Non, le Tylenol ne cause pas l’autisme, comme le prétend Trump


Anne-Sophie Poiré
L’administration Trump s’était engagée, il y a cinq mois, à trouver la cause de l’autisme d'ici septembre. Chose promise, chose due. La Maison-Blanche a affirmé lundi que l'utilisation de l'acétaminophène pendant la grossesse serait «un facteur très important» dans l'augmentation du risque de la condition chez les enfants. Cette théorie est pourtant rejetée par la communauté scientifique qui étudie l’autisme depuis des décennies.
• À lire aussi: Fin de l’obligation vaccinale: comment la Floride pourrait foutre le trouble jusqu’au Québec
«Il n’y a absolument aucune étude sérieuse qui démontre que la consommation d’acétaminophène [Tylenol] à n’importe quel trimestre de la grossesse est un déclencheur de l’autisme. Au contraire», lance la directrice générale de la Fédération québécoise de l'autisme (FQA), Lili Plourde.
L’an dernier, une vaste enquête suédoise publiée dans le Journal of the American Medical Association (JAMA) a démontré l’absence totale de relation entre la prise du médicament analgésique durant la grossesse et la condition neurodéveloppementale.
Les recherches ont été menées sur près de 200 000 enfants nés en Suède entre juillet 1995 et décembre 2019.
Et si certaines études sur des échantillons de petite taille ont déjà démontré le contraire, soulignent les chercheurs, les «associations fallacieuses» entre l’acétaminophène et l’autisme seraient plutôt attribuables «à des facteurs de confusion».
Le professeur et titulaire de la chaire de recherche en autisme M&R Gosselin à l’Université de Montréal, Laurent Mottron, rappelle que la condition est «familiale» et non déclenchée par la consommation de quelconques produits.
Environ 1% des enfants sont atteints d’autisme sur la planète.
Trump en guerre contre l’autisme
L’administration de Donald Trump fait fi des connaissances scientifiques sur ce trouble neurodéveloppemental, qui n'a d’ailleurs pas de cause unique.
«Je crois que nous avons trouvé une réponse à l’autisme», a affirmé le président des États-Unis dimanche lors de la cérémonie commémorative en l’honneur de Charlie Kirk.
Lundi, il a fortement déconseillé aux femmes enceintes américaines d'en prendre.
«On est à un tel point d’ignorance et de malhonnêteté intellectuelle que ça dépasse un peu l’entendement», dénonce le Dr Mottron.

Il faut dire que le temps presse pour le secrétaire américain à la Santé, Robert F. Kennedy Jr, qui s’est engagé en avril à trouver la cause l'«épidémie d'autisme» d'ici le mois de septembre.
«Il a promis de trouver la cause de cette condition en cinq mois, alors que ça fait des décennies que des chercheurs se penchent sur la question et ça n’a toujours pas été déterminé», signale la directrice générale de la Fédération québécoise de l'autisme (FQA), Lili Plourde.
«Trump a décidé qu’il y avait trop de personnes autistes et son but est de diminuer les chiffres», ajoute-t-elle.
Les diagnostics d’autisme ont quintuplé depuis 25 ans aux États-Unis, selon le New York Times. En 2020, le taux chez les enfants de 8 ans a atteint 2,77%, selon les Centres américains pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC).
«Il y a plus de diagnostics en grande partie parce qu'on comprend mieux les caractéristiques de l’autisme. Les évaluations sont plus pointues et on sait mieux comment le dépister», fait valoir Mme Plourde.
Danger pour la santé des femmes
Après avoir promu des théories réfutées suggérant que l'autisme est lié aux vaccins, Robert F. Kennedy Jr. pointe désormais l'acétaminophène.
«C’est grave, parce que les femmes enceintes n’ont pas accès à beaucoup de médicaments. Cette déclaration pourrait avoir des conséquences sur leur santé, déjà que le taux de mortalité infantile est plus élevé aux États-Unis qu’au Canada», mentionne Lili Plourde.
• À lire aussi: 6 fois où Donald Trump a attaqué les médias (avant la suspension de Jimmy Kimmel)
Elle rappelle que l’acétaminophène est l’analgésique le plus recommandé pour soulager la douleur et la fièvre pendant la grossesse. L’ibuprofène (Advil) est quant à lui déconseillé.
La Société des obstétriciens et gynécologues du Canada (SOGC) a d’ailleurs réitéré le 12 septembre dernier que le médicament «reste une option de première intention sûre et appropriée pour traiter la fièvre et la douleur pendant la grossesse».
Elle dément tout lien de causalité avec certains troubles neurodéveloppementaux.