«J’étais le bâton d’épicerie»: quand St-Louis ne servait qu’à séparer le banc

Nicolas Cloutier
«J’étais le bâton d’épicerie.» C’est avec cette traduction approximative mais colorée que Martin St-Louis a résumé le rôle effacé qu’il a été contraint à occuper sur la scène internationale avec le Canada au cours de sa carrière.
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Il n’y a pas de traduction adéquate pour «grocery stick», ce terme péjoratif propre au jargon du hockey pour désigner le joueur que l’on place au milieu du banc afin de séparer attaquants et défenseurs, sachant très bien qu’il ne sera envoyé que sporadiquement sur la patinoire.
St-Louis était là à Sotchi en 2014 lors de la dernière présence des joueurs de la Ligue nationale de hockey (LNH) aux Jeux olympiques. Il sait comment s’est senti Samuel Montembeault jeudi soir, parce qu’il y a plus de 10 ans, il n’avait pas joué un rôle de premier plan dans la conquête de la médaille d’or du Canada.
«On parle de Sam qui n’a pas joué, mais en demi-finale contre les États-Unis, je n’ai pas joué un shift», s’est souvenu St-Louis, vendredi matin après l’entraînement des Canadiens de Montréal au Centre Bell.
Le rôle de St-Louis contre les États-Unis? «Bâton d’épicerie», qui fait référence au séparateur que les clients apposent sur le tapis de caisse pour distinguer leur commande de celle du client précédent.
«J’étais le grocery stick, a-t-il imagé. Qu’est-ce que tu apprends, assis sur le banc de la sorte? Dans un moment où c’est difficile, car on est tous fiers, on est capables de penser à plus qu’à soi-même. Moi, j’étais le bâton d’épicerie et j’encourageais les gars.»
C’est ingrat, mais le bâton d’épicerie, il est important, au fond.
«Tu ne peux faire la baboune parce que tu as un gros CV et que tu ne joues pas, a expliqué l’entraîneur-chef des Canadiens. J’encourageais les gars. C’est toujours plus gros que toi-même. En finale [contre la Suède]? Bâton d’épicerie. Même chose. Même quand je ne jouais pas, les gars respectaient mon leadership.»
Fin trentaine, dans le dernier droit de sa carrière, St-Louis connaissait le tabac et il acceptait de jouer les leaders dans l’ombre. À la Coupe du monde de 2004, c’était complètement différent. Il essayait de ne pas s’émerveiller devant les Joe Sakic et Mario Lemieux.
«Ce sont des moments où tu te pinces, mais il ne faut pas que tu te pinces, a-t-il ironisé. Tu dois être en mesure de profiter du moment et apprendre, retenir des choses de ces joueurs-là.»
C’est gros, mais pas autant que la Coupe
Après tout, les occasions de représenter son pays ne sont pas à prendre à la légère. Il faut en retirer le maximum. Parlez-en à Connor McDavid, par exemple, qui a enfin pu représenter son pays dans un tournoi opposant les meilleurs, après avoir attendu pendant de longues années.
«Ce sont des occasions qui n’arrivent pas souvent et ce n’est pas facile d’être sélectionné dans ces équipes, a aussi noté St-Louis. Je suis content d’avoir eu la chance de le vivre.»
Un tournoi international, c’est gros. L’enjeu sera toujours immense. Mais plus gros que la Coupe Stanley? Voilà un pas que St-Louis n’est pas prêt à franchir.
«La Coupe Stanley, c’est toujours quelque chose qui va être devant pour moi, s’est-il prononcé. C’est quelque chose que tu bâtis pendant si longtemps avec un noyau de joueurs. Vous passez à travers tellement d’épreuves. On parle de deux mois de séries éliminatoires. Tu dois aller chercher 16 victoires.»
Le trophée le plus difficile à gagner, diront certains. Ce n’est pas pour rien.