Le syndrôme pollen-aliments: c'est quoi?
Si vous souffrez d’allergies au pollen, il est possible que vous soyez aussi allergique à certains fruits, légumes, légumineuses ou noix.
Annie Turcotte
Si vous souffrez d’allergies au pollen, il est possible que vous soyez aussi allergique à certains fruits, légumes, légumineuses ou noix. C’est ce qu’on appelle le syndrome pollen-aliment, aussi appelé syndrome d’allergie orale, qui est considéré comme une allergie alimentaire. Voyons de plus près ce qu’il en est.
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Le syndrome d’allergie orale est causé par le fait que les protéines qu’on trouve dans certains fruits et légumes frais et certaines noix ressemblent beaucoup à celles qui sont présentes dans des pollens. Il peut survenir à tout moment de l’année, mais les symptômes se manifestent davantage pendant la saison pollinique. «Ce syndrome se développe souvent lorsqu’on est un peu plus vieux, souvent en parallèle au développement des allergies au pollen», souligne la Dre Marie-Josée Francoeur, allergologue pédiatrique.

Cette réactivité croisée entraîne des symptômes qui surviennent habituellement pendant qu’on mange ou quelques minutes après avoir mangé des fruits, des légumes frais ou certaines noix dont les protéines sont semblables au pollen auquel on est allergique. «Le kiwi qui pique dans la bouche, par exemple, est un syndrome d’allergie orale et ses symptômes sont limités à la bouche, donc au niveau des muqueuses buccales uniquement», dit l’allergologue. Et même si elle n’est généralement pas grave, cette réaction est particulièrement désagréable pour ceux qui la vivent, notamment sur le palais et dans le fond de la gorge. Il peut même y avoir des picotements dans les oreilles et de l’enflure au niveau des lèvres, de la langue ou de la bouche.
Contrairement aux allergènes alimentaires classiques, les protéines allergéniques en cause dans le syndrome pollen-aliment sont très sensibles à la chaleur et aux enzymes digestives. Elles se dégradent donc rapidement après l’ingestion, ce qui limite les symptômes dans la majorité des cas. «Cela est dû à une protéine qui est thermolabile, c’est-à-dire qu’elle est fragile à la cuisson ou à la pasteurisation, explique la Dre Francoeur. Par exemple, quand un fruit est cuit en compote ou que l’aliment se retrouve dans un jus pasteurisé, la haute température va dénaturer la protéine, qui ne causera pas d’inconfort comme lorsque l’aliment est consommé frais. En comparaison, dans le cas d’une allergie alimentaire IgE médiée, même si l’aliment responsable est cuit, les symptômes seront tout de même présents.»
Est-ce dangereux?
«En médecine, on va s’abstenir d’utiliser les mots «toujours et jamais», car le corps humain a ses particularités qui font qu’il peut y avoir des exceptions. Mais chez la majorité des gens qui ont une sensibilité pollen-aliment, les symptômes vont se limiter à la muqueuse buccale. Dès que les personnes atteintes vont arrêter de manger l’aliment responsable, la sensation désagréable va s’estomper, même si parfois il peut être nécessaire d’utiliser un antihistaminique. Dans ces situations particulières, je recommande au patient, même s’il s’agit d’un adulte, de prendre celui pour enfants, en sirop, parce qu’il tapisse la bouche et que l’effet est plus rapide.»
Néanmoins, on garde en tête que la survenue de picotements dans la bouche ou la gorge après avoir mangé des arachides, des fèves de soya, des amandes ou des noisettes peut indiquer la présence d’allergies plus graves. Il est donc important de consulter un allergologue si de tels symptômes sont ressentis.
La désensibilisation
«On ne peut pas guérir du syndrome pollen-aliment, nous indique la Dre Francoeur, mais si on s’occupe du problème sous-jacent, donc si on suit une cure de désensibilisation pour le pollen qui cause ces réactions, on a d’excellentes chances d’améliorer notre tolérance aux aliments qui posent problème.» Au Canada, depuis 2013, on peut utiliser la désensibilisation sublinguale en comprimé. «J’ai traité beaucoup d’enfants et d’adolescents contre les allergies aux pollens et, du lot, il y en a un bon pourcentage qui reviennent en me disant qu’ils peuvent désormais manger des fruits et des légumes qu’ils ne toléraient pas avant. L’objectif de la désensibilisation, poursuit-elle, est d’améliorer le contrôle des allergies durant la saison pollinique, mais surtout d’éviter les comorbidités, comme le fait que ça dégénère en asthme. Mais oui, c’est possible que ça améliore la tolérance à certains fruits et légumes.» Car si on craint beaucoup les allergies alimentaires, il faut savoir qu’un asthme non contrôlé, c’est extrêmement dangereux. «L’asthme est actuellement la cause principale d’hospitalisation chez les enfants au Québec, dit-elle. Et je pense qu’on décède encore, au Canada, plus souvent de crise d’asthme sévère que d’anaphylaxie.»
Cet article est tiré du magazine La Semaine Santé - Les allergies, offert en kiosque et à jemagasine.ca