Les victimes de l’ancien pasteur Claude Guillot veulent réparation

Amélie Simard-Blouin | TVA Nouvelles
Une victime de l’ancien pasteur Claude Guillot, contre qui un recours collectif a été autorisé en début de semaine par la Cour d'appel, s’est confiée sur les abus qu’elle a vécus alors qu’elle n’était qu’un jeune enfant.
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«Je me souviens des barreaux dans la fenêtre [du sous-sol]. Je me souviens que je voyais un arbre au loin, un chêne, et je me souviens des mauvais traitements que j’ai subis là-bas», a témoigné le représentant des victimes, jeudi.
Claude Guillot aurait châtié physiquement près d’une cinquantaine d’enfants à Victoriaville, dans le Centre-du-Québec, et en aurait séquestré d’autres dans sa résidence de Québec.
Les événements de Victoriaville se seraient passés entre 1982 et 1984, au moment où Guillot était directeur de l’École la Bonne Semence. Une école dans le sous-sol de l’Église baptiste-évangélique, qui était par ailleurs non reconnue à l’époque.
En poste, l’ancien pasteur aurait frappé à plusieurs reprises des élèves en bas âge, en utilisant une palette en bois massif, a raconté une victime du recours collectif, qui a été brutalisée par l’homme alors qu’elle n’avait que quatre ans.
Le tout se serait fait sans cachette à l’Église, qui n’a par le fait même, jamais dénoncé les actions de Guillot. Elle aurait même fait la promotion des châtiments physiques et les parents auraient tous été invités à signer une autorisation pour permettre au personnel de corriger les enfants de cette manière.
«On me disait que c’était moi le problème, que “c’est de ta faute si tu subis ces choses-là. C’est toi qui es un monstre incroyable et t’as juste eu ce que tu méritais”», a raconté la victime, éprise d’émotions douloureuses de son passé.
Exclusion
En 1984, l’ancien directeur a été démis de ses fonctions par le pasteur de l’église à l’époque, Guillaume Cotnoir. Guillot aurait été congédié pour avoir été excessif dans sa manière de punir. Par la suite, M. Cotnoir n’a jamais empêché Guillot de fréquenter d’autres églises. Tout le contraire, même.
«Ce même monsieur-là, Cotnoir, qui l’a congédié parce que ce qu’il faisait était intolérable à l’École la Bonne Semence, il a participé activement à ordonner monsieur Guillot comme pasteur plus tard, ce qui a permis à monsieur Guillot de faire d’autres victimes», a expliqué l’un des avocats du recours, Jean-Daniel Quessy.
C’est pourquoi le recours collectif vise aussi l’église de Victoriaville, l’Église évangélique-baptiste de Québec-Est, où Claude Guillot est devenu pasteur, en plus de l’Association d’églises baptistes évangéliques au Québec. Les demandeurs jugent que celles-ci auraient dû dénoncer les abus.
Du début des années 2000 jusqu’à l’arrestation de l’ancien pasteur, celui-ci opérait une école clandestine dans le sous-sol de sa résidence à Québec.
Sévices
Il y aurait séquestré plusieurs mineurs au moment des faits. L’un d’eux, âgé de 8 ans à son arrivée chez Guillot, a témoigné y avoir été séquestré durant 13 ans. Ce n’est qu’à l’âge de 21 ans qu’il se serait libéré du joug de l’ancien pasteur.
Les enfants auraient été privés d’eau, de nourriture, en plus de multiples sévices corporels. Coups de poing, coups de pieds, coups de palette en bois, en plus d’autres méthodes de correction.
Les jeunes auraient été contraints à faire du «debout», ce qui consiste à se placer droit dans un coin d’une pièce, les pieds à 45 degrés, sans bouger durant parfois des heures.
«On parle d’une personne qui s’est carrément fait voler une partie de sa vie. Qui arrive à l’âge adulte, qui se sauve de chez monsieur Guillot, qui n’a jamais eu de compte bancaire, qui n’a pas eu d’emploi, qui à part apprendre la bible par cœur, n’a fait aucun apprentissage et qui, à toute fin pratique, est traumatisé et ne peut pas fonctionner en société», a souligné Me Quessy.
Le chemin de la guérison est très long. Les séquelles sont permanentes.
«Il y a trop de vies “scrappées”. J’ai subi les conséquences dans ma propre vie à des coûts incroyables. On en a qui se sont suicidé de l’école de “» Victo” ». On en a qui ont fait des tentatives de suicide. On en a, des étudiants, qui ont fini en prison. On a des étudiants qui ont fini en toxicomanie», a confié tristement le représentant des victimes qui ont subi des abus à Victoriaville.
Les représentants des victimes de Victoriaville et de Québec demandent 2 millions $ pour chacune des victimes. Les séquelles laissées par les abus physiques et psychologiques les ont handicapés jusque dans leur vie adulte.
Guillot recevra d’ailleurs son jugement le 23 décembre prochain pour une poursuite criminelle. Il fait face à 22 chefs d’accusation, dont voies de fait, voies de fait armées, séquestration, menaces et harcèlement sexuel.