Marylène Pion dépeint le milieu de la mode à Montréal et le travail dans les usines de textile dans les années 1930
«La Chapelière»


Marie-France Bornais
Après s’être plongée dans l’univers des compagnies forestières dans Les héritiers de la Calder Wood, la romancière Marylène Pion invite ses fans à suivre le parcours d’une jeune femme travaillant chez une célèbre modiste montréalaise dans son nouveau livre, La Chapelière. On y fait la connaissance de Léa Casavant, une jeune femme qui, en dépit de nombreux obstacles, finir par se tailler une place enviable en confectionnant des chapeaux, dans les années 1930.

Comme bien des femmes de son âge dans l’entre-deux-guerres, Léa Casavant n’a pas la vie facile. Après la fermeture de la boutique familiale de vêtements, elle déménage dans un modeste logement.
Pour assurer sa subsistance, elle fait comme bien des femmes de l’époque: elle trouve un emploi dans une usine de textile. Pas de chance: elle se laisse séduire par un contremaître peu fiable, tombe enceinte, mais décide d’élever seule son enfant, dans des conditions précaires.
Les choses prennent une tournure plus positive lorsqu’elle trouve un emploi dans l’entreprise d’une modiste montréalaise très en vue, Yvette Brillon. Très vite, cette dernière reconnaît son talent et la charge de confectionner des chapeaux.
Léa réalise au fil du temps que le cœur d’un homme, le charmant Jack O’Reilly, bat pour elle... mais a du mal à surmonter les blessures du passé.
Une ère d’élégance
Marylène Pion s’est passionnée pour cette histoire qui plonge au cœur du milieu de la mode, à Montréal, dans les années 1930. Une époque où les dames portaient des vêtements élégants avec fierté et sortaient rarement sans chapeau.
«J’avais envie de raconter l’histoire d’Yvette Brillon, une vraie chapelière qui a vécu dans ces années-là. Mais je ne suis pas biographe et c’est toujours difficile de raconter l’histoire d’une vraie personne», commente Marylène Pion, en entrevue.
«Cette femme a été une pionnière dans le milieu de la mode à Montréal. C’est pour cette raison que j’ai créé un personnage fictif qui va aller travailler pour Mme Brillon. C’est un peu un hommage que je voulais rendre à Yvette Brillon, par mon récit. Dans les années 1930, elle avait une soixantaine d’employés.»
Travailler dans une usine
Avec Léa Casavant, elle a pu mettre de l’avant la condition féminine à l’époque, montrer ce qui se passait dans les usines de textile où les femmes travaillaient et dépeindre leur vie quotidienne pas toujours rose bonbon.
«J’ai une grand-mère qui a travaillé dans une manufacture de couture pour aider sa famille. Il y en a eu beaucoup, des femmes qui ont dû aller sur le marché du travail parce que leur mari n’était pas là ou ne pouvait pas travailler. Beaucoup de femmes ont pris cette voie-là. Léa veut se débrouiller et travaille fort.»
Une mode qui a disparu
Léa Casavant fait preuve de résilience et fait sa marque en créant des chapeaux remarquables – un symbole social à l’époque et un accessoire quasi incontournable. «Je me demandais pourquoi la mode des chapeaux est tombée à un moment donné. En faisant mes recherches, j’ai lu que ça avait un rapport avec la Révolution tranquille et les gens qui allaient de moins en moins à la messe.»
«C’est vraiment relié! Les femmes allaient à la messe pour parader avec leurs chapeaux. Elles avaient un nouveau chapeau pour la messe de minuit, pour Pâques...»
Marylène Pion a fouillé dans de vieux catalogues pour voir ce qui se faisait. «Les chapeaux de Mme Brillon étaient probablement plus dispendieux, du fait que c’étaient des créations uniques. Les gens allaient faire prendre leurs mesures. J’ai l’impression que les chapeaux créés chez une modiste, c’était un bien de luxe.»
La Chapelière
Marylène Pion
Les Éditeurs réunis
Environ 340 pages
- Marylène Pion a publié plusieurs séries à succès, dont Les infirmières de Notre-Dame, Le grand magasin et Les lumières du Ritz.
- Elle a aussi publié Les héritiers de la Calder Wood, publié simultanément en France et au Québec. Le deuxième tome sortira en novembre.
- Elle habite à Saint-Jean-sur-Richelieu.
«La sirène qui annonçait la fin du quart de travail retentit. Ce son tonitruant apportait son lot de soulagement pour les employées de la Dominion Textile. Les longues journées de près de douze heures, passées debout et sans pause véritable, étaient épuisantes pour les travailleuses. Le roulement des métiers imposait un rythme presque insoutenable tout au long de ces heures. C’est à peine si les ouvrières avaient le temps d’aller au cabinet de toilette, et elles avalaient rapidement un sandwich sans quitter leurs machines des yeux. Aucun arrêt n’était toléré, et la contremaîtresse se faisait un devoir de le rappeler à celles qui désobéissaient. Vitesse, vigilance et dextérité étaient essentielles au bon fonctionnement de l’usine.»
- Marylène Pion, La Chapelière, Les Éditeurs réunis
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