Les Villes réclament de nouvelles sources de financement en habitation

Félix Lacerte-Gauthier
Les maires des plus grandes villes du Québec réclament davantage de leviers afin de pouvoir agir en matière d’habitation. L’idée de taxer les spéculateurs immobiliers a été avancée comme solution possible.
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«Les villes doivent travailler ensemble afin de trouver des solutions et s’inspirer les unes des autres», a soutenu Catherine Fournier, mairesse de Longueuil.
Environ 400 personnes étaient réunies à Laval, vendredi, dans le cadre du Sommet de l’habitation coorganisé par Mme Fournier, ainsi que par le maire de Laval, Stéphane Boyer. L’événement a pour but de proposer des pistes de solution à la crise actuelle, qui secoue tant le secteur immobilier que locatif.
M. Boyer a évoqué à ce propos l’idée de taxer la spéculation foncière au cours de son allocution.
«Dans mon cours d’économie 101, on nous disait qu’on devait taxer les comportements indésirables. En habitation, le problème n’est pas tant ceux qui construisent. C’est plutôt ceux qui font de la spéculation foncière», a-t-il évoqué.
Il rappelle que la règlementation actuelle ne permet que de taxer «ce qui existe». Un terrain sous-utilisé ne sera ainsi taxé que sur la base de ce qui y est déjà, plutôt que sur son potentiel. En exemple, il mentionne les entreprises demandant des changements de zonage sur un terrain afin d’en faire augmenter la valeur.
«Laval était 100 000 habitants il y a 50 ans, on sera un million dans 50 ans, mais on fera la même taille. Les gens, connaissant cette réalité, s’accaparent d’un bout de l’île et attendent que les prix montent pour le revendre», a-t-il dénoncé.

La mairesse de Montréal, Valérie Plante, a également soutenu l’importance de sortir les villes de leur «dépendance» à la taxe foncière, de laquelle proviennent la majorité de leurs revenus.
Elle a d’ailleurs établi un lien entre la problématique de l’habitation et celle de la sécurité publique, qui est présentement au centre des préoccupations.
«Il n’y a pas une recette magique pour avoir des milieux de vie sécuritaire. La prévention, ça passe aussi par avoir un toit au-dessus de sa tête, et ça commence par avoir un milieu de vie intéressant et pouvoir se loger à un prix décent», a-t-elle soutenu.
Également présente, la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation, Andrée Laforest, a défendu son bilan au cours d’une courte allocution. Elle en a également profité pour manifester son intérêt pour conserver son poste actuel après les prochaines élections.
Du «concret»
Au terme du Sommet, chacune des dix plus grandes municipalités du Québec s’est engagée à mettre en place une action concrète, adaptée à sa réalité, avant les prochaines élections municipales.
«L’objectif c’est de mener les projets pilotes dans la prochaine année. Ce sont des projets qu’on part avec nos équipes. Dès lundi, on se met au travail», a promis Mme Fournier.
La Ville de Laval, par exemple, s’est engagée à mettre en place une taxe sur la spéculation foncière afin de financer ses initiatives en habitation. Trois-Rivières réalisera pour sa part un projet de vie communautaire pour les étudiants autochtones et leurs familles, alors que la Ville de Québec mettra en place un programme d’accès à la propriété pour les familles voulant faire l’acquisition d’une «habitation écologique».
«Stéphane [Boyer] et moi, on a toujours partagé le souhait que le Sommet ne se limite pas à un exercice de réflexion, mais que ça devienne plutôt le symbole d’un passage à l’action. Ce qui se passe aujourd’hui est de bon augure pour l’avenir», s’est enthousiasmée Mme Fournier.
Elle a également invité toutes les Villes qui le souhaitent à se joindre à leur initiative en adoptant, lors de leur conseil respectif, la Déclaration sur l’habitation et en proposant leurs idées.
À l’approche des élections provinciales, Mme Fournier admet que le message envers le prochain gouvernement est fort.
«Le poids politique est assez important, a-t-elle concédé. Ce qui est surtout intéressant, de nous voir tous rassemblés ici, c’est la collaboration qui s’est installée entre nous et qu’on choisisse de travailler ensemble. Ça n’a pas toujours été comme ça dans le monde municipal.»
Le Sommet avait été une promesse électorale de Mme Fournier et de M. Boyer lors de la dernière campagne électorale municipale.
L’accès au logement préoccupe les Québécois
Plus de quatre Québécois sur cinq estimeraient que l’accès au logement et à la propriété est un problème important, une situation qui préoccupe les acteurs du monde municipal.
La firme Mainstreet Research a d’ailleurs été mandatée pour sonder la population sur la situation, appelant un échantillon aléatoire de 3025 répondants à travers la province.
Une proportion de 48 % des répondants a avoué que l’accès au logement et à la propriété est un problème pour eux, personnellement. Et une autre proportion de 44 % a dû changer de façon importante ses habitudes de consommation, en raison des coûts liés au loyer ou au paiement hypothécaire.
«Le loyer qui augmente, ce que ça veut dire, c’est aussi moins d’argent pour aller au restaurant ou faire des voyages. Pour une famille à plus faibles revenus, ça peut forcer des choix, sur l’alimentation saine ou sur la possibilité d’inscrire des enfants à des activités», a donné en exemple M. Boyer, maire de Laval.
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