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L'article provient de TVA Nouvelles
Politique

Mâchurer: l’enquête sur le PLQ fermée dès janvier

Photo d'archives, Agence QMI
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Jean-Louis Fortin | Bureau d'enquête

2022-03-01T05:00:00Z
2022-03-01T12:42:34Z
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Le patron de l’Unité permanente anticorruption a décidé il y a un mois de mettre fin à l’enquête Mâchurer sur le financement du Parti libéral du Québec après avoir débattu pendant deux ans avec la Couronne pour voir s’il était possible de déposer des accusations criminelles.

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Selon nos informations, c’est à la fin janvier que le commissaire Frédérick Gaudreau a débranché cette enquête. L’information avait été gardée confidentielle, si bien que plusieurs employés de l’UPAC ont appris la nouvelle en même temps que le public, hier matin.

M. Gaudreau avait en main depuis décembre dernier l’avis juridique d’un comité formé par le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), et avait pris le tout en délibéré pendant les Fêtes. 

Il s’agissait même du deuxième avis demandé par l’UPAC aux procureurs en l’espace de quelques mois (voir la chronologie ci-contre).

Mâchurer, la plus ambitieuse enquête de l’histoire de l’UPAC, a débuté en 2014 et visait à l’origine une trentaine de personnes, dont l’ex-chef du PLQ Jean Charest, l’argentier Marc Bibeau et la directrice du financement Violette Trépanier. Des dizaines d’enquêteurs y ont travaillé.

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En cours de route, les écueils se sont accumulés : démission-surprise de l’ex-patron de l’UPAC Robert Lafrenière, contestation jusqu’en Cour suprême de Marc Bibeau concernant du matériel perquisitionné dans ses entreprises, enquête sur des fuites journalistiques au cours de laquelle le député Guy Ouellette a été arrêté de façon injustifiée, avortement de plusieurs enquêtes ou procès découlant de l’UPAC...     

  • Écoutez le commentaire de Jean-Louis Fortin à l'émission de Richard Martineau diffusée chaque jour en direct 8 h via QUB radio :   

De gros risques  

À l’arrivée du commissaire Gaudreau à l’automne 2019, Mâchurer traînait déjà en longueur. Le patron de l’UPAC a alors demandé à la Couronne un avis sur l’imposante preuve amassée. Selon nos informations, c’est à la fin avril 2020 que le DPCP a formé le comité d’examen de cinq personnes présidé par l’ex-juge de la Cour d’appel André Rochon.

Parmi les éléments de réflexion :         

  • Y avait-il assez d’éléments pour prouver hors de tout doute devant un tribunal que de l’influence ou des décisions politiques ont été échangées contre du financement ?          
  • Comment éviter un mégaprocès difficile à gérer, compte tenu que des dizaines de milliers de pages de documents ont été saisies dans le cadre d’une enquête avec plus de 300 témoins ?         
  • Y aurait-il des risques d’avortement de procès, sachant que le travail de certains policiers de l’UPAC à l’ère Lafrenière est en ce moment scruté à la loupe par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) ?                  
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« Trop gros et trop long »  

Des sources proches du dossier à qui nous avons parlé hier ne cachaient pas que plusieurs acteurs du système policier et judiciaire sont déçus après tant de travail accompli.

« C’était trop gros et trop long. Ça s’en allait dans le mur depuis longtemps », nous a confié l’une d’elles.

S’il a fallu un mois entre la décision finale de janvier dernier et son annonce, c’est que plusieurs partenaires gouvernementaux devaient se coordonner. Il fallait entre autres tenir compte de la poursuite de 2 M$ intentée par Jean Charest contre l’État québécois, qu’il tient responsable de fuites médiatiques dans ce dossier.

Écoutez Jean-François Lisée et Thomas Mulcair au micro de Richard Martineau sur QUB radio : 

Hier, l’UPAC n’a pas voulu commenter ses démarches avec le DPCP, en raison de ses « obligations de confidentialité ».

Le spectre de Mâchurer est revenu à l’Assemblée nationale pas plus tard qu’à la mi-février, brandi par le Parti Québécois et Québec solidaire, au moment où Jean Charest est pressenti pour se lancer dans la course à la chefferie du Parti conservateur du Canada. 

Le porte-parole de l’UPAC Mathieu Galarneau a affirmé hier au Journal que les décisions du commissaire se prennent de façon « indépendante » de ce qui se passe au Parlement.

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« Nous ne sommes pas là pour se [sic] mêler de la joute politique. Nous sommes là pour faire appliquer le Code criminel », a-t-il soutenu. 

Écoutez la chronique de Jean-Louis Fortin du Bureau d’enquête au micro de Richard Martineau sur QUB radio:

EN COULISSES DANS LES DERNIERS MOIS 

Avril 2014
Lancement de l’enquête Mâchurer sur des allégations de financement illégal au PLQ.

Automne 2019
Le nouveau patron de l’UPAC, Frédérick Gaudreau, demande au DPCP un avis juridique sur l’enquête.

Avril 2020
Le DPCP forme un comité d’examen dirigé par l’ex-juge André Rochon.

Décembre 2020
Le comité envoie son avis à l’UPAC.

Mars 2021
Les dirigeants de l’UPAC rencontrent le comité pour poser des questions.

Septembre 2021
L’UPAC ne jette pas l’éponge et demande un deuxième avis au comité d’examen.

Décembre 2021
Le comité remet un nouveau rapport à l’UPAC.

Janvier 2022
Frédérick Gaudreau décide de fermer l’enquête.

28 février 2022
L’UPAC annonce publiquement sa décision.

L’UPAC ET LE SENS DU TIMING 

Depuis quelques années, plusieurs décisions clés à l’UPAC sont annoncées au même moment que d’autres événements d’importance.        

  • L’arrestation de l’ex-vice-première ministre Nathalie Normandeau, le 17 mars 2016, jour de dépôt du budget à l’Assemblée nationale.        
  • La démission du commissaire Robert Lafrenière, le 1er octobre 2018, jour de l’élection provinciale.        
  • L’annonce de la fin de l’enquête Mâchurer, au moment où Jean Charest est pressenti pour se lancer dans la course à la chefferie du Parti conservateur du Canada.        
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