Éric Dupont fait revivre Mary Gallagher et toute une époque dans son nouveau roman teinté de réalisme magique, «La ricaneuse».
Un «true crime» historique au pied du mont Royal


Marie-France Bornais
Auteur du best-seller La fiancée américaine, vendu à plus de 60 000 exemplaires au Québec et récipiendaire du prix des Libraires du Québec et du prix des Collégiens, Éric Dupont revient cet automne avec La Ricaneuse. Cette nouvelle saga familiale truculente est aussi un «true crime» historique teinté de réalisme magique. Elle prend naissance dans les fermes qui se trouvaient au pied du mont Royal. Le monde a changé: à la fin du 19e siècle, on y cultivait le melon brodé... et Montréal était, écrit l’auteur, «la ville la plus ivre de toute l’Amérique du Nord britannique».

La Ricaneuse voyage entre Mary Gallagher, le célèbre fantôme de Griffintown, le tavernier et montreur d’ours Charles McKiernan (alias Joe Beef), Expo 67 et Aimé Sanschagrin, un garçon mystérieux qui a un don extraordinaire pour le dessin.
Éric Dupont, extraordinaire conteur, nous fait découvrir des événements étonnants. Les religieux font des processions dans les rues pour tenter de venir à bout des bibittes à patates qui font des ravages dans les champs. Les novices qui vont faire baptiser les enfants «nés dans le péché» se font tirer des roches.
Griffintown
Éric Dupont s’est inspiré d’un fait divers réel qui a fait grand bruit à la fin des années 1800: le meurtre de Mary Gallagher. La femme a été assassinée sur la rue William, dans le quartier Griffintown.
L’affaire a été suivie avec attention par le journal La Minerve, qui ne manquait rien du procès de Susan Kennedy (la meilleure amie de Mary, qui entend des voix dans sa tête...) et Michael Flanagan, débardeur au bassin Peel.
«Ce livre est un peu différent des autres parce qu’il m’a demandé beaucoup de recherches, mais aussi parce que j’ai pris des libertés que je ne prenais pas avant. J’ose faire certaines choses», commente Éric Dupont, en entrevue.
Mary Gallagher
Mary Gallagher est arrivée dans sa vie... quand il a emménagé à côté du Vieux-Montréal il y a 5 ans et que son éditrice, Mélanie Vincelette, lui a parlé d’elle.
«C’est l’histoire vraie de cette femme qui a été décapitée en 1879 par sa meilleure amie. Mélanie m’a raconté que l’histoire est étrange parce qu’on n’est pas sûrs à 100% de la culpabilité de Susan. Il y avait aussi d’autres gens présents, à l’époque, et les témoins ne s’entendaient pas tous sur les versions. Ce qu’il y a de bizarre aussi, c’est que le jour où il devait être pendu, Michael Flanagan s’est noyé dans le bassin Peel. Quand ils l’ont enterré, il y a eu un cortège de 500 personnes, toutes ivres, qui sont montées au cimetière Notre-Dame-des-Neiges. Toute une histoire.»
L’écrivain à succès a réalisé que du côté anglophone, Mary Gallagher est très connue. «Le fantôme de Montréal, c’est elle: elle revient tous les six ans et cherche sa tête!»
De l’empathie pour deux femmes
Son réflexe d’empathie a pris les devants. «Chaque fois qu’on parlait de ces deux femmes-là, c’était tout de suite “deux prostituées”. Les articles parus à l’époque les décrivaient comme des débauchées, des dépravées. Jamais on ne s’intéressait à l’environnement qui avait créé cet événement-là.»
Éric Dupont s’est bien documenté et ajoute une touche de réalisme magique à l’histoire en faisant naître Mary Gallagher dans un melon brodé, au pied du mont Royal.
«Mon empathie est devenue comme une espèce de relation toxique: je voulais être le sauveur de Mary Gallagher! Mais pour la sauver, il fallait que je voyage dans le temps. J’ai envoyé quelqu’un là, pour infléchir le cours des événements.
«Attention: elle n’est pas née dans un melon. Elle est née en Ontario. Mais je trouvais ça trop plate. Je voulais aussi que ma Mary Gallagher à moi soit montréalaise de bord en bord, une enfant de la terre de Montréal.»

La ricaneuse
Éric Dupont
Éditions Marchand de feuilles
456 pages
▶ En librairie le 16 septembre.
- Éric Dupont est l’auteur du best-seller multiprimé La fiancée américaine.
- Il est professeur à l’Université McGill.
- Il sera présent au Salon du livre de Montréal.
«Il n’existe que peu de plaisir plus exaltant sur terre que de sortir avec une copine un soir de Saint-Jean à Montréal. Certes, l’espérance de vie moyenne y est de quarante-quatre ans. Et pour la racaille qui zone dans le port le soir, il faut encore déduire quelques années. Selon la langue et la religion de ses parents, un nouveau-né aura jusqu’à une chance sur trois de mourir avant d’avoir célébré son premier anniversaire. Mais pour Mary et Susan, cela n’est qu’une raison de plus pour faire la fête. Buvons ce soir, nous pourrions mourir demain.»
– Éric Dupont, La ricaneuse, Éditions Marchand de feuilles
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