Legault prend le blâme pour l’abandon du 3e lien routier
«C'est moi qui ai pris la décision, et je l'assume», a déclaré le premier ministre


Marc-André Gagnon
Malgré la déception que sa volte-face a semée, le premier ministre François Legault prend le blâme pour l’abandon du projet de 3e lien routier et martèle qu’il s’agissait de la seule décision responsable à prendre pour les contribuables.
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«Il n'y a pas de complot, [...] en bout de ligne, [...] c'est moi qui ai pris la décision, et je l'assume», a déclaré en point de presse le chef caquiste. Plus tôt dans la journée, le premier ministre a réuni ses députés de la Capitale-Nationale et de Chaudière-Appalaches, qui affrontent, depuis la semaine dernière, la colère de ceux qui ne digèrent pas que le projet 3e lien soit désormais dédié exclusivement au transport en commun.
Même s’il dit comprendre leur déception, «surtout ceux et celles qui vivent à l’est» de Lévis, François Legault refuse de présenter des excuses aux citoyens à qui il promettait un 3e lien, comme l’a fait le député-ministre Bernard Drainville, jeudi dernier. «Je ne m'excuserai pas de prendre la meilleure décision pour les Québécois, même si c'est une décision qui est difficile», a expliqué le premier ministre.
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Financièrement injustifiable
Contrairement aux indications qu’avait son gouvernement auparavant, les données actualisées qu’il a obtenues le 5 avril dernier ne justifient plus la construction d’un tunnel routier sous-fluvial entre Québec et Lévis. «Financièrement, ce n’est pas justifiable», a répété le premier ministre, devant la presse parlementaire.
Rappelons que jeudi dernier, la ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbault, révélait que les coûts du «bitube» dévoilé un an plus tôt, qui comprenait un tunnel pour les voitures, se chiffraient désormais à 10 milliards $.
Un 3e lien «à tout prix»
«C'est une question d'être pragmatique. [...] Moi, je ne me considère pas comme quelqu'un qui est dogmatique puis qui dit : "Il faut absolument faire ça à tout prix "», a expliqué M. Legault.
Pourtant, lors d’un caucus de sa formation politique, en mars 2017, le chef caquiste avait dit : «On va – à tout prix – construire un 3e lien». Il s’était toutefois engagé à retenir le scénario «qui est le moins coûteux». En mai 2021, le gouvernement caquiste dévoilait malgré tout une version «monotube» à 10 milliards $ du 3e lien, qui impliquait la conception du plus gros tunnelier au monde, pour finalement se rabattre, un an plus tard sur un «bitube» plus modeste alors évalué à 6,5 milliards $.
Un projet avancé en 2026?
En revanche, selon les données mises à jour en tenant compte de l’effet du télétravail sur les habitudes de déplacement confirment maintenant qu’il y a «de la place pour un transport en commun dans un tunnel centre-ville à centre-ville», assure le chef caquiste.
Sans avancer d’échéancier précis, le premier ministre souhaite que cette énième version du projet de 3e lien se réalise «le plus rapidement possible».
Au sortir de la réunion spéciale avec ses collègues de la Rive-Nord et de la Rive-Sud de Québec, Bernard Drainville s’est donné pour objectif d’arriver aux prochaines élections avec un projet en phase de réalisation. «En 2026 [...] je souhaite être capable de dire : "vous voyez on est en train de le réaliser"», a dit le député de Lévis.
«Je sais que Bernard a dit ça, a commenté M. Legault. Moi, ma volonté, c'est d'aller le plus vite possible tout en le faisant correctement.»
Les gens de Lévis devraient-ils bénéficier d’un retour d’ascenseur, comme l’a laissé entendre la députée-ministre de Chutes-de-la-Chaudière, Martine Biron, mardi matin? «On traite avec faveur les 17 régions», a répondu M. Legault.
Des réactions
« Aujourd'hui, on le sait, c'étaient des promesses en l'air : pourquoi les Québécoises et Québécois continueraient à croire le premier ministre? »
– Marc Tanguay, chef par intérim du Parti libéral du Québec
« Qu'on ait été pour ou contre le troisième lien, tout le monde a la désagréable impression de s'être fait avoir. »
– Gabriel Nadeau-Dubois, chef parlementaire de Québec solidaire
« Le premier ministre savait [...] que ce projet n'allait jamais voir le jour. [...] L'élection de 2022 [...] a été faite sur la base de fausses représentations. »
– Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti Québécois