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L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

Des taux d’intérêt à 20% et une dette publique faramineuse. Découvrez ce qui a plongé le Québec dans un marasme économique il y a 50 ans

La croissance économique de la période d’après-guerre est parfois nommée « Trente Glorieuses ». Elle ralentit dans les années 1970, principalement à cause des crises du pétrole de 1973 et de 1979.

Photo fournie par Library of Congress, domaine public
La croissance économique de la période d’après-guerre est parfois nommée « Trente Glorieuses ». Elle ralentit dans les années 1970, principalement à cause des crises du pétrole de 1973 et de 1979. Photo fournie par Library of Congress, domaine public Photo fournie par Library of Congress, domaine public
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Photo portrait de Martin Landry

Martin Landry

2024-03-30T05:00:00Z
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De la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu’au début des années 1970, les pays industrialisés de l’Occident vont connaître une période d’effervescence économique. 30 années glorieuses pendant lesquelles la croissance du PIB augmente en moyenne de 50% tous les 10 ans. Les villes se développent et la consommation croît de façon exponentielle. Les Québécois veulent avoir leur Home sweet home en banlieue, le rêve américain devient réalité. Par exemple, entre 1950 et 1963, les ventes au détail passent de 2,2 à 4,8 milliards de dollars au Québec. En cette période d’abondance, on assiste à une croissance économique avec des taux annuels moyens qui tournent autour de 5%. 

État providence

Entre 1950 et 1963, le revenu personnel total des Québécois double également. Le Québec de cette période d’après-guerre bénéficie d’investissements privés et publics sans précédent. L’augmentation des revenus de l’État permet la création des premiers vrais programmes sociaux permanents dans la province, mais aussi dans le reste du pays. De la fin des années 1950 au milieu des années 1970, l’État québécois investit massivement pour améliorer son système d’éducation (polyvalente, cégep, réseau des universités du Québec) et son système de santé (assurance hospitalisation et assurance maladie) ou encore pour soutenir de façon plus adéquate l’univers culturel (Place des Arts, Télé-Québec). L’expansion du rôle de l’État est pratiquement au cœur de toutes les plateformes politiques de tous les partis politiques.

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Sur la photo, nous pouvons voir Robert Bourassa en compagnie de Robert Després et de Claude Castonguay. Claude Castonguay joue un rôle central dans l’instauration du régime d’assurance maladie.
Sur la photo, nous pouvons voir Robert Bourassa en compagnie de Robert Després et de Claude Castonguay. Claude Castonguay joue un rôle central dans l’instauration du régime d’assurance maladie. Photo fournie par la BAnQ

Essoufflement économique

En 1973, dans le contexte de la Guerre du Kippour, les pays producteurs et exportateurs de pétrole diminuent drastiquement leur production. Ce choc pétrolier fait augmenter le prix du baril de pétrole et affecte de plein fouet l’équilibre économique mondial. L’inflation grimpe à 10,9% au Canada cette année-là. Puis, l’arrivée de pays émergents sur l’échiquier mondial qui offre une main-d’œuvre bon marché touche directement la production manufacturière québécoise.

Pour bien comprendre la contraction de l’économie dans les années 1970, il faut regarder au-delà du Québec pour trouver des explications. Les crises pétrolières sont causées par des problèmes politiques complexes au Moyen-Orient, là où se situent les grandes réserves de pétrole au monde. Ces tensions politiques ont amené des pays producteurs de pétrole à réduire leur production. Photo fournie par Getty Images / Express
Pour bien comprendre la contraction de l’économie dans les années 1970, il faut regarder au-delà du Québec pour trouver des explications. Les crises pétrolières sont causées par des problèmes politiques complexes au Moyen-Orient, là où se situent les grandes réserves de pétrole au monde. Ces tensions politiques ont amené des pays producteurs de pétrole à réduire leur production. Photo fournie par Getty Images / Express Photo fournie par Getty Images / Express

Pour contrer l’impact de l’inflation sur les ménages et stimuler l’économie, le gouvernement Bourassa vote des baisses d’impôt de près de 400 millions de dollars. Le Québec des années 1970 résiste à cette perte de croissance en stimulant son économie à coup de grands travaux gérés par l’État. On investit des deniers publics pour réaliser le projet hydroélectrique titanesque de la Baie James, l’investissement passe de 600 millions à plus d’un milliard de dollars. De plus, l’État appuie sans réserve le complexe chantier de construction des infrastructures pour les Jeux olympiques de 1976.

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Endettement

Évidemment, quand ces grands projets financés par nos gouvernements se terminent ou se font plus rares au début des années 80, l’économie ralentit. L’État n’est alors plus en mesure d’équilibrer la colonne des dépenses et celle des revenus. Le ralentissement économique et la croissance du chômage jumelés à l’inflation provoquent un phénomène de stagflation. Cette situation désastreuse sur le plan économique n’affecte pas que le Québec, elle se généralise à l’ensemble des pays occidentaux.

Entre 1981 et 1982, le taux de chômage grimpe à plus de 12% au Canada. Dans les faits, le nombre de personnes sans travail est beaucoup plus élevé parce que dans les calculs du taux de chômage, on ne tient pas compte des gens en recherche d’emploi. Un niveau record depuis la grande dépression des années 1930. Pour tenter de freiner l’inflation galopante et ralentir la consommation, la Banque du Canada fait augmenter son taux directeur. Les taux d’intérêt vont monter à près de 20%.

Résultat, le pouvoir d’achat des consommateurs diminue drastiquement. C’est d’ailleurs à cette époque qu’on voit croître le nombre de petites voitures sur les routes du Québec. De petites autos souvent japonaises et beaucoup moins énergivores que les gros modèles proposés par GM, Ford et Chrysler.

Remise en question de l’État providence

Dans les années 1980, le bal des fermetures d’usines et des faillites personnelles impose une remise en question des services offerts à la population. Santé et services sociaux, éducation, culture, investissement en recherche, le gouvernement doit contrôler les coûts liés à cet État providence né de la Révolution tranquille. L’économie québécoise ne peut plus autant compter sur l’argent des gouvernements pour se dynamiser. En 1980, le Québec est confronté au plus important bond de sa dette publique de son histoire, un bond de 32%. Les déficits accumulés de 1981 et 1982 forcent le gouvernement Lévesque à s’attaquer aux salaires des fonctionnaires pour freiner la croissance des dépenses. Il ampute de 20% pendant trois mois les salaires des employés de la fonction publique et leur impose de nouvelles conventions collectives. La dette québécoise explose, elle passe de 74 millions, en 1961, à 2,4 milliards, en 1970, et à plus de 25,7 milliards de dollars, en 1985, soit 23,4% du PIB.

La loi 111 en 1983. Cette loi «matraque» du Parti Québécois contre les enseignants a marqué à jamais les relations entre le gouvernement de René Lévesque et les syndiqués.
La loi 111 en 1983. Cette loi «matraque» du Parti Québécois contre les enseignants a marqué à jamais les relations entre le gouvernement de René Lévesque et les syndiqués. Photo fournie par la BAnQ

Aujourd’hui, la dette québécoise, sans tenir compte de l’argent placé dans le Fonds des générations, s’élève à 311 milliards de dollars. La dette collective fédérale poursuit elle aussi sa croissance pour atteindre les 1282 milliards cette année.

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