Plus de privé en santé: Legault s’attaque encore à Éric Duhaime
La CAQ promet deux «mini-hôpitaux» privés, un à Québec et l’autre dans l’Est de Montréal

Marc-André Gagnon
MONTRÉAL – Au jour 7 de la campagne électorale, François Legault s’est attaqué une fois de plus – sans le nommer – à Éric Duhaime, en lui reprochant de prôner «un système à deux vitesses», alors que la CAQ entend miser sur la création de « mini-hôpitaux » privés pour désengorger le réseau de la santé.
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De passage dans la circonscription d’Anjou (représentée depuis 20 ans par la libérale sortante Lise Thériault, qui se retire de la vie politique), le chef caquiste a présenté un nouveau concept de cliniques médicales privées, dont les services seraient remboursés par le régime public.
Deux de ces centres, à mi-chemin entre un GMF et un hôpital, seraient construits d’ici 2025 au Québec: l’un dans l’Est de Montréal et un autre à Québec, promet la CAQ.
Chacun coûterait 35 millions $ et serait financé, construit et géré entièrement par le privé, à la suite d’un appel d’offres public que lancerait le gouvernement.
Ces cliniques comprendraient un GMF ouvert 7 jours sur 7, de 8h à 20h, une urgence ouverte 24h sur 24 pour traiter des cas mineurs, des salles de chirurgies d’un jour, une pharmacie et un centre de prélèvement et radiologie.
«Ce qu’on propose, c’est d’innover dans la place du privé, mais avec des services qui seraient gratuits pour les patients», a résumé François Legault.
L’objectif, a expliqué le ministre sortant de la Santé, Christian Dubé, demeure celui d’offrir un «meilleur accès à la première ligne», en développant une offre «complémentaire».
Le privé n’est pas «le diable»
Le chef de la CAQ a reconnu d’entrée de jeu que la place du privé dans le réseau de santé, «c’est toujours un sujet un peu délicat au Québec».
«Il y a des personnes qui pensent que le mot privé, c’est comme si on parlait du diable», a-t-il observé.
Mais rapidement, les critiques de François Legault se sont tournées, à l’évidence, vers son rival conservateur Éric Duhaime, qui s’est engagé hier à faire davantage de place au privé, tout en accusant la CAQ d’avoir renié les orientations que privilégiait dans le passé l’Action démocratique du Québec.
«Il y en a d’autres, a continué M. Legault, qui proposent un système à deux vitesses où les riches pourraient se payer des assurances et donc avoir des services que les pauvres ne peuvent pas se payer. Nous à la CAQ, c’est bien clair: on est un parti modéré, on est un parti pragmatique, pas dogmatique. Ce qu’on propose, c’est d’innover [...] avec le privé. »
«Je pense que François Legault est tombé en amour avec le privé et, dans ce cas-là, l’amour le rend aveugle», a réagi le porte-parole solidaire Gabriel Nadeau-Dubois, en marge d’une annonce à Rimouski sur le déploiement des CPE.
Le modèle du privé a déjà démontré son inefficacité, estime-t-il. «Le privé en santé, si ça marchait, on le saurait, parce qu’il n’y en a jamais eu autant dans notre système de santé», a raillé M. Nadeau-Dubois.
«Les agences privées de placement, est-ce que ça fonctionne? Non! Les CHSLD privés, est-ce que ça fonctionne? Non!», a-t-il énuméré à titre d’exemple.
Pour Gabriel Nadeau-Dubois, l’ouverture de la CAQ à une certaine forme de privé témoigne de l’impact du Parti conservateur du Québec sur sa campagne. « Je pense que François Legault est influencé par Éric Duhaime », a commenté le porte-parole de Québec solidaire.
Il cite l’exemple de GNL-Québec, où le gouvernement Legault a semblé souffler le chaud et le froid. « Et c’est vrai aussi en santé. M. Legault prend un virage à droite, un virage vers le privé en santé, alors qu’on sait que ça ne marche pas. Et moi, je pense qu’il fait ça parce qu’il est de plus en plus influencé par Éric Duhaime », estime-t-il.
Satisfait de son appel au calme
Plus tôt cette semaine, alors qu’il était de passage en Beauce, où le PCQ pourrait chauffer la CAQ, François Legault a dénoncé le comportement «irresponsable» d’Éric Duhaime, en l’accusant de profiter de ceux qui ont souffert pendant la pandémie pour «gagner des votes».
Puis lors d’un arrêt dans un casse-croûte pendant lequel M. Legault s’est fait interpellé par une citoyenne non vaccinée disant avoir été victime de «discrimination», la vice-première ministre sortante Geneviève Guilbault a reproché à Éric Duhaime d’avoir «fédéré» la colère pour se lancer en politique.
Après les nombreux actes de violence qui ont fait les manchettes dans les derniers jours, le premier ministre sortant s’est dit «satisfait» de l’appel au calme lancé la veille par son rival conservateur. «C'était la seule chose à faire, il l'a fait», a commenté brièvement M. Legault.
- Avec la collaboration de Patrick Bellerose, Bureau parlementaire
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