Menaces tarifaires de 31% : la Suisse tente de négocier avec les États-Unis

AFP
La Suisse va tenter une nouvelle fois vendredi de convaincre ses partenaires américains de ne pas plomber ses exportations avec les droits de douane punitifs promis par Donald Trump, qui auraient de sérieuses conséquences sur l'activité économique et l'emploi.
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L'occasion est rêvée : le Secrétaire américain au Trésor Scott Bessent doit venir à Genève pour y rencontrer le vice-premier ministre chinois He Lifeng et tenter de refroidir la guerre commerciale déclenchée par Donald Trump.
La présidente de la Confédération Karin Keller-Sutter, qui est également ministre des Finances, et le ministre de l'Économie Guy Parmelin vont rencontrer M. Bessent ainsi que le représentant au commerce Jamieson Greer dans un grand hôtel de la ville.
Peu de détails ont filtré jusqu'à présent sur ces discussions, mais une conférence de presse des Suisses est prévue en fin d'après-midi.
Auparavant, Mme Keller-Sutter aura aussi rencontré le vice-premier ministre chinois.
Les responsables suisses et américains se sont déjà rencontrés à la fin du mois d'avril à Washington pour tenter de négocier à la baisse les droits de douane qui, s'ils étaient mis en œuvre, risquent de pénaliser lourdement plusieurs pans de l'économie helvétique, dont l'industrie et l'horlogerie.
Au vu de son excédent commercial avec les États-Unis, les Américains ont menacé de taxer à 31% les exportations suisses aux États-Unis.
Pour l'heure, l'épée de Damoclès reste en suspens — Donald Trump ayant décrété une pause sur ces droits de douane dits «réciproques» — et les biens suisses sont taxés de 10% au moins comme la plupart des autres pays du monde.
Sixième investisseur
En 2024, les exportations de marchandises de la Suisse vers les États-Unis se montaient à 52,65 milliards de francs suisses (56,31 milliards d'euros), les produits pharmaceutiques étant le plus gros poste d'exportation.
Les importations de marchandises venant des États-Unis se chiffraient à 14,13 milliards de francs, selon l'office fédéral de la douane.
Au regard de cet excédent et de la philosophie générale des droits punitifs exposée jeudi par le ministre américain du Commerce Howard Lutnick, les Suisses ne doivent donc pas se montrer trop optimistes.
Si les pays qui affichent un excédent commercial avec les États-Unis «ouvrent vraiment leur marché [aux produits américains], viennent nous voir en disant qu'ils veulent des échanges équitables et équilibrés avec l'Amérique, le mieux qu'ils puissent obtenir, c'est 10%, ce sera probablement plus élevé, mais au mieux c'est 10%», a expliqué M. Lutnick sur la chaîne CNBC.
Au lendemain de l'annonce américaine du 2 avril, le Conseil fédéral (gouvernement) avait rappelé que la Suisse était le sixième investisseur étranger aux États-Unis et occupait même la première place en matière de recherche et développement, la pharmacie étant un secteur clé de l'économie helvétique.
L'excédent commercial de la Suisse n'est pas dû à des «pratiques déloyales», avait insisté le gouvernement dans son communiqué, soulignant que tous les droits de douane industriels avaient été supprimés en janvier 2024 et que 99% des marchandises en provenance des États-Unis pouvaient entrer en Suisse franches de droits de douane.
Répercussions difficiles à quantifier
Le gouvernement suisse avait aussi rappelé que son excédent commercial s'expliquait surtout par le poids des produits pharmaceutiques, le premier secteur d'exportation du pays alpin.
Les répercussions des droits de douane américains pour l'économie suisse sont encore difficiles à quantifier dans la mesure où les produits pharmaceutiques n'étaient pas visés dans les mesures annoncées début avril, même si l'administration de Donald Trump souffle depuis le chaud et le froid sur ces produits.
De plus, les grandes entreprises suisses disposent pour beaucoup d'entre elles d'usines aux États-Unis, ce qui fait surtout peser les risques sur les PME.
Mais même les multinationales helvétiques fortement implantées aux États-Unis ne sont pas entièrement épargnées. Lors de la publication de ses ventes trimestrielles, le géant de l'agroalimentaire Nestlé a indiqué que ses dosettes de café Nespresso, fabriquées en Suisse, risquaient d'être touchées.
Face aux incertitudes concernant la pharmacie, les deux autres poids lourds de l'économie suisse, Novartis et Roche ont pris les devants.
Novartis a dit mi-avril augmenter ses investissements aux États-Unis de 23 milliards de dollars sur cinq ans, Roche annonçant peu après vouloir y investir 50 milliards de dollars, également sur cinq ans.