Publicité
L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

Le refuge qui se fait barouetter

Tout juste déménagé à l’Auberge Royal Versailles, sur Sherbrooke, il risque de se faire encore déplacer

Laurence Côté-Venne, une responsable du refuge, est déçue d’avoir été forcée de déménager là précipitamment, sans laisser le temps de préparer le voisinage.
Laurence Côté-Venne, une responsable du refuge, est déçue d’avoir été forcée de déménager là précipitamment, sans laisser le temps de préparer le voisinage. Photo Louis-Philippe Messier
Partager
Photo portrait de Louis-Philippe  Messier

Louis-Philippe Messier

2021-09-27T04:00:00Z
Partager

À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.


Comme chroniqueur, j’ai passé du temps dans deux refuges pour sans-abri, dans un ancien aréna du YMCA Hochelaga et dans l’hôtel Place Dupuis. Je ne prendrai pas cette peine pour le nouveau refuge de Royal Versailles, qui pourrait ne plus exister dans cinq semaines. Son bail est bon jusqu’au 31 octobre. Ensuite...  

• À lire aussi: Un café-établi pour réparer vos bébelles

• À lire aussi: Découvrir Montréal sans rien voir

Ensuite, on ne sait pas. La Ville lui dira peut-être d’aller ailleurs. Ou de rester. Comme pour ses usagers contraints au vagabondage, ce refuge ira où l’on voudra l’héberger. 

« Nous avons eu moins de deux semaines de préavis fin juin pour organiser un refuge fonctionnel de 120 lits ici », me raconte Laurence Côté-Venne.

La femme de 26 ans est la directrice aux services cliniques de CARE Montréal, l’organisme qui gère ce refuge qui occupait le Centre Pierre-Charbonneau, près du stade.

Nous parlons dans une chambre convertie en bureau (avec un immense bain-tourbillon dans le coin). Les usagers utilisent les sempiternelles cartes magnétiques (qui se démagnétisent toujours) comme clés. D’horribles couchettes de camp qui grincent ont remplacé les matelas moelleux. La piscine centrale est condamnée. À en juger par la tranquillité, on ne dirait pas que 120 personnes logent ici. Le ménage a été fait. C’est propre.

Publicité
Le gardien de sécurité Juan Coal connaît presque tous les usagers du refuge.
Le gardien de sécurité Juan Coal connaît presque tous les usagers du refuge. Photo Louis-Philippe Messier

« Je connais la plupart des usagers personnellement », me dit Juan Coal, 52 ans, un gardien de sécurité, dans le stationnement.

« Ça se passe vraiment bien, mais est-ce que ça existera toujours après l’Halloween ? » se demande Mme Côté-Venne.

Pétition des voisins

Si tout se passe bien à l’intérieur, ce n’est pas forcément le cas à l’extérieur. 

« J’ai vu une femme en crise complètement nue en train d’uriner sur la rue Sherbrooke et des gens se piquer au métro Radisson », me raconte Dave Adam, un père de famille de 37 ans qui vit non loin du nouveau refuge.

Il a pris des photos de ces scènes disgracieuses qui ont circulé dans un groupe privé Facebook. Avec d’autres voisins, M. Adam a lancé une pétition pour exiger la fermeture du refuge et récolté plus de 1100 signatures. 

Patrice Fournier, un résident du refuge, me fait visiter sa moitié de chambre.
Patrice Fournier, un résident du refuge, me fait visiter sa moitié de chambre. Photo Louis-Philippe Messier

« C’est essentiellement tous les résidents qui habitent près de l’hôtel », dit-il.

« La majorité des gens qui ont signé avaient été témoins ou ont subi un méfait et dénonçaient le manque de sécurité », ajoute-t-il.

M. Adam suggère que le refuge se dote d’un centre d’injection supervisé dans ses murs pour éviter que la consommation se passe dans les édicules de métro ou les parcs.

Fait trop vite

« Ça s’est fait à la dernière minute et on n’a pas eu le temps de préparer le terrain pour l’arrivée du refuge », m’explique Sylvie Boivin, la directrice générale de L’Anonyme, dont le programme Tandem a le mandat de sécuriser les quartiers « chauds » avec ses travailleurs sociaux. 

Si le refuge reste, Mme Boivin promet un costaud plan de sécurisation. Mais le refuge risque de se faire encore « barouetter » dans un autre quartier où l’accueil du voisinage risque d’être tout aussi froid.


Une réunion virtuelle pour les citoyens organisée par l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve se déroulera le jeudi 30 septembre à 18 h 30.

À VOIR AUSSI...

Publicité
Publicité