objectif: la dépeindre comme une joueuse stratégique, ce qui est considéré comme l’un des péchés capitaux à OD.
Ce qu’il n’a pas dit, c’est qu’il avait les mêmes ambitions que Naomi et qu’il usait autant — sinon plus — de stratégie qu’elle. Cette situation a mené à l’élimination de la candidate de Blainville quelques jours plus tard.
Après l’avoir éliminée, Arnaud lui a répété qu’elle aurait dû calmer ses ardeurs stratégiques, même s’il les avait encouragées lors d’une discussion.
Chantage, faux dilemme et déresponsabilisation
Plus tard dans l’aventure, le candidat Sébastien a fait preuve de chantage émotionnel, de faux dilemme et de déresponsabilisation envers Béatrice lorsque la paire a dû mettre un autre candidat (Maxime) en danger.
«Ça va être à toi de prendre une décision pis une direction [...] Techniquement, ça va être entre moi ou Max», lui a-t-il notamment dit.
Un faux dilemme, c’est lorsqu’on présente seulement deux solutions à un problème, alors que plusieurs autres existent. Ici, Sébastien a exclu d’emblée certains candidats qui auraient pu être désavantagés en fonction de ses propres intérêts. Selon lui, donc, seuls lui et Maxime pouvaient être mis en danger. Or, comme il était immunisé, ça ne laissait que Maxime comme candidat éligible au désavantage.
Utiliser OD
La psychologue Geneviève Beaulieu-Pelletier juge que de voir ces tactiques de manipulation à l’écran peut être positif pour les téléspectateurs.
D’une part, ça permet d’être témoin de comportements qu’une personne n’a peut-être jamais observés.
Ça donne aussi l’occasion de voir à l’œuvre des mécanismes qu’une personne vit dans ses relations amoureuses, amicales ou même au travail et de les nommer.
«On réfléchit ensemble, collectivement, à ce qui est acceptable, à ce qui ne l’est pas, à ce qui est de la manipulation et à ce qui ne l’est pas», fait-elle valoir.

Mais encore faut-il reconnaître la manipulation lorsqu’on la voit.
«Si je ne fais que regarder ça, sans me rendre compte que c’est de la manipulation, il y a un risque que ça devienne un modèle de ce que c’est d’être en relation avec les autres», précise la psychologue.
Suggestion: la production d’OD pourrait identifier et analyser les comportements des candidats qui utilisent la manipulation à son émission Les vendredis OD, lors de laquelle un panel revient sur les épisodes de la semaine.
Pourquoi on manipule autant à OD?
À OD, les candidats «se basent quand même sur leur façon habituelle d’agir», soutient Geneviève Beaulieu-Pelletier.
«On prend des comportements humains et on les met à l’écran. Si j’ai l’habitude d’utiliser des stratégies manipulatoires dans ma vie quotidienne, c’est très difficile de ne pas les utiliser», explique-t-elle.
Elle insiste d’ailleurs: la manipulation est une stratégie défensive et les personnes qui l’utilisent ne le font pas nécessairement consciemment.
«C’est notre façon qu’on a d’approcher la réalité, les relations avec les autres, de faire face à nos émotions et qu’on se défend sans trop s’en rendre compte en utilisant l’autre, en manipulant l’autre», ajoute la psychologue.
Quoi faire si on subit de la manipulation?
Si on croit être pris dans une relation dans laquelle il pourrait y avoir de la manipulation, la première chose à faire est de prendre un pas de recul pour mieux comprendre la dynamique, propose Geneviève Beaulieu-Pelletier.
Ensuite, on peut établir ses limites, voire mettre fin à la relation.
Pour sortir d’une telle relation, un travail de «reconstruction de soi» peut toutefois être nécessaire, «parce que l’estime peut être rendue dans le tapis», note la psychologue.