Folie meurtrière à Montréal: les conditions de libération des patients en psychiatrie seraient à revoir

Nora T. Lamontagne
La barre pour libérer un patient en psychiatrie considéré comme dangereux est «extrêmement basse», critique un psychiatre à la suite de la tuerie qui aurait été perpétrée par un homme schizophrène.
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«On ne peut pas être contre la vertu de redonner la liberté aux gens quand ils ne sont pas dangereux, mais quand vient le temps [de les libérer], ce n’est pas si simple», estime Gilles Chamberland, psychiatre de l’Institut Philippe-Pinel.
Ce dernier fait la liste des quelques conditions de libération souvent exigées de ses patients qui pourraient mettre à risque la sécurité du public: ne pas consommer de drogue, prendre leur médication régulièrement et habiter à un endroit approuvé.

En mars dernier, Abdulla Shaikh, soupçonné du meurtre aléatoire de trois personnes dans les derniers jours, a dû s’engager à respecter ce genre de critères pour être libéré.
«On se base surtout sur la bonne foi du patient et la capacité de suivi des hôpitaux, qui ne sont absolument pas équipés pour faire le suivi», critique le spécialiste.
Rechute possible
Le problème est que plusieurs patients omettent de prendre leur médication après leur sortie de l’hôpital, et peuvent faire une rechute au potentiel dramatique.
«Lorsque l’état d’un schizophrène est stabilisé, c’est vrai qu’il n’est pas plus dangereux que n’importe qui. Mais un individu en psychose est plus dangereux que le citoyen ordinaire», rappelle M. Chamberland.
Ce dernier aimerait que la Commission d’examen des troubles mentaux puisse exiger des conditions qui prennent en compte ce risque de rechute pour les patients aux antécédents de dangerosité.
Car si la libération de patients traités en psychiatrie se passe habituellement sans anicroche, «il y a des cas qu’on échappe», affirme-t-il.
Attention aux amalgames
Par ailleurs, la psychologue légiste Suzanne Léveillée met en garde contre les amalgames entre les problèmes de santé mentale en général et les crimes violents.
«Il faut y aller avec beaucoup de nuances pour éviter la stigmatisation», souligne la professeur de l’Université du Québec à Trois-Rivières.
Spécialiste des enjeux psychologiques et psychosociaux des meurtriers, elle rappelle que d’autres critères sont considérés pour évaluer la dangerosité d’un individu comme les antécédents criminels et les récents conflits familiaux.
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