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Le nouveau film de Blake Lively, «It Ends with Us», glorifie-t-il les relations toxiques?

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Photo portrait de Andrea Lubeck

Andrea Lubeck

2024-08-20T14:57:50Z
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L’adaptation au grand écran du roman Jamais plus (It Ends with Us) a pris l’affiche il y a un peu plus d’une semaine et déjà, des voix s’élèvent pour critiquer la façon dont y sont dépeintes les violences conjugales. L’œuvre – et les romans sentimentaux en général – glorifie-t-elle les relations toxiques, comme le prétendent certains?

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Publié en 2016, It Ends with Us, un roman sentimental de l’écrivaine américaine Colleen Hoover, raconte la relation amoureuse entre Lily Bloom, une fleuriste dans la vingtaine, et Ryle Kincaid, un séduisant neurochirurgien.

Dès leur première rencontre, Ryle transgresse plusieurs limites qu’impose Lily et il devient graduellement plus violent avec elle au fil de leur relation, au point où il la gifle, la mord et tente de l’agresser sexuellement.

Le hic, selon certaines lectrices: Ryle serait dépeint comme un bon petit ami avec un passé trouble qui justifie ses comportements violents. Les critiques les plus virulentes vont jusqu’à dire que It Ends with Us banalise, voire glorifie les violences conjugales. D’autant plus que Blake Lively, qui incarne le rôle de Lily au cinéma, se fait reprocher de faire la promotion du film comme s’il s’agissait d’une comédie romantique légère, sans prendre en compte la violence que subit son personnage.

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La dark romance (amour sombre), une sous-catégorie des romans sentimentaux apparue il y a une dizaine d’années, fait face aux mêmes critiques. Les œuvres qui appartiennent au genre abordent des thèmes plus sombres: le BDSM ou les fantasmes de viol, d’enlèvement et de captivité dans un contexte de relation amoureuse. La populaire série 50 nuances de Grey appartient à cette sous-catégorie.

La violence dans les romans sentimentaux n’est pourtant pas un phénomène nouveau, explique Marie-Pier Luneau, directrice du Groupe de recherches et d’études sur le livre au Québec (GRÉLQ).

À cause du «patriarcat», «le roman sentimental traîne avec lui une longue tradition de violence et de culture du viol» qui remonte au XVIIIe siècle, souligne-t-elle.

Dangereuse, la dark romance?

Est-ce donc dire que la dark romance est dangereuse?

La réponse à cette question «est beaucoup plus complexe que ce qu’on en fait», soutient Marie-Pier Luneau.

D’abord, il faut se rappeler qu’il s’agit de fiction. Ensuite – et surtout –, il ne faut pas sous-estimer la capacité des lectrices à reconnaître que ce qu’elles lisent est de l’ordre de l’imaginaire, insiste celle qui est également professeure de littérature à l’Université de Sherbrooke.

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«Parce que ça s’adresse aux femmes, particulièrement aux jeunes filles, c’est un reproche sempiternel qu’on fait de se demander si c’est dangereux. On oublie que c’est de l’imaginaire. On s’intéresse peu à ce que les filles disent elles-mêmes de ces lectures-là.»

Marie-Pier Luneau le rappelle d’ailleurs: les femmes ne lisent pas ce type de roman parce qu’elles sont «niaiseuses» ou qu’elles «aiment se complaire dans la violence». C'est comme les amateurs des œuvres d’horreur, qui n’iront pas commettre un massacre à la tronçonneuse après avoir vu un film violent, dit-elle.

Des lectures cathartiques

Marie-Pier Luneau va même plus loin: la dark romance pourrait avoir un effet thérapeutique.

«Des femmes qui ont traversé des épreuves de violence conjugale vont les utiliser pour se dire: “Moi aussi, j’ai vécu ça. Moi aussi, je m’en suis sortie, je ne suis pas seule”», précise-t-elle.

Elle cite également une étude sur la série 50 nuances de Grey, de la sociologue Eva Illouz. Selon cette dernière, ce type lecture pouvait permettre aux femmes de résoudre, dans l’imaginaire, des contradictions qu’elles vivent au quotidien.

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