Fillette de Granby: la belle-mère rapidement déclarée coupable
La belle-mère était accusée du meurtre non prémédité de la fillette de 7 ans et de séquestration

Antoine Lacroix
Après avoir entendu 23 témoins en six semaines de procès, les jurés n’ont pourtant mis que quelques heures pour sceller le sort de la belle-mère de Granby en la déclarant coupable du meurtre non prémédité de la fillette de 7 ans et de séquestration.
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« Si ce verdict-là rend un peu de dignité à cette jeune fille, c’est déjà énorme », a laissé tomber avec émotion le procureur de la Couronne, Jean-Sébastien Bussières.
Rarement a-t-on vu une décision rendue aussi rapidement dans un difficile procès pour un drame qui a autant troublé le Québec.
L’accusée n’a pas vraiment eu de réaction en apprenant le verdict, semblant surtout encaisser le choc avec un recul de la tête.

Comme elle est reconnue coupable de meurtre au deuxième degré, la femme de 38 ans écope automatiquement de la prison à vie.
Mais en attendant la recommandation des jurés pour la période d’admissibilité avant une libération conditionnelle, on entendait la belle-mère sangloter dans la pièce adjacente à la salle d’audience au palais de justice de Trois-Rivières, selon TVA Nouvelles.
Le jury n’a finalement pas pu s’entendre sur une recommandation.
La belle-mère pas crue
La femme avait livré un témoignage émotif durant le procès, jurant à plusieurs reprises ne jamais avoir obstrué les voies respiratoires de la petite avec du ruban adhésif.
Mais le jury n’a visiblement pas adhéré à sa version.
Elle avait reconnu dans son témoignage avoir enroulé la victime au moins « une dizaine de tours », mais soutenu ne pas avoir commencé la contention ni en avoir eu l’idée.
L’accusée avait affirmé ne pas savoir que l’enfant pouvait mourir et avoir agi dans le but de la « protéger » pour éviter que des meubles empilés en barricade lui tombent dessus, avant un rendez-vous chez une pédopsychiatre prévu à 15 h le jour du drame.
- Écoutez la réaction de Mario Dumont et le résumé d'Antoine Lacroix, journaliste au Journal de Montréal, en direct du palais de justice sur QUB radio:
La fillette avait tenté à plusieurs reprises de s’échapper par la fenêtre de sa chambre, dans les heures précédant la tragédie, le 29 avril 2019.
La Couronne a donc réussi à prouver que la belle-mère devait savoir qu’en enroulant ainsi la victime, elle pouvait probablement causer sa mort.
Procès éprouvant
Le procès n’a pas été de tout repos pour les membres du jury, qui ont dû prendre connaissance d’éléments de preuve troublants : l’appel passé au 911, la chemise semblable à une camisole de force et l’amas de tape ayant servi à couvrir le corps de la petite de la tête aux pieds.

Les photos montrant le piteux état de son corps n’ont laissé personne indifférent.
Le procès du père doit se dérouler cet hiver.
► On connaîtra vendredi la date pour les représentations sur la peine de la belle-mère.
Une preuve forte
Ses textos
Des messages évocateurs envoyés par l’accusée ont été présentés au jury, dans lesquels elle disait avoir « attaché ben comme faut » la victime. D’autres dénigraient la fillette.
Le témoignage du fils de l’accusée
L’adolescent avait assuré aux policiers avoir vu du ruban adhésif recouvrant le visage de la petite fille, disant qu’elle avait été « momifiée ».
Le rouleau de tape
Le rouleau de ruban adhésif de déménagement ayant servi à attacher l’enfant avait été retrouvé dans la résidence de Granby où le drame a eu lieu.
Le témoignage de l’accusée
Elle a admis avoir posé plusieurs gestes, dont celui d’avoir enroulé la victime de la tête aux pieds. Sa déclaration a possiblement permis au jury d’en arriver à un verdict.
La fillette avait déjà été violentée
La belle-mère de la fillette de Granby s’est épanchée, dans son témoignage, sur les bienfaits de rencontres aux Alcooliques anonymes, mais s’est gardée d’expliquer aux jurés qu’elle avait cessé de boire après s’en être prise violemment à la petite en 2017.
« Je m’excuse. Pour moi, même si c’est une enfant difficile, c’est dur pour mon orgueil de... je suis supposée être la hauteur. [...] Y’en a plus d’alcool [chez nous], je suis bien fière », avait lancé la femme en juillet 2018, après avoir reçu une absolution pour des accusations de voies de fait sur sa belle-fille.
Il s’agit d’une information qui n’a pas été transmise aux membres du jury, bien qu’ils semblent ne pas en avoir eu besoin pour en arriver à un consensus.
En état d’ébriété
Les événements remontent au mois de septembre 2017, à Granby.
L’accusée était en état d’ébriété et un conflit a éclaté.
La belle-mère de l’enfant l’avait violemment projetée au sol avant de la tirer par les cheveux, selon un document judiciaire.
La victime, alors âgée de 5 ans, s’était rendue dans un dépanneur pour qu’on appelle la police.
La femme avait toutefois réussi à obtenir une absolution pour ses gestes, mettant de l’avant le fait qu’elle avait cessé depuis de consommer de l’alcool, en raison des événements.
Selon ce qui avait été dit devant le tribunal à l’époque, il s’agissait pour elle d’une « erreur de parcours ».
Dans son témoignage, elle avait vanté le bien que lui faisaient ses rencontres aux Alcooliques anonymes, qualifiant le tout de « temps de répit ».
–Avec Valérie Gonthier