Le cardiologue Pierre Tessier raconte comment des événements peuvent bouleverser une vie dans son premier roman, «Notre possible»
Le cœur et sa vaste palette d'émotions


Marie-France Bornais
Cardiologue d’expérience et professeur, Pierre Tessier est un expert pour tout ce qui concerne le cœur. Dans son premier roman, Notre possible, il explore avec justesse une vaste palette de sentiments et parle de ce qui fait battre le cœur, ce qui le met en joie, ce qui le brise aussi. Il fait le lien entre le cœur, cet organe qui bat, et toutes les émotions, bonnes ou moins bonnes, auxquelles les gens «ordinaires» font face lorsque se présentent des événements qui sortent de l’ordinaire.

Avec finesse, Pierre Tessier invite les lecteurs dans la vie intime de Paul et de Nathalie. Dans leur vie en apparence rangée et ordinaire se trament des événements qui viennent bouleverser le cours des choses.
L’écrivain-cardiologue dépeint à quel point la routine, les exigences de toutes sortes, peuvent en venir à faire dérailler des choses importantes.
«Le désir d’écrire, j’ai toujours eu ça en moi, depuis l’adolescence, dit Pierre Tessier en entrevue. J’ai été attiré par la médecine, la science, le côté humain et même temps, j’avais ça en moi, de tout temps. Dans ma tête, c’était clair que je ne pouvais pas finir ma vie sans essayer au moins d’écrire. Là, je l’ai fait. Je me suis rendu au bout et j’en suis très heureux!»
Le prix à payer
«Ma prémisse était de mettre en scène des gens ordinaires, comme vous et moi, et de leur faire vivre des choses pas si rares, comme l’adultère, le cancer du sein, la conciliation travail-famille. Mon objectif était d’être capable d’illustrer les émotions bouleversantes que ces gens-là – et nous – vivent.»
Paul et Nathalie sont des personnages fictifs. «Je leur ai donné des traits de personnalité de gens qui sont des achievers – des gens qui accomplissent beaucoup. Je voulais en même temps illustrer le fait que des gens qui accomplissent beaucoup, parfois, c’est au prix d’un sacrifice personnel. C’est pas toujours nécessairement facile.»
Les émotions et la santé du cœur
Docteur... peut-on faire un lien entre les émotions qui nous bouleversent et la santé cardiaque? «Effectivement, il peut y avoir un lien entre nos émotions et notre santé. C’est relativement connu dans des études observationnelles», dit le spécialiste.
«J’aurais tendance à dire qu’en médecine, en cardiologie, on est témoin d’émotions, de moments bouleversants, importants dans la vie des gens et de leur famille. Le fait d’être témoin de ça fait deux choses: ça peut nous marquer parce qu’on voit de grandes émotions, et deuxièmement, on doit se développer une sorte de carapace pour être capable de faire le travail qu’on fait.»
«J’ai fait une carrière de cardiologue interventionnel et j’ai dû utiliser la carapace pour faire ce travail, mais en même temps, j’ai emmagasiné beaucoup d’émotions. Peut-être que quelque part, j’arrive à les laisser un peu sortir d’une façon littéraire.»
La maladie du cœur brisé
Par ailleurs, le cardiologue explique que la maladie du cœur brisé, la cardiomyopathie de tako-tsubo, existe. «C’est une vraie maladie et c’est pas une rareté. C’est quelque chose que l’on voit: quelqu’un qui vit une grande émotion, une dispute très bouleversante, un décès.»
«Parfois les gens, dans les 24 heures qui suivent, rentrent à l’hôpital avec des malaises à la poitrine et on ne leur trouve pas des blocages dans les artères comme les gens qui font une crise cardiaque, un infarctus. Mais c’est l’émotion intense qui a amené une sorte de réaction cardiaque qui fait que leur cœur est malade à ce moment-là. Ça se voit: on voit des anomalies sur les prises de sang, sur l’électrocardiogramme. Et heureusement, ça récupère.»
Notre possible
Pierre Tessier
Éditions Libre Expression
240 pages
- Pierre Tessier est cardiologue à l’hôpital du Sacré-Cœur à Montréal et professeur affilié à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal.
- Il sera au Salon du livre de Montréal.
- Il a déjà commencé l’écriture de son deuxième roman.
«Ces moments où l’on se retrouve face à soi-même, en difficulté. Un événement déclencheur, puis circonstances défavorables, fatigue accumulée, attentes étouffantes, la tempête parfaite. Parmi les issues possibles, l’effondrement, le burn-out, la fuite. Ou la résistance, la lutte. Lui et moi savions bien à quel groupe nous appartenions. Le vent se levait.»
- Pierre Tessier, Notre possible, Éditions Libre Expression
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