Les Bulldogs de Québec et la coupe Stanley: l’équipe de hockey a remporté le plus ancien trophée donné à des athlètes professionnels dans l’histoire de l’Amérique du Nord
Martin Landry
Saviez-vous ça, vous, que cette coupe est le plus ancien trophée donné à des athlètes professionnels dans l’histoire de l’Amérique du Nord?
Ce que peu de gens savent, c’est que la coupe Stanley existait bien avant la création de la Ligue Nationale de Hockey (LNH). Ce trophée en forme de bol a été conçu à l’initiative du gouverneur général Frederick Arthur Stanley. On l’avait baptisé (1892-1893) le «Dominion Hockey Challenge Cup», mais vers 1895, le Saint-Graal du hockey a été tout naturellement rebaptisé du nom de son instigateur. Au Québec, on est particulièrement fier des exploits du Canadien de Montréal, entre autres de ses 24 coupes Stanley. Saviez-vous cependant qu’avant la création de la LNH, et bien avant la naissance des Nordiques, le Quebec Hockey Club l’a remportée? Oui, oui, deux fois en plus.
AVANT LA NAISSANCE DE LA LNH
À la fin du 19e siècle, les équipes de hockey montréalaises avaient leur propre championnat, tandis que du côté de Québec, le hockey était un peu moins structuré. Les clubs de hockey de la Vieille Capitale jouaient souvent entre eux sur la glace du Quebec Skating Rink de la Grande Allée. À l’occasion, des équipes de Montréal ou des Maritimes venaient affronter le Quebec Hockey Club. Au fil du temps, l’équipe de Québec sera surnommée les Bulldogs, fort probablement à cause du caractère combatif et acharné des joueurs du club.


BULLDOGS DE QUÉBEC
C’est lors de la saison 1910 que les Bulldogs ont enfin la chance de rejoindre une grosse ligue, l’Association canadienne de hockey (ACH). Malheureusement, après quelques rencontres, l’ACH fusionne avec une ligue rivale et les Bulldogs sont exclus de la nouvelle association.
Si l’adversité en décourage plusieurs, c’est le contraire qui se produit chez les dirigeants des Bulldogs de Québec. Ils savent que s’ils veulent, un jour, rivaliser avec les plus grandes équipes, ils doivent redessiner le noyau de leur équipe et surtout gagner en puissance. Cette reconstruction passera par l’acquisition de jeunes joueurs prometteurs comme le dur à cuire Joe Malone, le gardien de but Paddy Moran, le gaucher Tommy Smith, le défenseur Joe Hall et le buteur Jack MacDonald.


Rapidement, les nouvelles recrues des Bulldogs gagnent en confiance. L’esprit dans le vestiaire se transforme, les joueurs adoptent un style de jeu plus combatif et les victoires de l’équipe commencent à faire tourner les têtes des autres équipes professionnelles. Certains soirs, les gars se comportent comme des guerriers sur la patinoire. Par exemple, au moment où le gardien Paddy Moran se fait défigurer par le tir foudroyant de Didier Pitre du Canadien de Montréal, il perd littéralement connaissance sur la glace, le visage ensanglanté. Quand il retrouve ses esprits, malgré le choc, il se secoue un peu et reprend sa place devant le filet. Il faut dire qu’à l’époque, il n’y avait qu’un seul gardien de but par équipe.
COUPES STANLEY À QUÉBEC
Lors de la saison 1911-1912, les Bulldogs se retrouvent en série et doivent affronter et battre les Victorias de Moncton pour remporter la coupe Stanley. Au moment de la première de deux rencontres (11 mars 1912), les deux équipes jouent un jeu plutôt agressif et les Bulldogs dominent la partie. Malgré une vilaine grippe, le capitaine des Bulldogs, Joe Malone, marque trois buts. L’équipe de Québec emporte facilement la victoire au compte de 9 à 3. Lors du deuxième match, le gardien Paddy Moran réalise le premier blanchissage de l’histoire des séries de la coupe Stanley, Jack MacDonald marque 5 buts et les Bulldogs humilient leurs adversaires par la marque de 8 à 0. Dans les dernières minutes du match, l’entraîneur des Bulldogs fait même jouer ses réservistes. Cette première conquête de la coupe Stanley par les Québécois aura contribué à faire reconnaître Québec comme ville de hockey.

Les succès des Bulldogs se poursuivent la saison suivante. Joe Malone n’est pas qu’un joueur physique, il a, comme on dit dans le milieu, le sens du jeu. Il devient le meilleur marqueur de la ligue avec ses 43 buts en 20 matchs. En série, le club de Québec affronte une équipe des Maritimes, les Sydney Millionaires. Les Bulldogs vont mitrailler leur adversaire de 20 buts contre 5 et facilement remporter leur deuxième coupe Stanley.

ENTRÉE DES BULLDOGS DANS LA LNH
Malgré leurs succès, les difficultés financières des Bulldogs plombent leur développement et l’équipe peine à trouver les fonds nécessaires pour participer aux deux premières saisons de la nouvelle LNH (ligue créée en 1917). Les Bulldogs réussissent finalement à intégrer la grande ligue au cours de la saison 1919-1920. Malheureusement, ils ne sont pas au niveau des autres équipes de la LNH, même si Joe Malone est encore au sommet du classement des marqueurs. En novembre 1920, la franchise de Québec est relocalisée dans la ville de Hamilton en Ontario et l’équipe est rebaptisée les Tigers d’Hamilton.
Les Bulldogs de Québec ont disputé des matchs de 1878 à 1920, ils ont directement contribué à faire naître cette passion entre les Québécois et le hockey sur glace.
