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L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

​Ces femmes adultes qui apprennent le vélo

Notre chroniqueur a passé deux heures avec une vingtaine d’entre elles qui s’initiaient à la bicyclette

Sur son vélo à une pédale, Amal Aissou s’exerce à « démarrer ». Elle prend visiblement du plaisir à cet entraînement.
Sur son vélo à une pédale, Amal Aissou s’exerce à « démarrer ». Elle prend visiblement du plaisir à cet entraînement. Photo Louis-Philippe Messier
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Photo portrait de Louis-Philippe  Messier

Louis-Philippe Messier

2021-08-21T05:00:00Z
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À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.


C’est le monde à l’envers ! Autour de moi, des femmes adultes qui peinent à garder l’équilibre sur un vélo sont entourées d’enfants qui roulent avec aisance, un spectacle qui a quelque chose de déroutant. 

Près du centre culturel Calixa-Lavallée et des terrains de pétanque du parc La Fontaine, les 23 femmes inscrites au cours Toutes à vélo ! se déplacent sur des bicyclettes transformées en draisiennes, c’est-à-dire auxquelles on a enlevé les pédales.

Vêtue d’un dossard jaune, l’instructrice Joanne Boivin explique à son groupe comment­­­ freiner à vélo. La plupart utilisent leurs pieds pour ralentir et s’arrêter.
Vêtue d’un dossard jaune, l’instructrice Joanne Boivin explique à son groupe comment­­­ freiner à vélo. La plupart utilisent leurs pieds pour ralentir et s’arrêter. Photo Louis-Philippe Messier

Certaines observent, songeuses, les habiles galipettes des petits cyclistes... « Non, non, non ! Il ne faut pas se comparer avec les enfants », s’écrie l’instructrice, Joanne Boivin, à l’intention de ses débutantes dont la moyenne d’âge tourne autour de la quarantaine.

Pourquoi commencer sans pédales ? « Elles apprennent à trouver leur point d’équilibre en se propulsant avec leurs pieds », m’explique Catherine Plante, la coordonnatrice montréalaise de Cycliste averti, le programme de Vélo Québec qui offre le cours.

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L’étape suivante : une seule pédale, pour apprendre à « démarrer ».

Sous le regard amusé de Catherine Plante (à gauche), Tassadit Belkad, qui vient tout juste de recevoir ses pédales, s’amuse à feindre de foncer sur moi, qui prends des photos.
Sous le regard amusé de Catherine Plante (à gauche), Tassadit Belkad, qui vient tout juste de recevoir ses pédales, s’amuse à feindre de foncer sur moi, qui prends des photos. Photo Louis-Philippe Messier

Des applaudissements retentissent : une femme est parvenue à avancer en pédalant. Elle louvoie un peu, mais garde le cap. Elle rit. Bientôt, elle rejoindra les débutants capables de pédaler sur les chemins d’un parcours d’entraînement au vélo en ville pour enfants, appelé Jardin du petit monde à bicyclette.

Complexité

Pour le lecteur de ce Journal qui sait faire du vélo, la complexité de cette pratique échappe complètement. « Avec les adultes qui apprennent le vélo, il faut tout verbaliser et tout expliquer en détail, y compris comment tourner et comment s’arrêter », m’explique Mme Boivin. 

Lorsque j’arrive, une femme peine à enfourcher ou désenfourcher sa bicyclette. 

Lorsque Mme Boivin demande si quelqu’un sait comment freiner en vélo, c’est le silence. Jusqu’à maintenant, ses élèves utilisaient leurs semelles pour freiner. 

« J’aurais dû être plus patiente avec mes enfants lorsque je leur enseignais à faire du vélo » me dit Amal Aissou, 38 ans, originaire d’Algérie.

Mme Aissou a donc trouvé le moyen d’apprendre le vélo à ses enfants sans elle-même savoir en faire...

« Ma plus vieille ne m’a pas crue quand je lui ai avoué la vérité... Lorsque j’ai entendu parler de ces cours, je me suis dit : je ne suis donc pas la seule. Ça m’a encouragée. » 

Service de garde offert

Le cours Toutes à vélos ! offre un service de garde. Tassadit Belkad, 45 ans, originaire d’Algérie, est venue avec ses enfants.

Tandis que je prends des photos, accroupi sur la piste, Mme Belkad s’amuse à feindre de foncer droit sur moi en riant pour m’éviter à la dernière seconde.

« Il y a une heure et demie, je n’avais pas encore de pédales... et maintenant je peux déjà faire ça. Je suis ici parce que je veux accompagner mes enfants à vélo le soir après l’école. »

Également du Maghreb, Fatima***, 36 ans, a suivi le cours le printemps dernier, mais elle revient pour se perfectionner. 

« Au Maroc, ce sont les garçons qui sont encouragés à faire du vélo, moins les filles », m’explique-t-elle.

***Nom fictif

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